La raison d’État, concept clé de la modernité politique et de la pensée étatique du XVIIe siècle, est approchée à rebours dans cette étude, afin de mieux en saisir les origines, et de comprendre les conditions qui en permettent l’émergence. Par l’adoption d’une méthode généalogique, ce travail vise aussi à concilier l’école historique française des Annales et la tradition anglo-américaine de l’histoire des idées, et à traiter les théories politiques comme un objet historique à part entière. Chaque texte et chaque auteur est donc intégré dans un enchaînement d’influences et de relations sans dénier à chacun son individualité intellectuelle. Parmi les notions principales qui structurent toutes les définitions de la raison d’État, la nécessité, l’utilité publique, l’exception à la loi connaissent des évolutions profondes dès le XIIe siècle, sous l’effet de la redécouverte des Anciens par Jean de Salisbury et plus encore Thomas d’Aquin, du travail des juristes, tant en droit canonique que romain, ainsi que dans la pratique fiscale des XIIIe et XIVe siècles. Les progrès de l’idéologie royale, l’affirmation d’une nécessité spécifique à l’action politique chez Guillaume d’Ockham, et l’essor du concept d’État souverain sous l’influence particulière de Marsile de Padoue, participent aussi de cette élaboration à l’œuvre, notamment dans l’Italie des cités-États. Le parcours s’achève par l’exposition de trois différentes définitions de la raison d’État qui, d’abord chez Machiavel et Guichardin, puis chez Botero, puis enfin chez les juristes dont Ammirato et Canonhiero, ouvrent la voie au triomphe de l’étatisme et au renouvellement des questionnements politiques, à l’aube des Lumières. / This survey attempts to draw a new understanding of reason of State, as a key concept in modern politics and in 17th century State-centered thought. It is therefore studied backwards, in order to better describe its origins, and to understand what conditions enabled its formulation. The genealogic method is chosen as a way to conciliate the French school of the Annales and the anglo-american tradition of history of ideas, and to handle political ideas as historical artefacts. Every text and author is therefore apprehended as a part of a chain of influences and relationships, while intellectual singularities are preserved. Among the main concepts that participate in defining reason of State, necessity, public utility and legal exception evolve deeply from the 12th century, as a result of the rediscovery of ancient authors by John of Salisbury and still more by Thomas Aquinas, of recent developments in canon and roman law, and of new fiscal policies during the 13th and 14th centuries. The improvements of royal ideology, the new necessity specifically applied to political action in William of Ockham’s thought, and the rise of the concept of a sovereign State under the primary influence of Marsilius of Padua, also participate in this preparation, now centered on Italian city-states. The account ends with a view on three different definitions of reason of State, that correspond first to Machiavelli and Guicciardini, then to Botero, and finally to the legal thought of Ammirato and Canonhiero. This outcome paves the way to the triumph of Statism, and to the new developments of political theory during the Enlightenment.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2015PA040082 |
Date | 16 September 2015 |
Creators | Le Mauff, Julien |
Contributors | Paris 4, Verger, Jacques |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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