Un des défis de la promotion de la santé est de concevoir des outils théoriques et des interventions qui prennent en compte la façon dont les structures influencent le parcours de vie des individus tout en reconnaissant la capacité des individus à déterminer leur vie et à façonner, en retour, le monde dans lequel ils vivent. Le cadre d’analyse des mécanismes d’exclusion permet une telle intégration, particulièrement autour de la notion d’accès (Adam et Potvin, 2016). Ce cadre d’analyse conçoit les mécanismes d’exclusion comme un ensemble d’éléments de différents niveaux qui, en interaction, limitent l’accès aux droits, ressources et capacités pour vivre une vie en santé et mènent à des situations de vulnérabilité. Il propose de regarder les questions d’accès comme une fenêtre pertinente pour s’intéresser à l’interaction entre les individus et les structures.
Partant de ce cadre d’analyse, le but de cette thèse est de comprendre comment les limites d’accès aux droits, aux ressources et aux possibilités de développer des capacités interagissent avec l’action des individus et le contexte dans lequel ils déploient cette action. Afin d’être en mesure d’examiner des contextes influencés par des mécanismes d’exclusion et d’étudier le déploiement de l’action des individus, cette recherche a pris appui sur deux postulats : 1) l’insécurité alimentaire est une manifestation de mécanismes d’exclusion limitant l’accès aux ressources financières nécessaires permettant de se nourrir en quantité et en qualité suffisante ou générant la peur de ne pas avoir la possibilité de se nourrir en quantité et en qualité suffisante; et 2) se rendre dans un organisme communautaire est une manifestation des individus de leur capacité à déployer des actions pour faire face aux obstacles qu’ils rencontrent. Partant de ces postulats, nous avons étudié, par voie d’entretiens de type récit de vie, le parcours de 12 individus en lien avec la fréquentation d’un organisme communautaire en sécurité alimentaire.
Sur la base de l’analyse qualitative des récits de vie recueillis, le concept d’agir-en-contexte a été élaboré. Celui-ci comporte un système de cinq composantes : l’agentivité, les ressources, les capacités, les menaces et les opportunités. Ces composantes permettent de comprendre comment les mécanismes d’exclusion façonnent le contexte et interagissent avec la façon dont se déploie l’action des individus. En particulier, le concept d’agir-en-contexte suggère que les mécanismes d’exclusion modifient la configuration du contexte en augmentant les menaces, en diminuant les opportunités et en agissant sur les capacités et les ressources des individus et, par extension, leur agentivité. Partant de ce concept, trois types d’agir-en-contexte ont été élaborés : 1) l’agir-en-contexte motivé : les individus agissent en fonction de leurs désirs, souhaits, aspirations, valeurs et principes et font face à peu de menaces et beaucoup d’opportunités; 2) l’agir-en-contexte contraint : l’action est essentiellement orientée vers la gestion des menaces, laissant peu ou pas de place pour l’actualisation des désirs, souhaits, aspirations, valeurs et principes; et 3) l’agir-en-contexte synchronique : les individus tentent d’agir en fonction de leurs désirs, souhaits, aspirations, valeurs et principes, mais doivent déployer des actions pour faire face aux menaces qui limitent l’actualisation de leurs désirs, souhaits, aspirations, valeurs et principes.
Cette thèse propose donc une nouvelle conceptualisation du contexte et donne de nouvelles clés analytiques pour comprendre l’action des individus. À terme, nos résultats suggèrent que l’intervention de promotion de la santé ayant pour finalité de renforcer la capacité d’agir des individus nécessite une analyse de la configuration de l’agir-en-contexte afin de réduire la densité des menaces et ainsi favoriser l’apparition d’opportunités, l’augmentation des capacités et de ressources et ultimement, permettre aux individus de déployer leurs actions en fonction de leurs désirs, souhaits, aspirations, valeurs et principes. / One of the challenges in health promotion is to design theoretical tools and interventions that take into consideration the way structures influence individuals’ life paths, while also recognizing individuals’ ability to make choices that shape their life and, in turn, have an effect on the world in which they live. The exclusionary mechanisms framework makes it possible to assimilate these two occurrences, particularly with regards to the notion of access (Adam & Potvin, 2016). This analytical framework conceives of exclusion mechanisms as a set of elements at various levels that, during interaction, limit access to rights, resources, and capacities for a healthy life and lead to situations of vulnerability. The framework proposes to look at issues of access as a relevant opportunity for addressing the interaction between individuals and structures.
With this analytical framework as a starting point, the goal of this thesis is to understand how limited access to rights, resources, and possibilities for developing capacities interact with the context in which individuals evolve and their ability to act. In order to examine certain contexts that have been influenced by exclusionary mechanisms, as well as how individuals carry out their actions within these contexts, we postulated that: 1) Food insecurity is the result of exclusionary mechanisms that limit access to the financial resources necessary to feed oneself in sufficient quantity and quality, or that provoke anxiety that one will not be able to feed oneself in sufficient quantity and quality; and 2) Going to a community organization reflects individuals’ ability to act in the face of such adversities. Based on these postulates, and using life story interviews, we studied the paths of 12 individuals participating in a food insecurity community organization.
The concept of acting-in-context has been developed based on the qualitative analysis of the life stories collected. This concept is composed of a five-part system: agency, resources, capacities, threats, and opportunities. These components make it possible to understand how exclusion mechanisms shape context and adjust individuals’ ability to act. More particularly, the concept of “acting-in-context” suggests that exclusionary mechanisms modify the context’s configuration by increasing threats, decreasing opportunities, and acting on individuals’ capacities, resources, and, by extension, agency. Based on this concept, three types of “acting-in-context” were developed: 1) motivated “acting-in-context”, in which individuals act according to their wishes, desires, aspirations, values, and principles while being faced with few threats, but many opportunities; 2) constrained “acting-in-context”, in which acting is essentially turned toward managing threats, leaving little or no room for wishes, desires, aspirations, values, and principles; and 3) synchronic “acting-in-context,” in which individuals attempt to act according to their wishes, desires, aspirations, values, and principles, but must also act otherwise in the face of threats limiting the possibility for them to realize their desires, hopes, aspirations, values and principles.
This thesis therefore provides a new way of conceptualizing context and new analytical tools to understand individuals’ actions. In the end, our results suggest that a health promotion intervention that tries to strengthen individuals’ capacities needs to analyze the configuration of “acting-in-context” in order to reduce the density of threats. In this way, the intervention will increase opportunities, capacities, and resources, as well as enable individuals to act according to their wishes, desires, aspirations, values, and principles.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/23551 |
Date | 03 1900 |
Creators | Adam, Caroline |
Contributors | Potvin, Louise, Gendron, Sylvie |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | fra |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou mémoire / Thesis or Dissertation |
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