Depuis que la Ministère des Ressources Naturelles du Québec (MRN) a instauré son programme de reboisement au début des années quatre-vingt, la culture des semis en récipients s'est rapidement imposée comme principal mode de production. Afin de qualifier les semis au moment de la livraison des plants, le MRN utilise 15 normes et critères de qualité. Les critères visant les racines concernent entre autres la répartition uniforme de la masse racinaire et la présence de déformations. Mais aucun critère ne porte sur la présence d'un système racinaire adventif sur la tige des semis produits. Pourtant, les espèces du genre Picea ont un système racinaire superficiel dont la majeure partie se situe dans les 10 premiers centimètres de sol. Par exemple, des semis d'épinette noire établis en tube Ontario ont développé un système racinaire dont les deux tiers sont composés de racines adventives dix ans après la plantation. L'enfouissement de la tige causée par une plantation trop profonde ou l'accumulation de débris autour de la tige amèneraient les conditions d'humidité élevées nécessaires à la formation des racines adventives caulinaires.
L'objectif général de cette expérience est de déterminer les conditions de culture favorables à la formation de racines adventives caulinaire. Des semis d'épinette noire d'un an ont été plantés à différentes profondeurs (au collet, l'hypocotyle enfoui, 5 premiers cm de la tige enfouis) dans un mélange tourbe:vermiculite 2:1 (v/v) et soumis à différents traitements de contenu en eau du substrat (100%, 75%, 50% et 25% de la capacité de rétention en eau du substrat). Six plants ont été plantés par pot-traitement et chaque pot-traitement distribué aléatoirement dans un sous bloc. Deux sous-blocs composaient un bloc, et quatre blocs ont été distribués dans la serre.
Le contenu en eau du substrat a été maintenu par gravimétrie à l'aide d'un système automatisé. La vérification du contenu en eau du substrat se faisait chaque semaine en pesant chaque pot. Les semis ont été cultivés durant 25 semaines: les 8 premières en période de croissance en hauteur de la tige, les 2 suivantes sous traitement photopériodique de mise en dormance et les 15 dernières en période de dormance des semis. La température ambiante jour/nuit a été maintenue à 21°C/18°C. Les semis ont été soumis à la photopériode naturelle et la dormance induite avec une photopériode de 8 heures durant deux semaines.
Les résultats indiquent que les racines adventives ne se forment que sur la partie de tige enfouie et à l'aisselle des branches dans certains cas. Aucun semis n'a formé des racines adventives sur l'hypocotyle. Une augmentation du nombre de lenticelles hypertrophiées présentes sur la tige et l'hypocotyle avec l'augmentation du contenu en eau du substrat a été observée. Ceci concorde avec le fait qu'une augmentation du contenu en eau diminue le taux d'oxygène du substrat, ce qui provoque l'hypertrophie des lenticelles. Le nombre total de racines adventives augmente avec l'augmentation du contenu en eau du substrat. Par contre, le système racinaire initial a eu une croissance importante et aucune lésion ou mort des racines n'a été observée. Il semble donc que l'enfouissement ou l'accumulation de débris autour de la tige amène des conditions d'humidité suffisantes pour la formation de racines adventives, l'augmentation du contenu en eau ne faisant qu'accélérer leur formation. La mise en dormance favorise la croissance des racines adventives tout autant que celle du système racinaire initial puisque le nombre total de racines adventives augmente dans le temps et que le rapport biomasse sèche caulinaire/biomasse sèche racinaire diminue fortement après la mise en dormance des semis.
Pour tous les traitements et à chaque échantillonnage, la profondeur de plantation a influencé la hauteur, la biomasse sèche totale, la biomasse sèche racinaire et de la partie aérienne des semis. Les semis plantés profondément avec une partie de la tige enfouie avaient une tige plus longue après la croissance en hauteur de la tige mais plus courte à la fin de la période de dormance. Les racines adventives présentes sur la tige des semis enfouis semblent aider le système racinaire initial mais ne peuvent compenser la perte de surface photosynthétique par l'enfouissement d'aiguilles et de branches. Ceci est confirmé par une biomasse sèche totale et des organes inférieurs aux semis plantés moins profondément.
Les semis soumis au stress hydrique ont vu leur croissance en hauteur diminuée durant tout le cycle de croissance. Ces semis ont par contre eu une croissance en diamètre et surtout une biomasse sèche racinaire proportionnellement plus grande que les semis bien irrigués durant la période de croissance en hauteur de la tige. De plus, le contenu en glucides solubles était élevé, surtout au niveau racinaire, durant la même période, aucune différence n'étant remarquée au niveau du contenu en amidon durant tout le cycle de croissance. Après la mise en dormance des semis, les semis stressés ont eu une croissance en diamètre et racinaire importante. L'accumulation de glucides solubles dans les racines semble provenir de l'hydrolyse de l'amidon durant la période de croissance en hauteur de la tige et de leur non utilisation par l'arrêt de croissance en hauteur et une faible croissance racinaire durant cette période. La mise en dormance a permis aux semis d'utiliser les glucides solubles présents pour leur croissance, leur contenu ne différant plus des semis soumis à des contenus en eau du substrat plus élevés à la fin de cette période. Les semis ayant été soumis à un stress hydrique semblent donc être physiologiquement identiques aux semis bien irrigués et prêts à reprendre une croissance normale.
L'enfouissement d'une partie de la tige des semis d'épinette noire est donc une condition nécessaire à la formation de racines adventives. Un contenu en eau du substrat élevé ne fait qu'accélérer la formation et la croissance de celles-ci. De plus, la mise en dormance des semis favorise la croissance des racines adventives ayant été formées durant la phase de croissance en hauteur de la tige. Les semis soumis au stress hydrique sont en mesure de survivre en accumulant des glucides solubles, surtout dans leurs racines, durant la période de croissance en hauteur de la tige. Ceci permet aux semis de maintenir la turgescence des tissus et maintenir leur métabolisme de base. La mise en dormance permet une croissance racinaire accrue afin d'explorer un volume de sol plus grand, permettant une augmentation de l'absorption de l'eau. Dans ces conditions les semis ne sont plus physiologiquement stressés et peuvent donc reprendre une seconde saison de croissance.
Identifer | oai:union.ndltd.org:Quebec/oai:constellation.uqac.ca:1180 |
Date | January 1996 |
Creators | Aubin, Normand Kevin |
Source Sets | Université du Québec à Chicoutimi |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou mémoire de l'UQAC, NonPeerReviewed |
Format | application/pdf |
Relation | http://constellation.uqac.ca/1180/, doi:10.1522/1519253 |
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