Considérant la « nouveauté » du phénomène de dénonciation auprès des policiers et l’utilisation
croissante du concept social de « crime motivé par la haine », peu d’études ont été réalisées au
Canada sur l’incidence de ces crimes pour les personnes comme pour la société. Cette recherche
exploratoire a comme objectif de comprendre la façon dont ce type de crime se distingue des autres
manifestations de conflits ou d’incidents et de comprendre les impacts de ce type de victimisation
pour les homosexuels en particulier. Plus spécifiquement, ce mémoire vise à approfondir la
compréhension du stigmate homosexuel et son impact sur la reportabilité des événements de
victimisation criminelle aux autorités judiciaires. Pour ce faire, cinq intervenants communautaires,
deux policiers, un avocat et quatre victimes considérant avoir vécu des événements de violence
homophobe ont été interviewés. Cet échantillon diversifié a permis de mieux comprendre le
phénomène de sous-déclaration des incidents de violences homophobes de la part des victimes et
d’obtenir une vue d’ensemble des perceptions des acteurs clés qui peuvent être confrontés au
phénomène.
L’analyse des entretiens suggère d’importantes lacunes sur le plan de la formation des divers
intervenants qui entrainent des difficultés à reconnaître une violence homophobe. Les intervenants
confient ne pas se sentir pas suffisamment outillés pour intervenir auprès d’une victime de violence
homophobe, n’estiment pas tous posséder les compétences et une compréhension suffisante des
réalités des minorités sexuelles, de l'homophobie et de l'hétérosexisme, en somme, l’ensemble des
savoirs ultimement nécessaires à une assistance et un accompagnement efficaces pour la déclaration
aux autorités d’une telle violence vécue par les victimes. Du côté des victimes de violence(s)
homophobe(s), il ressort que la discrimination basée sur l’orientation sexuelle est encore prégnante
dans leurs interactions quotidiennes. De leur point de vue, la banalisation et l’impunité de certains
comportements homophobes par les instances judiciaires viennent renforcer l’idée chez les victimes
et la société d’une forme d’infériorité de l’orientation homosexuelle. L’apposition d’une étiquette
homosexuelle paraît ainsi avoir de multiples conséquences psychologiques et sociales sur les
victimes, notamment sur leur développement identitaire et sexuel. L’intégration des stigmates
homosexuels et l’autostigmatisation, qui les poussent à se déprécier, voire à déprécier l’ensemble de
la communauté homosexuelle, surgissent de leur perception de la présence de forts stéréotypes
homosexuels, d’une société majoritairement hétérosexiste et de l’opérationnalisation sociale d’une
distanciation entre le « nous » hétérosexuel et le « eux » homosexuel. Par leur marginalisation, leur
mise en infériorité historique, l’ambiguïté du concept de « crimes motivés par la haine », la noncompréhension
de la violence et des répercussions qu’ont les intervenants communautaires et
judiciaires de la situation et partant, dans bien des cas, de la prise en charge inadéquate qui en
découle pour les victimes des violences homophobes, il est possible de comprendre les
appréhensions mentales que les victimes entretiennent ainsi que leur réticence à solliciter de l’aide et
encore plus à rapporter la victimisation vécue aux autorités judiciaires. / Given the “novelty” of the denunciation phenomenon with the police and the increasing use of the
social concept of "hate crime", few studies have been conducted in Canada on the impact of these
crimes for individuals and for society. This exploratory research aims to understand how this type of
crime is different from other conflicts of events or incidents and to understand the impacts of this
type of victimization on homosexuals in particular. More specifically, this paper aims to deepen
understanding of the homosexual stigma and its impact on reportability of criminal victimization
events to judicial authorities. For those purposes, five community stakeholder, two policemen, a
lawyer and four victims who believes that they have experienced homophobic violence events were
interviewed. This diversified sample allowed a better understanding of the phenomenon of
underreporting of homophobic violence incidents by victims and a comprehensive overview of the
perceptions of key stakeholders who may face this phenomenon.
The interviews analysis suggests significant deficiencies in the training of the various stakeholders
that cause difficulties to acknowledge homophobic violence. Stakeholders entrust feeling not
sufficiently equipped to intervene with a victim of homophobic violence, acknowledge that they do
not have the necessary skills and a sufficient understanding of the realities of sexual minorities,
homophobia and heterosexism, in sum, all the knowledge ultimately necessary to provide assistance
and effective support to report to authorities such violence experienced by victims. As for victims of
homophobic (s) violence (s), it is clear that discrimination based on sexual orientation is still vivid in
their daily interactions. From their perspective, the trivialization and impunity of some homophobic
behavior by the courts reinforce the idea among victims and society of a form of inferiority of the
homosexual orientation. The affixing of homosexual label appears to have multiple social and
psychological consequences for victims, in particular on their identity and sexual development. The
integration of gay stigma and self-stigma that drive homosexuals to depreciate themselves or the
entire gay community, arise from their perception of the presence of strong homosexual stereotypes,
a predominantly heterosexist society operationalizing social distancing between "us" heterosexuals
and "them" gays. By their marginalization, their social inferiority position throughout History, the
ambiguity of the concept of "hate motivated crimes", the lack of understanding of violence and the
impact that community and judicial stakeholders of the situation and thus, in many cases, may be a
consequence of inadequate care for victims of homophobic violence, it is possible to understand the
mental apprehensions that victims have and their reluctance to seek help and even more, to report to
judicial authorities their victimization.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/16103 |
Date | 04 1900 |
Creators | Roy, Joey |
Contributors | Cousineau, Marie-Marthe |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation |
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