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Feintes, essences et mimesis chez Nicole Brossard, Patrick Imbert et Marie-Claire Blais

En effet, la venue de Nicole Brossard à l'écriture féminine et/ou lesbienne s'est effectuée sous le signe d'un essentialisme stratégique longtemps avant que Stephen Heath et Gayatri Spivak ne popularisent cette expression. Aussi ne peut-on s'intéresser aux points d'intersection entre essence et feintise, dans l'oeuvre brossardienne, sans par la même occasion revenir à cette époque trouble où des sujets feinteurs se disputaient l'arène du féminin, où l'écrivaine refoulait aux limites de l'écriture-femme des sujets hybrides susceptibles de mettre en abyme ses propres im/postures. Aux frontières du féminin tenteront également de passer les écritures et identités lesbiennes, passant tantôt pour autres qu'elles ne sont vraiment, tantôt par cette figure utopique que l'écrivaine prend pour toute femme, pour toute lesbienne. L'idéal brossardien aura d'ailleurs un tel ascendant sur ses contemporaines que même ses contemporains souhaiteront se faire lesbiennes, émulant et défiant l'auteure du Désert mauve tout à la fois, comme nous le découvrirons dans une nouvelle de Patrick Imbert ou seront taraudées les cloisons entre les genres identitaires et scripturaires.
Car l'essence s'avère avant tout une question de frontières, de territoires autour desquels se greffent des identités marginales, et au coeur desquels s'imposent des entités dominantes, différenciatrices. Voilà, il est vrai, un tiroir dont les secrets encore aujourd'hui nous résistent où dont plusieurs souhaiteraient perdre la clef, car se cachent au fond de lui d'épineux problèmes d'exclusion, souvent involontaires, causes par une rhétorique essentialiste quelque peu piègée. La philosophe Elizabeth V. Spelman a certes eu raison de déconstruire métaphores et analogies, de démonter les mécanismes de forclusion intrinsèques à ces figures. Mais à tant vouloir franchir des frontières interdites, il arrive que l'on doive non seulement passer pour une autre, mais aussi, avec d'autres, comme nous le démontrera un roman de Marie-Claire Blais. Or, qu'advient-il de l'intention solidaire, lorsque celle-ci se conjugue à des problèmes de légitimité, lorsqu'elle ne saurait admettre certaines relations de pouvoir ou lorsque encore, elle tend à les reproduire? Qui disparait, dans la foulée des emprunts identitaires? (Abstract shortened by UMI.)

Identiferoai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/29080
Date January 2004
CreatorsBoulanger, Ghislaine
PublisherUniversity of Ottawa (Canada)
Source SetsUniversité d’Ottawa
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeThesis
Format330 p.

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