Les paramètres de l’exil, comme déplacement, se transforment aujourd’hui dans un contexte de mondialisation, interrogeant le rôle des nations alors que les sociétés impliquent de plus en plus de mobilité et de diversité culturelle. Cette condition d’exilé aux
repères mouvants, inscrite dans une temporalité discontinue et dont l’expérience est toujours douloureuse, a donné lieu à une littérature prolifique dans le domaine des études littéraires au cours du 20e siècle. En quoi le 21e propose-t-il un regard différent sur cette condition ? Dans ce mémoire nous analyserons quatre œuvres contemporaines qui nous proposent différentes variations des transformations identitaires profondes qui caractérisent la condition d’exilé. Deux des grands axes autour desquels s’est articulée la condition d’exilé ont été développés par Edward Said, qui propose une posture critique et politique, et Julia Kristeva, qui présente l’exil comme une condition plutôt psychique. Suivant cette perspective analytique, l’autobiographie de Mourid Barghouti fait écho à la compréhension de l’exil telle que l’entend Said, en pleine autonomie instauratrice. Puis, le roman de Rawi Hage dans une expérience plus psychique de l’exil, plus traumatique et plus violente du vécu avant l’exil, suggère que le rapport avec le milieu environnant a un impact sur l’expérience de l’exil, alors que dans ce cas il reste dysfonctionnel, et qu’un rapport pathologique à l’existence peut ensuite se manifester. Ensuite, le roman d’Abla Farhoud expose la possibilité d’un dépassement de cette expérience pathologique de l’exil par la distance, celle de l’âge et de la prise de parole. Finalement, dans la pièce Incendies de Mouawad, l’expérience psychique de l’exil est dépassée à la fois par une traduction de l’indicible de la violence, par un retour sur les traumas précédant l’exil, et par un travail collectif – comme autres formes de distances. Cette dernière œuvre est donc porteuse d’une compréhension de l’exil impliquant une dimension psychique, tout en devenant critique et politique, telle que le révèlent les écrits de Jacques Rancière. À la lumière de ces analyses, la condition d’exilé réclame d’urgence un retour sur les traumas précédents, le trauma qu’est l’exil, afin qu’une autonomie, une créativité et un engagement s’en dégagent, dans une société, dans un monde plus grand que soi. Pour les trois derniers auteurs, c’est la société québécoise qui révèle à la fois une compréhension des problématiques majeures de la condition d’exilé et une ouverture face à celles-ci, en ce début de 21e siècle. / Exile is a condition of displacement and a phenomenon that affects great masses of people today. Although this experience exists since the proverbial beginning of time, its parameters are changing in the present context of globalization, which transforms the role of nations and where societies are characterized by greater mobility and cultural diversity. The profound psychological and cultural transformations of identity – inward and outward – to which people are confronted through displacement can be understood as a condition per se, an exilic condition. This condition with moving marks, and which develops in a discontinuous temporality and as a necessarily painful experience, has been the source of prolific literature and of literary studies in the 20th century and before. How, differently then, does the 21st century gaze at this condition ? In this thesis, four works are analyzed in which the authors present different visions of the exilic condition. Two main lines of thinking have been explored around this condition: Edward Said embraced a critical and political posture while Julia Kristeva conceived of exile in its psychological dimensions. Within these analytic perspectives, Mourid Barghouti’s autobiography has affinities with Said’s approach as it inaugurates an autonomous condition. Through Rawi Hage’s novel, a more psychological experience of exile is observed, one that is more violent and traumatic. It sheds light on the undeniable impact of the environment on the experience of exile in the host country. If the relation to the host country stays dysfunctional, a pathological attitude to the exilic experience may develop. Abla Farhoud’s novel explores the possible overcoming of the pathologies of exile through distance, age, time, and words, the distance needed for Dounia. Finally, the psychological limitations of exile can be overcome by translating the “unspeakable” in violence, by a return to the pre-exilic traumas, and by a collective sharing of this restorative work. Mouawad’s play also exposes the psychological dimension of exile, but it also maintains its critical and political ones. We observe through these analyses that the exilic condition demands a redressing of the traumas that preceded exile, understood as another trauma, so that the exiled can exist in an autonomous, creative and committed way in his or her society of adoption. For the last three authors, this society is Québec, which shows openness to, and comprehension of, the major issues of the exilic condition in the 21st century.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/9226 |
Date | 08 1900 |
Creators | Crépeau, Noémie |
Contributors | Rahman, Najat, Guédon, Jean-Claude |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation |
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