Les nouvelles coloniales de Kipling et de Maugham mettent en scène, respectivement, la société anglo-indienne à l’époque du Raj et la vie dans les colonies anglaise et hollandaise des îles d’Asie du sud-est durant l’entredeux-guerres. Malgré ces spécificités contextuelles et l’écart temporel entre les époques auxquelles les deux auteurs écrivent leurs nouvelles, ces dernières sont invariablement traversées par le motif d’une colonisation pensée comme crise. Or le genre de la nouvelle porte formellement l’idée de crise. En utilisant le rapprochement opéré par les études postcoloniales entre modernité et colonisation comme paradigme de lecture, cette thèse montre comment la nouvelle peut opérer une prise spécifique sur ce rapport et se révéler lieu de trouble. Dans le cadre de cette réflexion sur la propension de ce genre à déstabiliser la modernité politico-philosophique et les idéologies qu’elle charrie – la promotion de la raison, du savoir, du progrès – il apparaît que les nouvelles de Kipling et de Maugham opèrent selon des modalités différentes. Celles de Kipling interrogent poétiquement le politique et la modernité tels qu’ils apparaissent dans leur spécificité coloniale par le biais d’une écriture qui opère depuis les marges, ce par un double décalage par rapport au roman domestique. Le fait même de prendre pour objet la société coloniale, elle-même située sur les marges de la société métropolitaine anglaise, s’inscrit en effet dans une écriture du décentrement. Les nouvelles de Maugham s’énoncent elles aussi depuis certainesmarges mais s’inscrivent davantage dans un constat général du déclin de la civilisation européenne durant l’entre-deux-guerres et dans une réflexion sur la situation de l’écrivain face à divers centres, sources d’autorité et de savoir. Le trouble que produit la nouvelle est donc certes lié au statut de « voix solitaire » de cette dernière mais surtout à sa position de marginalité / Kipling’s and Maugham’s short stories respectively stage Anglo-Indian society during the Raj and English and Dutch colonial societies in interwar South-East Asia. In spite of contextual differences and the two specific moments when the authors wrote their short stories, the latter invariably deal with a problematic colonisation seen as a crisis while the genre of the short story formally conveys the notion of crisis. By using the relation between modernity and colonisation as it was conceptualised by the Postcolonial studies as a paradigm, this dissertation shows how short stories can operate a specific take on this relation and be considered as a site of disturbance. In this reflection on the propensity of short stories to destabilise political and philosophical modernity and the various ideologies it is associated with – such as the promotion of reason, of knowledge, of progress – Kipling’s and Maugham’s colonial short fictions seem to operate in different ways. Kipling’s short stories poetically question the “political” and modernity as they appear in the colonial paradigm through awriting that operates from a marginal position moving away from the domestic novel. By focusing on colonial society, itself being located on the margins of English metropolitan society, the writers’ works practise a decentering form of writing. Maugham’s short stories partake more of a general feeling about the decline of European civilisation in the interwar period but also reflect on the location of the writer who faces various centres which produce knowledge and cultural authority. The destabilising effect of the short story is certainly linked to its position as a “lonely voice” but above all to its marginal position
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2013REN20026 |
Date | 28 June 2013 |
Creators | Chemmachery Michaux, Jaine |
Contributors | Rennes 2, Baneth-Nouailhetas, Emilienne L., Joubert, Claire |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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