La théorie de la valeur-travail élaborée par l'économiste anglais David Ricardo (1772-1823) a rapidement été mise à profit par les théoriciens socialistes afin de démontrer l'iniquité du salariat et pour donner une base à un système socialiste de production et d'échange ; Karl Marx (1818-1883) l'a subséquemment développée à titre d'explication de l'ensemble du processus de la production capitaliste, il en a fait le principe de la lutte des classes. Rédigée dans une perspective contextualiste, cette thèse vise donc à démontrer minutieusement, par la théorie et par l'histoire à la fois, que Marx emploie intentionnellement la théorie économique ricardienne dans le Capital afin de convaincre son premier public, principalement composé des membres de l'école historique d'économie politique allemande (« Historische Schule der Nationalökonomie »), de l'antagonisme nécessaire des intérêts de classes. Mais cette thèse vise également à démontrer l'insuffisance fondamentale de l'interprétation hégélienne du Capital. Cette interprétation présente non seulement des difficultés exégétiques rédhibitoires, mais elle nuit malheureusement à la bonne compréhension des textes de Marx et de Hegel. Marx pense la lutte des classes en termes ricardiens et non pas en termes hégéliens. Et contrairement à ce l'on a d'abord proclamé au début du XXe siècle, la compréhension du Capital n'exige pas la compréhension de la philosophie de Hegel. En renouant dans cette thèse avec l'interprétation ricardienne du Capital, nous renouons avec la seule interprétation que Marx a lui-même publiquement et officiellement entérinée de son ouvrage — un fait historique avéré que la majorité des interprètes du Capital persiste encore aujourd'hui à ignorer. En soi, l'interprétation ricardienne du Capital n'est donc ni originale ni nouvelle. Elle ne possède pas non plus de panache philosophique. En revanche, elle a été corroborée par Marx, ce qui constitue un moyen sûr de réfuter ou d'écarter définitivement certaines interprétations que l'on a parfois données du Capital au cours du XXe siècle, a fortiori son interprétation hégélienne, et de contribuer par là à l'avancement des études marxiennes. En plus de rappeler, de revaloriser et de revendiquer l'héritage ricardien de Marx à l'aide d'un luxe inédit de précisions théoriques et historiques, cette thèse propose enfin de réinsérer la pensée économique et politique de Hegel dans la tradition caméraliste allemande (« Kameralwissenschaften »), une tradition intellectuelle à laquelle les interprètes hégéliens du Capital ont arraché Hegel afin de téléologiquement faire de lui le précurseur de Marx.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/27601 |
Date | 24 April 2018 |
Creators | Lainé, Mathieu-Joffre |
Contributors | Langlois, Luc |
Source Sets | Université Laval |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | thèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat |
Format | 1 ressource en ligne (vi, 331 pages), application/pdf |
Rights | http://purl.org/coar/access_right/c_abf2 |
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