Return to search

Le théâtre de Juan Mayorga: de la scène au monde à travers le prisme du langage

Juan Mayorga signe le retour en force du verbe dans la dramaturgie espagnole contemporaine. Cette thèse pense son œuvre comme une « carte du monde » qui reflète et interroge certaines facettes de la réalité à travers le prisme du langage. L’étude des scènes de langage et du langage de la scène fait appel aux théories de pragmatique du discours. Ensuite, les analyses de la théâtralité de la parole (la manière dont les mots prennent corps et sens sur scène et dans le monde) montrent que chez ce dramaturge, la puissance imageante de la parole est étroitement liée à la « faille » du discours. La « faille », qui occupe une place centrale dans l’œuvre de Juan Mayorga, souligne et relaye les limites du langage, ouvrant sur une scène dialectique, d’où on peut (le) penser autrement.
Entre les mots, dans les « failles » du discours logique, surgit l’ineffable, c’est-à-dire le Réel au sens lacanien. La question de l’aporie du voir et du dire révèle la part décisive de l’absence et du manque dans la représentation : celle-ci relève d’un engagement dramaturgique et esthétique, mais aussi éthique. Choisir de faire de la scène une cartographie des « failles » du discours, des silences de l’histoire, et des absences du monde, c’est le fruit d’un parti pris. À travers le prisme d’un verbe dont nous relevons le caractère fragmentaire, c’est une manière de penser et d’interroger le monde qui apparaît.
Ce travail puise dans les courants philosophiques qui (sous-)tendent l’écriture de Juan Mayorga : les thèses de Walter Benjamin sur l’histoire, les écrits de Ludwig Wittgenstein, Theodor Adorno, Giorgio Agamben et Jean-Luc Nancy, portant sur la dicibilité ou la représentablité de l’indicible, mais aussi l’ontologie contemporaine, en particulier la pensée de Jacques Derrida et de Sören Kierkegaard, qui détournent la logique dichotomique propre à la dialectique hégélienne.
Le langage lui-même est créateur de relations dialectiques indépassables que le dramaturge met en scène à partir de tensions qui peuvent se multiplier à l’infini dans une esthétique du discontinu (dire/taire, montrer/cacher, montrer/dire, etc.). Cette thèse les met en lumière et en interroge les enjeux. À cet effet, la notion de « rhizome » de Gilles Deleuze et Félix Guattari, ainsi que celle de « scène invisible » (issue de la « critique des dispositifs »), fournissent des éléments théoriques de réflexion qui débouchent sur un même constat : le sens réside dans l’interruption.
La thèse est un cheminement à travers l’œuvre de Juan Mayorga, dont il s’agit de découvrir entrées et sorties, s’engouffrant dans ses « failles », pour enfin s’arrêter sur des bifurcations, ramifications, ou nœuds – car en eux se cristallise la « scène ». Au fil de son expérience théâtrale rhizhomatique et souterraine, le spectalecteur mayorguien est invité à être entre, à devenir animal (Deleuze et Guattari), et à interroger l’envers du décor. / In his plays, Juan Mayorga forcefully brings back the word in contemporary Spanish drama. This dissertation examines his works as a “world map” which mirrors and questions numerous aspects of reality through the prism of language. The study of language at play in the scenes and the dramatic language of the play appeals to the theories of pragmatic discourse. Analyses of the theatrical characteristics of the spoken word - the way words take shape and become meaningful on stage and in reality – show that, for this playwright, the image power of the spoken word is intrinsically connected to the language of the “fault”. The “fault” – which rests at the very core of Juan Mayorga’s works – underlines and prolongs the limits of language, unlocking a dialectical stage where it can be apprehended differently.
Between the words, in the “faults” gical speech, the unuterrable arises, i.e. the Real in the Lacanian sense. The aporetic issue of seeing and telling unveils the decisive part of absence and want in the representation, which emanates from a theatrical, esthetic, but also ethical commitment. Choosing to study the stage as a map of the “faults” of discourse, the silence of history, and the absences of the world is a deliberate choice: analyzing the fragmentary characteristics of language is a way of thinking and questioning the world.
This dissertation delves into the philosophical works which underlie Juan Mayorga's works: Walter Benjamin's thesis on history, the works of Ludwig Wittgenstein, Theodor Adorno, Giorgio Agamben, and Jean-Luc Nancy's works on the ability to utter and represent, as well as contemporaneous ontology - especially Jacques Derrida and Sören Kierkegaard´s theories, which divert the dichotomous logic that characterizes the Hegelian dialectics.
Language itself weaves impassable dialectical relations which the playwright stages through tensions that can be multiplied indefinitely within aesthetics of discontinuity (keeping silent/telling; showing/hiding; showing/ telling, etc.). This dissertation draws attention to these tensions and questions their stakes. To that end, Gilles Deleuze and Felix Guattari's notions of “rhizome” and “the invisible scene” provide us with theoretical elements leading up to the same conclusion: meaning appears in interruptions.
This dissertation is progressing through Juan Mayorga's plays to unveil its exits and entrances as they materialize the faults of language, so as to examine the junctions, ramifications, or entanglements where the stage crystallizes. In their rhizomatic and underground theatrical experience, Mayorga’s “specta-readers” are urged to be in-between, to become animal (Deleuze and GuattarI) and to question what is behind the scene.

Identiferoai:union.ndltd.org:TDX_UAB/oai:www.tdx.cat:10803/120196
Date09 July 2013
CreatorsSpooner, Claire
ContributorsMartínez Thomas, Monique, Sáez Tajafuerce, Begonya, Universitat Autònoma de Barcelona. Departament de Filosofia
PublisherUniversitat Autònoma de Barcelona
Source SetsUniversitat Autònoma de Barcelona
Languagefra
Detected LanguageFrench
Typeinfo:eu-repo/semantics/doctoralThesis, info:eu-repo/semantics/publishedVersion
Format540 p., application/pdf
SourceTDX (Tesis Doctorals en Xarxa)
RightsADVERTIMENT. L'accés als continguts d'aquesta tesi doctoral i la seva utilització ha de respectar els drets de la persona autora. Pot ser utilitzada per a consulta o estudi personal, així com en activitats o materials d'investigació i docència en els termes establerts a l'art. 32 del Text Refós de la Llei de Propietat Intel·lectual (RDL 1/1996). Per altres utilitzacions es requereix l'autorització prèvia i expressa de la persona autora. En qualsevol cas, en la utilització dels seus continguts caldrà indicar de forma clara el nom i cognoms de la persona autora i el títol de la tesi doctoral. No s'autoritza la seva reproducció o altres formes d'explotació efectuades amb finalitats de lucre ni la seva comunicació pública des d'un lloc aliè al servei TDX. Tampoc s'autoritza la presentació del seu contingut en una finestra o marc aliè a TDX (framing). Aquesta reserva de drets afecta tant als continguts de la tesi com als seus resums i índexs., info:eu-repo/semantics/openAccess

Page generated in 0.0029 seconds