Cette thèse veut contribuer à la compréhension de « l’énigme de la persistance des peines minimales » dans le cadre spécifique de décisions politiques portant sur la sanction d’amende. Nous avons choisi un type atypique d’amende, la suramende compensatoire, puisque ce dispositif vise à amasser des fonds pour des programmes d’aide aux victimes en matière criminelle. C’est ainsi que nous avons choisi d’examiner les débats parlementaires tenus au sein du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes du Canada qui ont porté sur le projet de loi C-37 en 2012. Ce projet a modifié pour la deuxième fois la sanction de suramende compensatoire (« Victim Fine Surcharge ») qui a été introduite dans le Code criminel canadien en 1989. En adoptant une distinction proposée par Machado et Pires (2010), nous avons cherché à déterminer quels étaient les «faits justificatifs» et les «fondements» de cette réforme qui ont transformé la sanction pécuniaire préexistante en «peine minimale d’amende» ayant limité le pouvoir discrétionnaire des tribunaux dans le but d’améliorer les services offerts aux victimes de crimes.
À travers une analyse des débats parlementaires tenus au sein de ce comité, nous avons observé comment le système d’idées nommé « rationalité pénale moderne» (RPM) a été mobilisé dans le cadre spécifique de cette réforme. Nous croyons que cette recherche a pu démontrer la manière particulière par laquelle le système d’idées de la RPM a offert un appui cognitif à la création de cette peine minimale d’amende atypique. Ceci nous a permis d’ajouter un élément nouveau à la compréhension de la persistance de cette pratique de « peines minimales » malgré la valorisation contemporaine des droits de la personne et malgré l’opposition de certains grands principes pénologiques aux peines minimales de prison et d’amende. En effet, ces principes soutiennent que les peines minimales (sans pouvoir discrétionnaire des tribunaux) empêchent une individualisation adéquate de la peine, nuisent au principe de la proportionnalité entre le crime et la peine et peuvent faire obstacle aussi à une protection adéquate des droits de la personne.
Notre analyse permet aussi de comprendre que si les droits de la personne jouent parfois un rôle de frein aux excès punitifs des systèmes politiques et de droit criminel, ils peuvent aussi prendre un rôle de catalyseur pour la rationalité punitive qui encadre le processus de détermination de la peine. Nous avons pu saisir empiriquement, par rapport à l’enjeu des peines minimales, l’usage paradoxal pouvant être fait des droits de la personne par le système de droit criminel, thème développé dans les recherches de Garcia (2010, 2011, 2014, 2015a, 2015b). En nous basant sur ses travaux, nous avons été en mesure de mieux comprendre pour quelles raisons les droits de la personne n’ont pas eu la force de constituer un obstacle cognitif suffisant pour apporter une critique substantive à ce projet de loi.
Identifer | oai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/34238 |
Date | January 2016 |
Creators | Stéphanie, Duquette |
Contributors | Margarida, Garcia, Alvaro, Pires |
Publisher | Université d'Ottawa / University of Ottawa |
Source Sets | Université d’Ottawa |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thesis |
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