La fin du Moyen Âge est le théâtre de l'apparition et de la diffusion d'images singulières : celles d'hommes et de femmes intégralement couverts de poils. Attribut de l'homme sauvage, mais également de personnages ensauvagés et notamment d'ermites et de saints, le corps velu fait figure de véritable motif iconographique aux deux derniers siècles du Moyen Âge. Cette thèse, s'appuyant sur la méthode de l'analyse sérielle et s'inscrivant dans les problématiques de l'anthropologie historique, propose l'étude du motif à travers un corpus de 940 images. Il s'agit de comprendre à travers une collection représentative de sources (tendant à l'exhaustivité), comment le corps velu, à priori laid et bestial, est associé à la fin de la période à un ensemble de personnages tout à fait positifs, voire admirables. Une première partie, organisée autour du rapport entre texte et image, cherche à définir clairement les rapports entre l'iconographie du motif et les représentations littéraires et carnavalesques de l'homme sauvage. La question des emprunts mutuels entre la culture courtoise et la culture dite " folklorique " sous-tend ce premier temps de l'analyse. Y sont également abordées les pratiques médiévales de la pilosité et la place occupée par le poil et la nudité dans l'art de cette période. Dans une seconde partie sont étudiés les éléments constitutifs de " l'être sauvage ". La relation entre le corps velu, le bestial et le démoniaque est abordée à travers l'iconographie d'Ésaü, de Merlin et d'Ursus, le roi mythique des Belges. La réflexion sur le rapport entre l'homme, la bête et l'espace sauvage est ensuite déplacée dans le champ des représentations de l'Orient, et dans celui de l'érotique courtoise faisant du sauvage une antithèse du chevalier. En dernier lieu, la troisième partie s'intéresse à la conception dynamique de la sauvagerie à travers le concept " d'ensauvagement ". L'analyse de la villosité comme conséquence du recours à la forêt permet de comparer l'iconographie de l'homme sauvage et celle des ermites et des pénitentes velus. L'excès de poil, davantage qu'un attribut bestial et dégradant, y apparaît alors très largement comme une manifestation du merveilleux ou du miraculeux. Parce qu'il n'altère pas le corps humain, il fait tour à tour figure de défaut d'humanité (laideur, animalité) ou de surplus héroïque (force, détachement du corps ou résistance à la souffrance). En conclusion, ce travail met en valeur le rôle de l'aristocratie dans la promotion de la figure de l'homme sauvage, qui constitue un moyen pour cette dernière d'affirmer son contrôle symbolique sur l'espace forestier. Le succès du personnage, également porté par le renouveau de l'érémitisme, entretien un rapport étroit avec celui d'autres figures comme les ermites velus, emblématiques du recours à la forêt et du renoncement au monde. Ces derniers trouvent une traduction iconographique particulière à travers les images de Marie-Madeleine, dont la diffusion dans l'espace germanique s'explique en partie par l'influence de la mystique rhénane.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-01056524 |
Date | 21 November 2011 |
Creators | Pouvreau, Florent |
Publisher | Université de Grenoble |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | fra |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
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