Loin de se cantonner à la notion triviale de simple séparation Église/État, la laïcité classique, selon Marcel Gauchet, est plutôt le mouvement propre de l'autonomie participative du corps politique. Ce mouvement, se dédoublant en État et société, autorise tant l'autonomie de l'État, face à toute idéologie (laïcité), que celle des individus de la société civile (libertés politiques et civiques.). Or, un avatar de cette laïcité, la laïcité sociale, tentant de repenser l'autonomie politique, selon un rapport de proportionnalité, entre l'État et les individus, exige, sur le modèle de la négociation marchande, comme l'illustre, avec beaucoup d'à-propos la réflexion éthique de David Gauthier, que l'autonomie de tout un chacun émane non plus de la généralité de la participation politique mais, plutôt, de la reconnaissance juridique de chaque singularité. La question s'est alors posée de savoir, si le modèle prévalent de la laïcité devrait désormais se penser comme forme politique ou réalité sociale. Autrement dit, la laïcité classique, structure politique de la cité, doit-elle céder le pas à cette matière sociale, en constante renégociation, selon la transposition des principes de la société de marché, qu'est la laïcité sociale? On a bien tenté de concilier ces deux formes de laïcité, sous le concept de citoyenneté différenciée, comme s'y est ingénié Will Kymlicka, mais l'autonomie, étant un concept exclusif, les deux formes de laïcité, politique et sociale, parce que régies par deux ordres différents de rapports à l'autonomie, relation participative, pour la laïcité classique, analogie de proportionnalité, pour la laïcité sociale, s'avèrent incompatibles. De plus, nous rappelant que toute société est immédiatement politique, Julien Freund nous apparaît faire cause commune avec Gauchet et répudier toute admission de quelque version sociale de la laïcité. Car, la laïcité, étant forme politique d'une matière sociale, qu'elle unifie et clôture, ne peut tolérer, sans se nier, le fractionnement ou la démultiplication de cette matière, comme la reconnaissance juridique des singularités individuelles nous y conduit, ainsi qu'y aspire la laïcité sociale, sans compromettre la stabilité et l'existence même du corps politique. Ainsi, le plaidoyer de Gauchet pour la laïcité classique, forme politique de la cité, est-il conforté dans ses droits. La laïcité est, donc, l'expression unique du dédoublement autonome du corps politique, en État et en société. En outre, l'autonomie politique, consacrée par ce dédoublement, s'offre à elle-même son propre a-venir, en tant qu'auto-nome ou pro-jet. De sorte que, loin de se pétrifier en forme politique abstraite, la laïcité classique est bien plutôt le gage dynamique de la survie et de la stabilité de toute cité démocratique. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Gauchet, Laïcité, Freund, Multiculturalisme, Kymlicka.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.2412 |
Date | January 2009 |
Creators | Rioux, Alain |
Source Sets | Library and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada |
Detected Language | French |
Type | Mémoire accepté, NonPeerReviewed |
Format | application/pdf |
Relation | http://www.archipel.uqam.ca/2412/ |
Page generated in 0.0017 seconds