Cette thèse porte sur l’émergence sur la scène chilienne d’un nouvel acteur dans la production du livre, acteur qui s’organise à la fin des années 1990 en se définissant lui-même en tant qu’éditeur indépendant et qui, au cours des premières années du XXIe siècle, élargit cette définition pour inclure le phénomène de l’édition autonome et le domaine de l’édition universitaire. Le point de ralliement de ces acteurs, organisés autour de l’association Editores de Chile, est la reprise et l’affirmation d’un rôle moderne des éditeurs de livres, au sens
des Lumières. On peut constater l’articulation entre les revendications
spécifiques du secteur et ses positions politiques sur la valeur symbolique de la production culturelle, sur son rôle en tant que facteur de construction identitaire et démocratique car l’accès aux livres ne peut
pas être restreint par l’action sans contrepoids du marché.
L’angle théorique que nous proposons est celui des théories des industries culturelles tout en intégrant aussi les contributions des études culturelles. En nous situant dans une perspective de l’économie politique des industries culturelles, nous chercherons à redéfinir le concept d’indépendance par le biais d’une analyse des stratégies d’unités économiques (les maisons d’édition) et des rapports entre ces unités et leurs contextes géographiques, politiques et culturels
spécifiques. Nous tenons aussi en considération des éléments macrostructurels,
mais en considérant que leur capacité d’influence est
toujours relative et, en conséquence, doit faire l’objet d’une réévaluation en fonction des rapports de forces et des conjonctures politiques,
économiques et sociales spécifiques. Nous pensons que
l’indépendance n’est pas un phénomène qui n’est pas exclusif au
monde de l’édition. Nous avons fait le constat qu’il existe aussi au sein
des industries de l’enregistrement sonore, de l’audiovisuel et des
médias comme la presse, la radio et, en moindre proportion, la
télévision.
En termes méthodologiques, nous proposons une approche qui
combine des méthodes et des instruments quantitatifs et qualitatifs,
c’est-à-dire, l’analyse des statistiques de l’édition au Chili (fréquences
des titres, genres et auteurs), des entrevues semi-structurées et une
analyse documentaire.
Avant d’aborder la description et l’analyse de la production de
livres au Chili et du sens que les éditeurs donnent à l’indépendance et à
leurs prises de position dans le champ culturel, nous proposons une
description historique et industrielle de l’édition du livre chilien. Cette
description permet de comprendre la naissance et le développement du
secteur en regard des processus politiques, économiques et sociaux du
Chili et de l’Amérique latine, ainsi que sa situation actuelle en regard
des nouvelles conditions politiques et économiques qui résultent du
processus de globalisation et des transformations néolibérales locales
et internationales.
La recherche examine ensuite le caractère de la production de
livres publiés au Chili entre les années 2000 et 2005 en considérant les
titres produits, les auteurs et les genres. Cette analyse permet aussi d’établir des différences entre ces maisons d’édition et celles qui
relèvent des grands conglomérats transnationaux de l’édition de livres.
Cette analyse comparative nous permet d’établir de manière concluante
des différences quant au nombre et á la diversité et l’intérêt culturel des
livres publiés entre les éditeurs transnationaux et les éditeurs
indépendants regroupés sous le nom de Editores de Chile. Cette
analyse permet aussi d’établir des liens précis entre la production des
éditeurs indépendants et leurs objectifs culturels et politiques explicites.
Nous faisons ensuite état, par le biais de l’exposition et de
l’analyse des entrevues réalisées avec les éditeurs, des trajectoires de
ces organisations en tenant compte des périodes historiques
spécifiques qui ont servi de contexte à leur création et à leur
développement. Nous mettons ici en rapport ces trajectoires des
éditeurs, les définitions de leurs missions et les stratégies mobilisées.
Nous tenons aussi compte des dimensions internationales de ces
définitions qui s’expriment dans leur participation au sein d’organisations
internationales telle que l’Alliance internationale d’éditeurs indépendants
(Gijón 2000 et Dakar 2003) et, spécifiquement, leur expression dans la
coopération avec des maisons d’édition latino-américaines.
Les entrevues et l’analyse documentaire nous permettent
d‘entrevoir les tensions entre la politique culturelle de l’État chilien, en
contraste avec des définitions, des objectifs et des actions politiques de
Editores de Chile.
Nous relions donc dans l’analyse, l’émergence de l’édition indépendante et les résistances qu’engendrent la globalisation des marchés culturels et les mouvements de concentration de la propriété, ainsi que les effets et réponses aux transformations néolibérales au plan des politiques culturelles publiques. Nous concluons alors à la nécessité d’une économie politique critique des industries culturelles qui puisse se pencher sur ces phénomènes et rendre compte non seulement de rapports entre conglomérats et indépendants et du développement des filières de la production culturelle, mais aussi du déploiement des logiques culturelles et politiques sous-jacentes, voire des projets historiques, qui se confrontent dans le champ des industries culturelles. / This thesis discusses the emergence of a new actor in the production of books in Chile. This actor arises in the late nineties as a group of independent publishers, and in the first few years of this decade, expands to include university publishing. The point of
coincidence and action of these actors, organized in the association Editors of Chile, is the recuperation and assertion of a modern role for the figure of editor, in the sense of the Age of Enlightenment. We can
confirm the articulation between the specific demands of publishers and the political position adopted on the symbolic value of cultural production and its role as an element of identity- and democracy-building, under the assumption that access to books should not be restricted to the rules of
the market.
The theoretical focus we suggest is that of the theory of cultural industries, including contributions from cultural studies. From the
perspective of the political economy of cultural industries, we seek to redefine the concept of independence through an analysis of the strategies used by economic units (publishers) and the relationship between these units and their geographical, political and cultural context. We also take into account the macro-structural factors, but with the understanding that their influence is always relative and, in consequence, should be subject to re-evaluation in terms of the relationships of power and specific political, economic and social scenarios. We believe this is a phenomenon that is not exclusive to the field of books. We have corroborated that this also takes place in the field of music, audio-visual productions and the media, such as radio, and to a lesser extent, television.
In terms of methodology, we suggest a mixed focus, one that combines quantitative and qualitative methods and instruments. These are the statistical analysis of the production of Chilean publishers (frequency of titles, genres and authors), semi-structured interviews and
documents analysis.
Before discussing the description and analysis of the production of books in Chile and the significance publishers give to independence along with their positions in the field of culture, we set forth a historical and industrial description of Chilean books. This description allows us to comprehend its creation and development in the political, economic and social context in Chile and Latin America, within the new conditions arising from the globalization process and local and international neoliberal transformations.
This investigation then examines the nature of publishing in Chile from 2000-2005, taking into account titles, authors and genres. This analysis allows us to establish differences between organized independent publishers and the big transnational publishing houses.
These differences are evident in terms of the number, diversity and cultural interest of the publications. In addition, this analysis allows us to establish specific ties between the production of Editors of Chile and the
cultural and political objectives of their discourse.
scenarios. We believe this is a phenomenon that is not exclusive to the
field of books. We have corroborated that this also takes place in the
field of music, audio-visual productions and the media, such as radio,
and to a lesser extent, television.
In terms of methodology, we suggest a mixed focus, one that
combines quantitative and qualitative methods and instruments. These
are the statistical analysis of the production of Chilean publishers
(frequency of titles, genres and authors), semi-structured interviews and
documents analysis.
Before discussing the description and analysis of the production
of books in Chile and the significance publishers give to independence
along with their positions in the field of culture, we set forth a historical
and industrial description of Chilean books. This description allows us to comprehend its creation and development in the political, economic and social context in Chile and Latin America, within the new conditions arising from the globalization process and local and international neoliberal transformations.
This investigation then examines the nature of publishing in Chile from 2000-2005, taking into account titles, authors and genres. This analysis allows us to establish differences between organized independent publishers and the big transnational publishing houses.
These differences are evident in terms of the number, diversity and cultural interest of the publications. In addition, this analysis allows us to establish specific ties between the production of Editors of Chile and the cultural and political objectives of their discourse. / La presente tesis aborda la emergencia en el escenario chileno de un nuevo actor en la producción del libro. Este actor se organiza a fines de los años 1990, definiéndose como independiente y, en el curso de los primeros años del siglo XXI, amplía esta definición para incluir los campos de la edición autónoma y universitaria. El punto de encuentro y de acción de estos actores, organizados en la asociación Editores de Chile, es la recuperación y afirmación de un rol moderno de la figura del editor, en el sentido de la ilustración. Podemos constatar la articulación entre las reivindicaciones específicas del sector y la toma de posiciones políticas acerca del valor simbólico de la producción cultural, sobre su rol como factor de construcción identitaria y democrática, bajo el supuesto que el acceso al libro no puede constreñirse por la acción sin contrapeso del mercado.
El enfoque teórico propuesto es el de la teoría de las industrias culturales, integrando desde allí contribuciones de los estudios culturales. Al situarnos en una perspectiva de la economía política de las industrias culturales, buscamos redefinir el concepto de la independencia por medio de un análisis de las estrategias desplegadas por unidades económicas (las editoriales) y las relaciones entre estas unidades y su contexto geográfico, político y cultural. Tomamos también en consideración elementos macro estructurales, pero considerando siempre que su capacidad de influencia es siempre relativa y, en consecuencia, debe ser objeto de una reevaluación en función de las relaciones de fuerzas y las coyunturas políticas, económicas y sociales específicas. Pensamos que se trata de un fenómeno que no es exclusivo del campo de libro. Hemos constatado que este fenómeno se manifiesta también en el campo de los sectores de la música, del audiovisual y de los medios, como la prensa, la radio y, en menor proporción, la televisión.
En términos metodológicos, proponemos un enfoque mixto, es decir que combina métodos e instrumentos cuantitativos y cualitativos. Estos son el análisis estadístico de la producción editorial chilena (frecuencias de títulos, géneros y autores), entrevistas semiestructuradas y un análisis documental.
Antes de abordar la descripción y el análisis de la producción de libros en Chile y el sentido que los editores le dan a la independencia junto con sus tomas de posición en el campo cultural, proponemos una descripción histórica e industrial del libro chileno. Esta descripción permite comprender el nacimiento y desarrollo del sector en el contexto de procesos políticos, económicos y sociales en Chile y América Latina y situarlo en relación a las nuevas condiciones que resultan del proceso de globalización y de las transformaciones neoliberales locales e internacionales.
La investigación examina luego el carácter de la producción de libros en Chile entre los años 2000 et 2005, considerando los títulos producidos, los autores y los géneros. Este análisis permite establecer diferencias entre los editores independientes organizados y los grandes conglomerados transnacionales. Estas diferencias son visibles en términos del número, de la diversidad y del interés cultural de las publicaciones. Asimismo, el análisis permite establecer lazos precisos entre la producción de Editores de Chile y los objetivos culturales y políticos expresados en sus discursos.
Establecemos luego, mediante la exposición y el análisis de las entrevistas realizadas con 10 editores miembros de la organización, las trayectorias de las editoriales en relación a los contextos históricos de su creación y desarrollo. Relacionamos dichas trayectorias con las definiciones de su misión y las estrategias movilizadas. Tomamos también en cuenta las dimensiones internacionales de estas definiciones, que se expresan en su participación en el seno de organizaciones internacionales como la Alianza de Editores Independientes (Gijón 2000 et Dakar 2003) y, específicamente, la expresión de esta cooperación en iniciativas conjuntas con editoriales latino-americanas y una editorial basca.
Las entrevistas y el análisis documental nos permiten observar las tensiones entre un tipo de política cultural de parte del Estado, en contraste con las definiciones, los objetivos y las acciones políticas de Editores de Chile.
En el análisis, vinculamos la emergencia de la edición independiente y las resistencias que la globalización de los mercados culturales y los movimientos de concentración de la propiedad engendran, así como los efectos y las respuestas a las transformaciones neoliberales en el plano de las políticas culturales públicas. Concluimos con la necesidad de una economía política crítica de las industrias culturales capaz de observar estos fenómenos y dar cuenta no solamente de las relaciones entre grandes conglomerados y editores independientes en el desarrollo de las cadenas de la producción cultural, sino también del despliegue de lógicas culturales y políticas que subyacen bajo estas relaciones, incluso proyectos históricos que se confrontan en el campo de las industrias culturales.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMU.1866/3759 |
Date | 03 1900 |
Creators | Dominguez, Maria E. |
Contributors | Martin, Claude |
Source Sets | Library and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation |
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