Revendiqué par des auteurs aussi divers que Paul Ricoeur, Alasdair MacIntyre ou Charles Taylor, le modèle narratif de l’identité – qui affirme que c’est l’histoire que nous racontons qui définit qui nous sommes – a fait l’objet de nombreuses critiques dans la littérature académique des dernières décennies. À suivre certaines d’entre elles, l’identité narrative serait une notion intrinsèquement conservatrice, et le récit serait le langage conflictuel par excellence. Ce soupçon jeté sur la narration doit être pris au sérieux compte tenu de la nature toute spécifique des inégalités qui se dessinent en Israël entre les Israéliens juifs et les Israéliens palestiniens, et dont nous montrerons qu’elles doivent être interprétées comme des « inégalités narratives ». Faut-il en conclure qu’il faille tourner le dos au langage des récits ? C’est une autre voie que nous chercherons à emprunter, en tentant de montrer le potentiel normatif et émancipateur de la narration. En nous appuyant sur le travail de Paul Ricoeur, notre hypothèse est qu’il devrait être possible d’accepter certaines prémisses narratives, sans que cela ne débouche sur les implications conservatrices du communautarianisme. Dans la dernière étape de ce travail, je tente d’utiliser les ressources conceptuelles de la narrativité dans le cadre d’une discussion plus vaste sur la justice ethnoculturelle, afin d’ouvrir la voie à un modèle théorique et pratique de réduction des inégalités narratives en Israël, que j’appelle « multinarrativisme ». En définitive, l’ultime finalité de cette recherche consiste à montrer que le modèle narratif de l’identité n’est pas seulement compatible avec l’exigence libérale du respect du pluralisme, mais qu’il permet aussi d’offrir un soutien théorique important aux politiques qui visent à promouvoir une plus forte inclusion démocratique des minorités culturelles. / Claimed by several authors such as Ricoeur, MacIntyre or Taylor, the narrative model of identity —which argues the narratives we tell define who we are— has been the target of much criticism in the academic literature over the last few decades. According to some of these critics, the concept of narrative identity is inherently conservative and a prime example of conflictual language. This discredit brought on narratives must be taken seriously in view of the specific nature of the inequalities that are evolving in Israel between Jewish Israelis and Palestinian Israelis and which we will propose to interpret as narrative inequalities. Does this mean that we have to get out of the narrative language? This is an alternative path that we will attempt to follow, by seeking to demonstrate that we can make an emancipatory use of narrative. By drawing on the work of Paul Ricoeur, our hypothesis is that it should be possible to accept some narrative premises without this leading to the conservative consequences of communitarianism. In the final stage of this work, I attempt to use the conceptual resources of narrativity as part of a broader discussion about ethnocultural justice in order to pave the way to a theoriticalpractical model for reducing narrative inequalities in Israel, which I call ‘multinarrativism’. Ultimately, the main purpose of this research is to show that the narrative model of identity is not merely compatible with the democratic requirement of respect for pluralism, but also provides important theoretical support for policies that aim to promote greater democratic inclusion of cultural minorities.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2019SORUL076 |
Date | 27 September 2019 |
Creators | Tommasi, Juliette |
Contributors | Sorbonne université, L'Heuillet, Hélène |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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