Tennessee Williams utilise pour la première fois l’expression « théâtre plastique » en 1944, dans un essai où il évoque les limites du langage verbal. Ce qu’il recherche, c’est un langage « des sons, des couleurs et des mouvements », un au-delà des mots censé redonner vie à un théâtre réaliste jugé moribond. Il se fixe ainsi pour objectif de retranscrire sur la page la totalité de l’expérience théâtrale. Créateur d’images, le dramaturge se compare fréquemment à un peintre et puise dans l’art pictural les éléments de son nouveau langage. Gauguin, Van Gogh, De Chirico, Hofmann ou encore Pollock font partie de la longue liste d’artistes qui lui ont permis d’échapper à la pétrification dans un mimétisme réaliste associé à l’image photographique. Cités dans ses essais ou dans ses pièces, ils orientent son théâtre vers l’abstraction à laquelle le dramaturge aspire. Or, l’influence des images sur le « théâtre plastique » ne se limite pas seulement à la peinture, la fascination de Williams pour le cinéma a également contribué à façonner son écriture, élargissant encore davantage l’alphabet de son langage théâtral. L’image apparaît en ce sens comme un agent libérateur du langage, un au-delà des mots dans lequel se profile un « je » en marge de la représentation comme système culturellement prédéterminé et prédéterminant. L’écriture de Williams désire l’image. De là vient sa puissance subversive. Le processus créateur tout entier se fonde sur l’entrelacement des logiques sémiotiques propres au langage et à l’image, faisant de l’un l’envers de l’autre, sa moitié indispensable. Le rapport de complémentarité qui unit l’image au langage dans toute l’œuvre de Williams met à jour l’originalité d’une écriture animée par un désir d’image, écriture vivante du théâtre. / When Tennessee Williams coined the phrase “plastic theater” in 1944, he described it as a language of “sounds, colors and movements,” a language freed from the limitations of words. His aim was to breathe new life into what he called “the exhausted theater of realistic conventions.” His ability to put the totality of theatrical experience into words manifests itself in the scripts of his plays. Williams is a creator of pictures, a playwright in the true sense of the word who found in painting and cinema the images he needed to elaborate his new language for the stage and move away from a “photographic likeness” he rejected because it was associated with realism. Gauguin, Van Gogh, De Chirico, Hofmann or Pollock are but a few of the many painters mentioned in his plays or essays who provided him with the means to enrich his vocabulary for the stage and lead his “plastic theater” toward “something more abstract.” But cinema also influenced him, giving him the opportunity to explore new possibilities and create a space between words and images where the elusive truth could be revealed. Images thus helped liberate Williams from the literary traditions as well as from the cultural codes that had defined and confined his writing from the very beginning. The writer who felt “wrapped up in literary style like the bandages of a mummy” found in images the subversive power he needed to express his true self and breathe life into words that he had always wanted to be “more than words.” From “the language of vision” to “organic writing,” Williams’s “plastic theater” evinces a desire for images.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2014LORR0331 |
Date | 14 November 2014 |
Creators | Maruéjouls-Koch, Sophie |
Contributors | Université de Lorraine, Bak, John S. |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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