Cette thèse d’anthropologie s’inscrit dans le débat actuel sur la place de l’expérience vécue du terrain dans le texte anthropologique qui en est issu. Elle questionne en particulier la possibilité de faire entrer dans le processus d’élaboration du savoir scientifique l’interrogation éthique engendrée par les rencontres avec autrui effectuées lors du terrain. Prenant comme objet trois des dialogues menés au début des années 1990 avec 35 jeunes Québécois de 14 à 18 ans filles et garçons, l’auteure s’efforce d’analyser simultanément le « récit de soi » de ces personnes, à mi-chemin entre le récit de vie et l’autoportrait, et la relation interpersonnelle qui a présidé à cette narration, de manière à en montrer les enjeux éthiques écoute, réponse, relation dans les deux cas. L ’organisation de la thèse est la suivante : la première partie, com posée de quatre chapitres, rend compte de l’itinéraire qui a mené l’auteure d’un projet de recherche sur la pensée critique s’inscrivant dans le cadre de l’anthropologie de l’expérience chapitre premier à une recherche sur l’expérience éthique chapitre quatre. Le chapitre premier présente donc les éléments de base de l’anthropologie de l’expérience et du champ de recherche de l’identité narrative. Suivent, dans le chapitre deux, un récit du travail de terrain effectué par l’auteure, puis dans le chapitre trois, deux descriptions de l’expérience d ’être-jeune au Québec dans les années 1990 : celle de l’auteure, qui tente d’éviter d’adopter un point de vue archimédien, et celle de plusieurs des jeunes rencontrés au cours du terrain. Les rapports de pouvoir-savoir qui traversent le savoir scientifique sur les jeunes sont explorés à cette occasion. Le chapitre quatre commence par le récit de l’échec de l’auteure à analyser objectivement les entrevues recueillies. Il présente ensuite un ensemble de concepts éthiques qui ont permis à l’auteure de retravailler ces entrevues : l’éthique du visage et de la responsabilité pour autrui. Il se termine par une critique de l’effacement de la question éthique dans l’écriture archimédienne conventionnelle en anthropologie. C’est dans la seconde partie de cette thèse que l’auteure tente plus directement de construire un savoir qui fasse place à l’interrogation éthique. Le chapitre cinq, qui ouvre cette partie, précise la façon dont ont été choisies les entrevues analysées, décrit la stratégie d’analyse utilisée et énumère les principes ayant guidé l’écriture du commentaire interprétatif, parmi lesquels figure la présence de l’auteure dans son texte comme sujet et objet du savoir. Chacun des dialogues sélectionnés fait ensuite l’objet d’un chapitre. Le chapitre six a été écrit à partir d’une entrevue menée avec William, âgé de dix-sept ans. Le chapitre sept relate une rencontre avec Céline, âgée de quinze ans, et le chapitre huit le dialogue mené avec Lise, âgée de dix-sept ans. Chaque chapitre est composé de fragments d’entrevue reproduits verbatim immédiatement suivis d’une analyse détaillée. Le chapitre neuf fait un retour critique sur le travail effectué. Faisant le bilan des doutes et des difficultés rencontrés en chemin par l’auteure, il suggère que le choix du langage éthique était peut-être un leurre. Il montre également que le travail interprétatif qui a été mené à propos des dialogues trouve une limite éthique dans son monologisme conventionnel qui fait frein à la polyphonie souhaitable. Cette « expérimentation » du refus de l’indifférence à l’autre et à sa singularité dans l’écriture anthropologique apparaît néanmoins comme un passage obligé et un apprentissage nécessaire pour l’auteure; elle constitue le premier temps d’un déplacement critique qui devrait être poursuivi de manière plus radicale. Le récit de cet apprentissage a permis de poser la question de la possibilité de la responsabilité pour autrui dans l’écriture scientifique. Il contribue au projet politique de valorisation de l’expérience éthique dans le monde contemporain et s’inscrit dans une anthropologie qui réfléchit constamment à sa pertinence dans le monde qui lui est contemporain. / Québec Université Laval, Bibliothèque 2018
Identifer | oai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/28493 |
Date | 24 April 2018 |
Creators | Piron, Florence |
Contributors | Simonis, Yvan |
Source Sets | Université Laval |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | thèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat |
Format | 2 v. (x, 503 f.)., application/pdf |
Coverage | Québec (Province) |
Rights | http://purl.org/coar/access_right/c_abf2 |
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