Cette thèse propose une anthropologie historique de l'objet de culte. Elle s'appuie sur un corpus de 454 chasubles ou orfrois produits entre le XIIIe et le XVIe siècle, croisé avec les témoignages de sources écrites et iconographiques. Elle s'inspire des modèles de « vie de l'objet » et s'intéresse aux fonctions, représentations et usages du vêtement liturgique. Aux derniers siècles du Moyen Âge, le vêtement liturgique est fixé par un ensemble de normes. Sa forme n'évolue que très peu et les autorités ecclésiastiques cherchent à ancrer cet objet dans le rituel. Malgré cela, le vêtement peut changer d'usage, se transmuter en relique, accessoire pour le drame liturgique, parure mortuaire, voire intervenir dans des rites d'inversion du sacré. Il devient par ailleurs un motif à part entière, apparaissant dans des représentations figurées, indépendamment de toute référence à la messe. Une première partie détermine comment le costume liturgique se construit, tant d'un point de vue matériel qu'idéel. Les autorités ecclésiastiques cherchent à définir une apparence cléricale et à légitimer l'emploi d'ornements spécifiques à la messe. Il imposent un certain nombre de pratiques qui tendent à sacraliser le vêtement. Il n'en est pas moins vrai que le domaine de la production, de la commande à la fabrication, laisse une large place aux laïcs. La seconde partie est centrée sur les fonctions du costume liturgique dans son environnement (in situ), c'est-à-dire dans le contexte visuel du lieu de culte. Le vêtement liturgique ainsi que les images dont il est le support sont considérés comme des éléments de performativité du rite. Le costume est analysé comme une représentation de l'Église en prière. Une troisième partie considère les transferts d'usage, l'aptitude de l'objet de culte à devenir autre : un emblème - partie prenante de la construction d'une identité cléricale, d'une « propagande ecclésiastique » - ou un objet efficace. Le chapitre 9, qui vient clore cette partie, s'intéresse au désir d'avilir le vêtement, de le tourner en dérision ou de le profaner. En conclusion, ce travail montre que les ornements liturgiques acquièrent une dimension symbolique. Ils sont sacralisés et se chargent de puissance. De façon très schématique, cet ustensilia (objet utilitaire) devient un ornamentum, un élément qui distingue le clerc dans sa fonction (au moment de la messe) et par sa fonction (dans l'iconographie notamment). / This thesis outlines an historical anthropology of liturgical objects. It examines liturgical vestment through a collection of 454 chasubles or orphreys from the XIII to the XVIth century, with additional written and iconographical sources. Based on a « cultural biography of things » approach, it considers functions, representations and uses of liturgical vestment. In the last centuries of the Middle Ages, the perception and function of liturgical vestment are determined by established norms which are fixed rather than flexible, implanted in ritual by ecclesiastical authorities. Yet, this vestment might function outside mass: as a relic, an accessory in liturgical drama or sacred inversion rites, as a funeral costume. It becomes a motif imbued with its own meaning, appearing in images with no reference to mass. Part one determines how liturgical costume is constructed, in a material as well as imaginative point of view. It is gradually standardized. Ecclesiastical authorities justify the use of special clothes for mass and impose a number of practices in order to make this vestment sacred. Manufacture of these special clothes, however, involves secular laborers in no small part. Part two focuses on the functions of vestment as a part of the visual context and in relation to the body. Its role in ritual performance is explored, as well as the functions of iconographical program. The question of how liturgical costume emphasizes clerical identity is central. Finally, part three considers transfers of liturgical objects to other practices. Liturgical vestment turns into an emblem - part of construction of clerical identity, indeed of « ecclesiastical propaganda » -, or a magic object. Chapter 9 focuses on the wish to ridicule or desecrate liturgical vestment. In conclusion, this study shows that liturgical ornaments have acquired a symbolic dimension. They are regarded as sacred and powerful. Schematically, this object serving a practical purpose (ustensilia) become an ornamentum, an element distinguishing the clergy in performing his function (during mass) and through his function (in particular in iconography).
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2012GRENH008 |
Date | 25 June 2012 |
Creators | Bavoux, Nadège |
Contributors | Grenoble, Rigaux, Dominique |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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