Cette thèse propose de discuter la conception du crime comme un acte de survie face à la résurgence d’hallucinations sensorielles. Les sujets criminels témoignent du sentiment d’être dépossédés de leur corps, de ne plus contrôler leurs actes, décrivent des vécus de pénétration, d’explosion, de mutilation, de démantèlement : une menace terrifiante s’incarne par la dégénérescence de la sensorialité. L’hallucination ne parvient pas ici à se formaliser et emprunte directement la voie du corps. Le sujet a alors recours à l’acte pour externaliser ces vécus sensoriels persécuteurs, enkystés dans un morceau de corps, et pour tenter de trouver une amorce de symbolisation primaire. Au cours de la prise en charge individuelle ou groupale de ces patients, il s’agit donc d’écouter les manifestations hallucinatoires qui tendent à se loger dans leurs corps, pour qu’adviennent leurs mises en sens, au sein des enjeux transféro-contre-transférentiels. La thèse analyse ainsi l’aménagement d’un dispositif thérapeutique, créé pour permettre une appropriation subjective des terreurs qui ont contraint ces sujets à se placer comme hors de la scène du crime. Dans le cadre d’une pratique thérapeutique en centre de détention, un groupe à médiation corporelle et picturale est proposé aux patients incarcérés, afin de privilégier l’expression du langage sensori-moteur. La médiation corporelle fonctionne comme un attracteur des vécus catastrophiques sous-jacents aux hallucinations sensorielles, et leur partage sensori-affectivo-moteur permet l’apparition d’une scène psychique groupale. Par la mise en mouvement du corps du sujet en groupe, la sensori-motricité se trouve réunifiée aux autres modalités sensorielles. La médiation picturale s’offre alors comme un écran du rêve sur lequel sont projetés, puis représentés, les éprouvés corporels du sujet en groupe, et potentialise ainsi le déploiement de l’hallucinatoire onirique. / This thesis discusses the concept of crime as an act of survival in the face of a resurgence of sensory hallucinations. Criminal subjects describe a feeling of being dispossessed of their bodies, of no longer having any control over their actions, of experiencing penetration, explosion, mutilation and dismantling : a terrifying threat made real by the degeneration of the senses. In such cases, the hallucination fails to take form and uses the body directly. The subject then resorts to the act in order to externalise these tormenting sensory experiences, encysted in part of the body, and try to trigger primary symbolisation. In individual or group therapy sessions with these patients, the aim is therefore to listen to the hallucinatory manifestations embedded in the body, so that their meaning can emerge through transference and countertransference. Hence, we analyse a therapeutic solution created to enable the subjective appropriation of the terrors that led these subjects to situate themselves outside the crime scene. As part of therapeutic work in a detention centre, patients are invited to take part in a corporal and pictorial mediation group to encourage the expression of sensori-motor language. Corporal mediation acts as a magnet for catastrophic experiences underlying sensory hallucinations, and sharing them in a sensory-affective-motor manner enables the appearance of a group psychological scene. Through movement of the subject's body within the group, sensori-motricity is reunited with the other sensory forms. Pictorial mediation then acts as a dream screen onto which are projected, then represented, the subject's corporal experiences within the group, thereby rendering dreamlike hallucination possible.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2015LYO20136 |
Date | 10 December 2015 |
Creators | Garnier, Emeline |
Contributors | Lyon 2, Brun, Anne |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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