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Quelle identité pour les grandes écoles de commerce françaises ?

Lorsqu‘on aborde le sujet des Grandes Ecoles de Commerce Françaises (GECF), le ton alarmiste arrive vite : « villages gaulois » incompris à l‘étranger, elles seraient, faute de moyens, vouées à disparaître sous la pression d‘une concurrence acharnée des business schools anglo- saxonnes qui imposent le standard mondial du MBA. Comment, pourtant, ne pas s‘émerveiller de la formidable réussite que constituent les Parisiennes ? Cette thèse a pour objectif de puiser dans l‘histoire des GECF pour distinguer et étudier les éléments constitutifs de leur identité et répondre à la question suivante : comment des institutions qui ont construit leur identité sur un modèle national, celui des Grandes Ecoles Françaises (GEF), peuvent-elles faire face à la compétition devenue mondiale, sans perdre leur identité ? A l‘origine des « Parisiennes », on semble trouver les ingrédients d‘un feuilleton télévisé à succès : influence, pouvoir, argent et reconnaissance sociale sont les moteurs apparents d‘une bourgeoisie marchande devenue banquière qui se caractérise par son pragmatisme, ses liens étroits avec l‘institution consulaire et son désir de former sa progéniture à la bonne marche de la « Maison ». Ce groupe social veut aussi susciter quelques vocations pour des emplois confortables mais peu prestigieux aux yeux de la haute bourgeoisie. Cependant, pour échapper au statut d‘écoles de « fistici », les GECF se tournent peu à peu vers les écoles d‘ingénieurs dont elles s‘approprient certains attributs. Aussi, bien que prenant à l‘origine le contre pied de l‘Ecole Polytechnique (EP) et de ses écoles d‘application, dont la formation était jugée trop abstraite et inadéquate aux besoins de l‘économie, les GECF se tournent vers l‘Etat pour obtenir une reconnaissance institutionnelle, en imitant l‘EP et ses Corps d‘Etat. Les GECF ne parviennent à acquérir leur statut de Grande Ecole qu‘à partir des années soixante, lorsqu‘elles adoptent des modalités de concours qui mettent l‘accent sur les capacités analytiques des candidats à l‘image des écoles d‘ingénieurs, et se dotent d‘un corps professoral permanent, moteur de leur évolution. En 1995, le passage des « épices » à deux ans, sur le modèle de la « taupe » est une consécration pour les GECF. L‘étude de l‘histoire des GECF, du début du XIXe siècle au milieu des années 1990, révèle finalement que leur identité s‘est construite à partir d‘une tension entre deux sources nationales de légitimité et d‘inspiration : l‘économie française (Lien avec la pratique des affaires, matérialisé par la tutelle des Chambres de commerce) et l‘Etat français (Caution de reconnaissance académique et institutionnelle dont les Corps d‘Etat sont la manifestation la plus prestigieuse). Or, à partir du milieu des années 1990, le champ concurrentiel des écoles de commerce s‘est internationalisé : les sources de légitimité nationales ne suffisent plus à assurer le rayonnement des Parisiennes. Dans un contexte d‘internationalisation du paysage éducatif, les GECF, si elles veulent conserver leur compétitivité ou simplement survivre, doivent s‘affranchir d‘une gouvernance consulaire paralysante devenue obsolète. Disposant d‘une liberté de mouvement nécessaire à leur réactivité, elles pourront ainsi mieux s‘adapter aux effets de la mondialisation de l‘enseignement supérieur. En revanche, elles doivent conserver le caractère mythique des Grandes Ecoles à la française et les « rites » qui lui sont associés, en particulier celui de la sélection par les classes préparatoires. Une étude comparée des mythes fondateurs sous-jacents aux business schools et aux GECF révèle la profondeur de leur ancrage national respectif et le caractère irréconciliable de leur identité. En s‘inspirant exclusivement d‘une « mythologie » anglo-saxonne qui leur est étrangère, les GECF risqueraient de voir se déraciner leurs « tribus » de diplômés. Recherche, Pédagogie, recrutement des enseignants, développement de nouvelles ressources financières : la mondialisation s‘immisce dans le cœur de l‘activité des GECF qui hésitent entre posture du colonisé et développement audacieux. Les palais princiers résisteront-ils aux assauts de l‘Empire ?

Identiferoai:union.ndltd.org:CCSD/oai:pastel.archives-ouvertes.fr:pastel-00002949
Date12 September 2007
CreatorsDe Fournas, Patrice
PublisherEcole Polytechnique X
Source SetsCCSD theses-EN-ligne, France
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypePhD thesis

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