Tabou réputé universel, l'inceste constitue un thème littéraire protéiforme et ancien. Pour le spécialiste du romantisme Peter Thorslev, l'intérêt de la littérature pour ce motif est dû à sa puissance dramatique, car il met en scène le désir d’un individu contre la société. Cette conception, juste pour décrire la tradition romantique passée, ne rend pas compte de la complexité des fictions romanesques abordant l’inceste à partir du XXe siècle. La « multiplication des discours sur le sexe dans le champ d’exercice du pouvoir lui-même » que décrit Foucault et le développement des politiques racistes et eugénistes font que l’inceste s'intrique en effet à un autre concept polémique : la « race ». L'écriture romanesque de ce thème ne concerne plus un individu en butte contre la société mais des groupes cherchant à se définir, et le plus souvent racialement. La confrontation aux incestueux décrit une limite symbolique incertaine non pas tant entre civilisation et barbarie qu'entre bon citoyen et non-citoyen. Aux États-Unis et en Afrique du Sud où les fictions politiques de la nation érigée en famille idéale ont servi à justifier l'exclusion de la population non-blanche, ce que nous appelons les « contre-fictions d'inceste » interrogent de façon provocante la citoyenneté et le droit dans ces États. Le motif de l'inceste, fantasmé ou accompli, est étudié dans des romans datés de 1929 à 2005 et écrits entre autres par W. Faulkner, T. Morrison, R. Ellison, G. Jones, Sapphire aux États-Unis et par D. Lessing, B. Head, A. Dangor, M. van Niekerk, L. Rampolokeng en Afrique du Sud. Nous retraçons l'évolution du traitement esthétique et politique de l'inceste dans les romans de ces pays marqués par l'association entre communauté, nation et « race », et réfléchissons dans le même temps à la réalité omniprésente de ce crime dans nos sociétés. / Incest, a notorious universal taboo, is an ancient protean theme in literature. According to Peter Thorslev, writers are drawn to this theme because of its powerful dramatization of the conflict between an individual's desire and that of the society. This theory is applicable to the past tradition of romanticism, but it doesn't take into account the complexity of incest fictions written in Twentieth-century novels. The «proliferation of discourses on sex within the context of power itself » described by Foucault, along with the development of the politics of race and eugenics, explain how the incest theme is intertwined with another controversial concept : « race ». Novels no longer depict an individual fighting against society when they portray incest, but they think of human groups trying to define themselves, often by way of race. Confronting incestuous characters is not a means of drawing an obscure symbolic line between the civilized and the savages, but among citizens and non-citizens. In South Africa and the United States of America, where political fictions had defined the nation as a perfect family to justify the exclusion of non-white people from the community of citizens, « counter-fictions of incest » examine in provocative ways how citizenship and rights are articulated. I question the incest theme – forbidden desire or sexual violation– in novels from 1929 to 2005, by American writers such as W. Faulkner, T. Morrison, R. Ellison, G. Jones, Sapphire and by South African authors like D. Lessing, B. Head, A. Dangor, M. van Niekerk, and L. Rampolokeng. I outline the aesthetic and political evolution of the incest theme in novels written in those societies where community, nation and « race » were particularly interconnected, while simultaneously reflecting on the omnipresent reality of the crime of incest in all societies.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2013PA131014 |
Date | 13 December 2013 |
Creators | Harpin, Tina |
Contributors | Paris 13, Garnier, Xavier |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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