Cette thèse a pour objet la représentation de l’Europe dans les romans espagnols du XVIIe siècle et en particulier de trois d’entre eux : le Persiles (1617) de Miguel de Cervantès ; l’Estebanillo González (1646), attribué à Gabriel de la Vega ; et le Criticón (1651-1657) de Baltasar Gracián. Ces récits ont la particularité d’investir de vastes étendues européennes, alors que la plupart des romans du Siècle d’Or – hormis les livres de chevalerie – tend à se resserrer sur le territoire ibérique. L’enjeu de ce travail est de montrer que cette extension européenne est indissociable de projets littéraires ambitieux. Loin de se borner à une fonction ornementale, la géographie choisie par le romancier fonde un positionnement vis-à-vis du champ littéraire et du contexte historique. Dans nos récits à échelle continentale, investir des contrées jusqu’alors inexplorées par le roman est une façon d’aborder des formes et des thèmes inédits ; et traverser les territoires de plusieurs genres permet de confronter diverses écritures et des visions du monde généralement dissociées. Corrélativement, cette étude cherche à montrer que l’existence de « romans européens » dans l’Espagne du XVIIe siècle est liée à l’émergence de l’Europe comme d’une réalité prégnante : un espace culturel partagé, en passe de se substituer à la Chrétienté médiévale des livres de chevalerie ; un échiquier géopolitique où est remise en question la suprématie habsbourgeoise ; en somme, un horizon décisif pour l’existence des Espagnols. Si le Persiles, l’Estebanillo et le Criticón développent une écriture originale, c’est aussi pour explorer l’histoire en cours et la réécrire en y projetant un imaginaire propre. / This dissertation deals with the representation of Europe in seventeenth-century Spanish novels, with a special focus on three of them: Miguel de Cervantes’ Persiles (1617); La vida y hechos de Estebanillo González (1646), attributed to Gabriel de la Vega; and Baltasar Gracián’s Criticón (1651-1657). These texts have in common their opening onto vast European areas, whereas most of Spanish Golden Age novels –with the notable exception of the romances of chivalry– tend to be restrained in Iberian lands. Therefore, the main issue of this study is to show that their European spread is inseparable from ambitious literary projects. Indeed, by choosing a specific geography for their stories, the authors take position within the narrative world and the historical context. In our continental-scale fictions, covering novelistic terras incognitas is a way to reach unexplored themes and forms; and crossing genre-territories enables a mutual test of generally dissociated aesthetics and worldviews. Besides, this work aims at demonstrating that the existence of a few ‘European novels’ in the seventeenth-century Spain is linked to the emergence of Europe as an unavoidable reality: a shared cultural space, on the way to replace the medieval Christendom perpetuated by the old-fashioned romances of chivalry; a geopolitical arena where the Habsburg supremacy is being increasingly questioned; and, all in all, a decisive background for the Spaniards. In order words, one can better appreciate the aesthetic originality of Persiles, Estebanillo and Criticón, when observing that these fictions are also intended to recreate by rewriting the recent past of Europe.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2012PA040075 |
Date | 12 May 2012 |
Creators | Nevoux, Pierre |
Contributors | Paris 4, Blanco, Mercedes |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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