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Application de l’EEG-SPIRf aux soins intensifs neurologiques : une nouvelle approche multimodale d’enregistrements à long terme de l’activité épileptiforme

La spectroscopie proche infrarouge fonctionnelle (SPIRf) est une technique de neuro-imagerie noninvasive permettant de mesurer les changements de concentration d’hémoglobine oxygéné (Δ[HbO]) et désoxygéné (Δ[HbR]). Au cours des deux dernières décennies, notre groupe (et d’autres) ont combiné la SPIRf avec l'électroencéphalographie (EEG) pour effectuer des enregistrements chez des patients avec épilepsie réfractaire afin d’évaluer son potentiel comme 1) technique de cartographie cérébrale noninvasive (par exemple, localisation des aires impliquées dans le langage et localisation du foyer épileptique) et 2) comme approche noninvasive pour étudier le couplage neurovasculaire pendant les pointes épileptiques interictales ainsi que lors des crises épileptiques. Malgré des résultats prometteurs, de nombreux enjeux demeurent avant que la EEG-SPIRf puisse être implantée en pratique clinique. En effet, l’installation de l’équipement prend encore trop de temps, l’obtention de signaux de qualité nécessite encore une surveillance serrée et un certain inconfort apparaît au fur et à mesure que les enregistrements progressent dans le temps. C’est d’ailleurs pourquoi les enregistrements EEG-SPIRf ont, jusqu’à maintenant, été généralement de courte durée (c. à d. rarement plus de deux heures) avec une couverture limitée du cortex cérébral (c. à d. généralement une ou deux aires corticales) et dans un milieu contrôlé de recherche (plutôt qu’au chevet dans un milieu clinique).

Compte tenu de son potentiel clinique, il y a lieu de poursuivre les efforts pour développer la EEG-SPIRf pour usage clinique. Notamment, un grand potentiel est pressenti pour la EEG-SPIRf aux soins intensifs neurologiques. D’une part, les patients qui y sont admis étant souvent comateux et/ou sous sédation, l’inconfort relié au port d’électrodes et d’optodes n’est plus en enjeu. D’autre part, ces patients présentent généralement des pathologies graves souvent associées à des anomalies épileptiformes fréquentes à l’EEG (décharges périodiques, crises subcliniques, état de mal non convulsif) dont l’impact hémodynamique sur cerveau tout comme leur prise en charge demeurent controversés. Les techniques actuellement utilisées aux soins intensifs (moniteur de pression intracrânienne, sonde de saturation veineuse jugulaire en oxygène, doppler transcrânien, EEG seul sans SPIRf) présentant des limitations, l’ajout d’une composante de SPIRf à l’EEG permettrait possiblement d’élucider l’impact de certaines de ces anomalies épileptiformes, guider leur traitement et en améliorer leur surveillance.
Ainsi, cette thèse visait à 1) développer et valider un système d’EEG-SPIRf compact, sans fil et couvrant toute la tête, destinée à une surveillance à long terme de patients souffrant de divers troubles neurologiques; 2) évaluer la faisabilité et le potentiel d’une surveillance vidéo-EEG-SPIRf (vEEG-SPIRf) à long terme auprès de patients comateux admis aux soins intensifs neurologiques présentant des décharges périodiques, des crises ou un patron électrophysiologique de bouffées-suppression; et 3) étudier la dynamique neurovasculaire associée à l'état de mal épileptique non convulsif chez des patients comateux.

La première et la deuxième partie du projet décrivent le développement et la validation d'un système EEG-SPIRf hybride et de "casques" EEG-SPIRf personnalisés destinés à surveiller l'hémodynamique corticale entière chez les patients neurologiques. Nous avons d'abord démontré sa performance globale chez des participants sains effectuant deux tâches cognitives spécifiques (c.-à-d. des tâches linguistiques et visuelles) en position assise (pour la première) et en pédalant sur une bicyclette (pour la seconde). Les mesures électrophysiologiques et hémodynamiques ont été validées à l'aide de deux systèmes commerciaux et ont montré, chez tous les participants, une sensibilité et une spécificité spatiotemporelle élevées. Nous avons ensuite démontré le potentiel clinique de notre système chez quatre patients souffrant de divers troubles neurologiques (par exemple, épilepsie réfractaire et maladies vasculaires cérébrales). Nous avons ainsi réalisé avec succès des enregistrements prolongés vEEG-SPIRf au chevet de tous ces patients et observé des changements hémodynamiques cliniquement pertinents et en concordance avec d’autres modalités de neuro-imagerie fonctionnelle. Une originalité particulière de ce projet réside dans sa capacité à "personnaliser" une technique d’imagerie fonctionnelle prometteuse à un environnement clinique (c.-à-d., à l’étage de neurologie et à l’unité de soins intensifs dans notre cas). Cette étude est la première à rapporter avec succès des changements hémodynamiques sur l’ensemble du cortex chez des patients neurologiques à l'aide d’une surveillance vEEG-SPIRf prolongée au chevet.

Par la suite, nous avons évalué la faisabilité de la surveillance vEEG-SPIRf à long terme dans un environnement plus ardu : les soins intensifs neurologiques. Nous avons réalisé avec succès de multiples sessions de surveillance vEEG-SPIRf de très longue durée auprès de 11 patients comateux présentant différentes anomalies épileptiformes. Une augmentation significative de [HbO] et une diminution de [HbR] était présentes lors des crises. De plus, ces changements étaient relativement proportionnels à la durée des crises. Bien qu’elles étaient de moins grande amplitude, de similaires Δ[HbO] et de Δ[HbR] était présents durant les bouffées lors de patrons de bouffées-suppression et lors de décharges périodiques de basses fréquences (i.e., < 2Hz).

Finalement, dans une étude subséquente, nous avons exploré l'hémodynamique corticale chez 11 patients comateux en état de mal épileptique non convulsif. Nous avons observé dans la majorité des cas, une augmentation de [HbO], du volume sanguin cérébral et du débit sanguin cérébral, mais avec des changements variables de [HbR] lors de courtes crises (inférieure à 100s). Cependant, lors de longues crises (plus de 100s), une augmentation de [HbR] était observée. Ces résultats préliminaires suggèrent que les mécanismes de couplage neurovasculaire pendant l’état de mal épileptique peuvent être dysfonctionnels chez certains patients et induire un état hypoxique, notamment lors de crises prolongées.

En conclusion, les observations rapportées dans cette thèse confirment le potentiel clinique de la vEEG-SPIRf chez l'adulte, notamment pour la surveillance des patients admis aux soins intensifs neurologiques à haut risque de décharges épileptiformes. La poursuite de son développement pourrait éventuellement fournir aux neurologues et intensivistes un autre outil de surveillance neurologique. / Functional near-infrared spectroscopy (fNIRS) is a noninvasive neuroimaging technique that measures concentration changes in oxy- and deoxyhemoglobin (Δ[HbO] and Δ[HbR]) associated with brain activity. Over the past two decades, our group (and others) have combined fNIRS with electroencephalography (EEG) to record patients with refractory epilepsy and evaluate its potential as 1) a noninvasive brain mapping technique (e.g., language area localization and localization of epileptic foci) and 2) as a noninvasive approach to study neurovascular coupling during interictal spikes as well as during seizures. Despite promising results, many challenges remain before the EEG-fNIRS can be implemented in clinical practice. Indeed, installing the equipment still takes too much time, obtaining and maintaining good signal quality still requires close monitoring, and the appearance of discomfort as the recordings progress in time. For those reasons, EEG-fNIRS recordings to date have generally been of short duration (i.e., rarely more than two hours) with limited coverage of the cerebral cortex (i.e., typically one or two cortical areas) and in a controlled research setting (rather than at the bedside in a clinical setting).

Given its clinical potential, there is a need for continued efforts to develop fNIRS-EEG for clinical use. In particular, fNIRS-EEG has great potential in neurological intensive care. On the one hand, since patients admitted to the ICU are often comatose and/or sedated, the discomfort of wearing electrodes and optodes is no longer an issue. On the other hand, these patients generally present serious pathologies often associated with frequent epileptiform abnormalities on the EEG (periodic discharges, nonconvulsive seizures and status) whose hemodynamic impact on the brain, as well as their management remain controversial. The techniques currently used in intensive care units (intracranial pressure monitor, jugular venous oxygen saturation probe, transcranial Doppler, EEG alone without fNIRS) have limitations. Adding an fNIRS component to the EEG could perhaps elucidate the impact of some of these epileptiform abnormalities, guide their treatment and improve their monitoring.

Thus, this thesis aimed to 1) develop and validate a compact, wireless, whole-head EEG-fNIRS system for long-term monitoring of patients with various neurological disorders; 2) to evaluate the feasibility and potential of long-term video EEG-fNIRS (vEEG-fNIRS) monitoring of comatose patients admitted to the neurological intensive care unit with periodic discharges, seizures or an electrophysiological pattern of burst-suppression; and 3) to study the neurovascular dynamics associated with nonconvulsive status epilepticus in comatose patients.

The first and second parts of the project describe the development and validation of a hybrid EEG-fNIRS system and personalized EEG-fNIRS "caps" to monitor whole cortical hemodynamics in neurological patients. We first demonstrated its overall performance in healthy participants performing two specific cognitive tasks (i.e., language and visual tasks) while sitting (for the former) and pedalling a bicycle (for the latter). Electrophysiological and hemodynamic measurements were validated using two commercial systems and showed, in all participants, high sensitivity and spatiotemporal specificity. We then demonstrated the clinical potential of our system in four patients suffering from various neurological disorders (e.g., refractory epilepsy and cerebrovascular diseases). We successfully performed prolonged vEEG-fNIRS recordings at the bedside of all these patients and observed clinically relevant hemodynamic changes* in agreement with other functional neuroimaging modalities. A particular originality of this project is its ability to "customize" a promising functional imaging technique specific clinical settings (i.e., neurology ward, epilepsy monitoring unit, and intensive care unit in our case). This study is the first to successfully report hemodynamic changes across the cortex in neurological patients using extended bedside vEEG-fNIRS monitoring.

Subsequently, we evaluated the feasibility of long-term vEEG-fNIRS monitoring in a more challenging environment: the neurological intensive care unit. We successfully performed multiple sessions of very long-term vEEG-fNIRS monitoring in 11 comatose patients with different epileptiform abnormalities. During seizures, a significant increase in [HbO] and a decrease in [HbR] were present. Moreover, these changes were relatively proportional to the duration of the seizures. Although they were of lesser magnitude, similar changes in [HbO] and [HbR] were present during bursts in burst-suppression patterns and with low-frequency (i.e., < 2Hz) periodic discharges.

Finally, in a subsequent study, we explored cortical hemodynamics in 11 comatose patients in nonconvulsive status epilepticus. We observed in the majority of cases an increase in [HbO], CBV and CBF, but with variable changes in [HbR] during short seizures (less than 100s). However, during prolonged seizures (more than 100s), an increase in [HbR] was seen. These preliminary results suggest that neurovascular coupling mechanisms during status epilepticus may be dysfunctional in some patients and induce a hypoxic state, especially during protracted seizures.

In conclusion, the observations reported in this thesis confirm the clinical potential of vEEG-fNIRS in adults, especially for monitoring patients admitted to neurological intensive care units at high risk of epileptiform discharges. Further development could eventually provide neurologists and intensivists with another tool for neurological monitoring.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/32603
Date11 1900
CreatorsKassab, Ali
ContributorsNguyen, Dang Khoa
Source SetsUniversité de Montréal
LanguageEnglish
Detected LanguageFrench
Typethesis, thèse
Formatapplication/pdf

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