La globalisation n'a pas cessé de susciter des débats au sein de toutes les disciplines des sciences sociales. Ces débats touchent à la nature des transformations que les sociétés contemporaines sont en train de vivre sous le signe de cette globalisation. De même, ils expriment des interrogations et des réflexions sur le sens de l'ordre mais aussi des désordres du monde de l'après-guerre froide. La présente thèse tente de contribuer à ces débats et réflexions en se situant dans la tradition de la sociologie critique. Une sociologie critique se doit de dégager le sens d'une époque (télos) ou son principe d'organisation pour être en mesure d'éclairer les objets et les enjeux qu'elle analyse. La question de départ de cette thèse est ainsi la suivante: À partir de quel principe d'intelligibilité peut-on saisir le sens des transformations que connaissent les sociétés contemporaines ainsi que celui de l'ordre (ou du désordre) du monde de l'après-guerre froide? Cette première question m'amène à essayer d'appréhender ce sens en dégageant d'abord les discours dominants qui tentent d'en rendre compte. Si une théorie critique se doit de dégager le télos d'une époque pour pouvoir l'analyser, elle doit aussi construire ou définir un idéal-type sociétal qui lui permet d'évaluer les tendances du présent pour mieux le confronter, mais aussi de scander les transformations de son objet d'analyse, c'est-à-dire saisir les continuités et les ruptures dans la trame de son histoire. En traitant de la globalisation, la présente thèse privilégie le point de vue du politique, tel qu'il s'est exprimé dans la modernité, comme idéal-type sociétal ou postulat normatif qui lui sert de critère pour évaluer les tendances du présent, mais aussi pour juger de la validité et de la valeur heuristique des grilles dominantes de son analyse. Elle mobilise dans sa démarche une conception du politique qui en fait non pas une essence, ni un dispositif de contrôle et de domination, ni un vecteur d'influence, mais plutôt un principe d'institution de l'être-ensemble de la société (Hannah Arendt, Jacques Rancière, etc.). Ce principe est au fondement de son autoréflexivité et de son action sur elle-même (Michel Freitag). C'est le sens du politique tel qu'il s'est normativement exprimé au sein de la modenité (chapitre 1). Munie de ce critère normatif, ma thèse examine les discours qui ont affirmé rendre compte de la globalisation et qui sont dominants depuis la fin de la guerre froide. Elle se penche particulièrement sur deux discours dominants sur l'ordre global qui font appel à deux principes différents de découpage et d'explication du monde: l-celui qui en parle comme étant un monde unifié et homogénéisé techno-économiquement et formant tendanciellement « une société-monde », incarnant pour certains la « fin de l'histoire » et réunissant, pour d'autres, les conditions d'un « parachèvement de la modernité » (chapitre Il). 2-celui qui analyse l'ordre global en faisant de la distance culturelle le fondement d'un modèle explicatif du monde qui l'organise en entités incommensurables fermées sur elles-mêmes (ex: les civilisations, les religions), ce qui rend difficile les échanges avec l'extérieur. La logique qui définirait l'ordre global serait l'affrontement ou du conflit qui s'exprimerait en termes civilisationnels-religieux-culturels dans le cadre de la globalisation (ex: thèse du choc des civilisations). Ces deux discours se rattachent à des conjonctures particulières du monde de l'après-guerre froide mais ils sont aussi devenus des paradigmes spontanés pour l'imaginaire globalisé. Ils ont, au-delà de leur opposition apparente, été, notamment, mobilisés comme justification idéologique de la politique globale dans le monde de l'après-guerre froide (Chapitre III). La présente thèse soumet ces deux discours à une critique immanente qui en dégage les énoncés principaux, puis met en lumière leurs fondements théoriques mais aussi leurs présupposés implicites. Ceci lui permet de mieux soumettre ces discours également à une critique normative engagée à partir du critère du politique. Cette critique permet d'affirmer que loin d'éclairer les enjeux impliqués dans les processus de la globalisation néolibérale, les discours dominants et les découpages du monde qu'ils mobilisent ne permettent pas de saisir la complexité sociohistorique de la réalité de l'ordre global, tel qu'il est vécu dans les sociétés contemporaines. Ils occultent la production techno-économique mais aussi politique et idéologique de l'ordre global, qui est nécessairement polarisante, et donc convergent comme modes de forclusion du politique et d'imposition de l'évidence sensible de la légitimité de la domination de cet ordre. Ils ne répondent pas ainsi au besoin qui s'impose d'urgence, pour l'analyse du contexte global, d'une approche théorique offrant une compréhension synthétique des processus de la globalisation. Cette approche devrait permettre d'appréhender le sens de la continuité des structures du capitalisme, des conditions de son existence, mais aussi de ses ruptures, comme l'exigerait une théorie critique. C'est ainsi que le quatrième chapitre de la présente thèse confronte les postulats du discours néolibéral (thèse de la fin de l'histoire, le modèle explicatif de la société-monde, etc.), ainsi que ceux qui fondent la thèse du choc des civilisations (explications culturalistes des conflits, retour de l'État, etc.), aux thèses de la « théorie des systèmes-mondes », qui est fondée sur l'idée de la nature polarisante du capitalisme et qui renouvelle la théorie classique de l'impérialisme. Tout en soulignant la force explicative de cette théorie, cette thèse interroge la valeur heuristique du corpus conceptuel proposé dans le cadre de la perspective des systèmes-mondes. Le cinquième chapitre tente de saisir la spécificité de la globalisation néolibérale à la lumière de la critique phénomonélogico-politique de la globalisation élaborée par Michel freitag. Ce chapitre expose les fondements épistémologiques et théoriques de la théorie freitagienne de la société et de l'action sans laquelle il n'est pas possible de saisir toute la portée de l'évaluation freitagienne des transformations des sociétés contemporaines. La théorisation freitagienne de ces transformations est intégrée dans le cadre de la typologie générale des sociétés établie par Freitag qui est exposée en mettant l'accent sur la compréhension phénoménologico-politique de la globalisation qui y est proposée. Cette compréhension est présentée comme permettant un décryptage du sens des enjeux actuels des sociétés contemporaines ainsi qu'une définition des priorités qui s'imposent à la pensée critique. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Globalisation, Capitalisme, Néolibéralisme, Ordre global, Sociologie critique, Civilisation, Modernité, Postmodernité, Politique, Institution, Domination, Légitimité, Contrôle, Société contemporaine, Société-monde, Système-monde, Discours, Idéologie, Hégémonie, Impérialisme, Développement, Complexité, Espace, Histoire, Structure, Conjoncture, Après-guerre froide, État, Polarisation.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.2573 |
Date | January 2009 |
Creators | Khriji, Tesnim |
Source Sets | Library and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada |
Detected Language | French |
Type | Thèse acceptée, NonPeerReviewed |
Format | application/pdf |
Relation | http://www.archipel.uqam.ca/2573/ |
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