Dans une époque de circulations mondialisées nous sommes confrontés à des formes de souffrances complexes et inédites qui échouent dans les services socio-sanitaires. Objets muets de nombreuses recherches sur l’accès au soin, ou sur les troubles psychiatriques qui les affectent, les demandes de santé mentale des personnes migrantes ont soulevé des débats décennaux dans l’articulation entre anthropologie et psychologie. Dans diverses configurations historiques, des manières différentes de regarder l’autre ont construit des modèles spécifiques de prise en charge d’un public migrant. Aujourd’hui les souffrances des personnes migrantes semblent échapper à tout modèle de prise en charge qui risque de les figer dans des lectures préconçues et de gommer leur pluralité. Cela, souligne l’importance d’une redéfinition des modèles théoriques et des pratiques cliniques à l’étude des souffrances contemporaines. À partir d’une ethnographie du quotidien que nous offrait notre situation clinique de terrain, nous avons essayé de décrire ces souffrances dans leur complexité. À travers une démarche sociographique et narrative qui nous a permis d’intégrer le maximum d’éléments biographique des personnes, nous avons enrichi notre écoute clinique. Cette écoute attentive, ouverte et centrée sur la personne a fait apparaître un ensemble de dimensions qui souvent ne sont pas prises en compte dans la description des souffrances en situation de mondialisation. Ces dimensions mêlant des variables affectives, politiques, économiques et sociales, nous les appellerons configurations affectives. Nous avons pu mener une réflexion autour de ce qui construit aujourd’hui les difficultés singulières d’être au monde du sujet migrant contemporain. Ainsi nous avons pu nous recentrer sur l’implication du sujet comme acteur d’itinéraires thérapeutiques pluriels et variables qui s’insèrent dans les trajectoires migratoires. Dans une approche qui se situe entre une anthropologie médicale clinique et une clinique de la subjectivité, entendre les expériences de vie de ces personnes souvent rendues invisibles par des processus d’altérisation – d’autant plus dans la santé mentale – permet de les reconnaître dans leurs existences et demandes singulières. Nous essayons enfin de contribuer au développement des services compétents dans l’intervention psychosociale avec des personnes en situation de souffrances mondialisées. / In the context of global flows of people, local social and health services are confronted to different forms of complex and unprecedented suffering. Immigrants’ mental health needs have triggered numerous debates in the last decades, in particular concerning the articulation between anthropology and psychology. Their experience remained invisible and unexplored in research on healthcare access or in relation to the psychiatric disorders they cope with. Through different historical contexts, different approaches to construe the relationship to the Other have suggested different healthcare approaches for immigrants specifically. Today, these different analytical propositions seem unable to capture the plural dimension of contemporary immigrant suffering, and threaten to limit their understanding to preconceived categories. This leads to a need for redefining theoretical models and clinical strategies.This study describes the complexity of human suffering. It is grounded in an ethnography of everyday practice at a mental healthcare clinic. It relies on a sociographic and narrative approach which has allowed to take into consideration a maximum of biographic information on subjects, and which has enriched our clinical listening skills. This careful, open and person-centered form of listening unveiled a number of dimensions that are rarely taken into account in the description of globalization-related forms of suffering. Such dimensions reveal a constellation of affective, political, economic and social variables, which we have decided to conceptualize as “affective configurations”. We have carried out an in-depth analysis of new forms of being-in-the-world for contemporary subjects. We thus shifted the focus on the subject as an actor of multiple and changing therapeutic itineraries within immigration trajectories. This approach is located at the intersection between clinical medical anthropology and subject-centered clinic. It both gives access to the subjects’ experiences and acknowledges their existence and unique needs – while until then, they had remained invisible through a focus on their otherness, particularly in the context of mental health. Finally, we attempt to contribute to developing competent psychosocial services for globalization-related forms of suffering.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017EHES0039 |
Date | 28 April 2017 |
Creators | Rostirolla, Daria |
Contributors | Paris, EHESS, Jaffré, Yannick |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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