Dans cette thèse, nous montrons dans quelle mesure les pratiques culturelles alternatives, que nous appelons off, participent au développement des grandes métropoles, tout comme cela a été démontré avec la culture institutionnelle, que nous appelons in.<br /> <br />Il est couramment admis que la culture est un élément qualifiant dans la concurrence inter-urbaine et est essentielle à la construction de l'image d'une métropole. En effet, la diversité et la qualité de l'offre culturelle et artistique sont des atouts pour attirer des entreprises de pointes dont les cadres sont friands et grands consommateurs de services culturels. D'autre part, l'événementiel culturel est un moteur du tourisme urbain, principalement axé autour du tourisme culturel. Enfin, la culture et l'industrie culturelle représentent aujourd'hui un secteur économique en pleine expansion, et jouent un rôle important dans le développement des grandes métropoles comme Paris, New York, Los Angeles et San Francisco...<br />En terme de développement urbain, ces phénomènes peuvent se manifester de plusieurs manières :<br />• Les lieux culturels sont programmés dans les projets urbains : dans de nombreux programmes de requalification de friches urbaines, de nouveaux équipements culturels et de loisirs ont été aménagés, devenant les portes-drapeaux de la regénération urbaine ; <br />• les artistes sont souvent des pionniers de la gentrification. A la recherche de locaux spacieux, peu onéreux et centraux, ils s'installent dans des quartiers dévalorisés, industriels ou populaires ; et peu à peu, par leur présence, revalorisent symboliquement le quartier, où de nouvelles populations, attirées par la proximité des artistes, viennent s'installer, entraînant une hausse des prix de l'immobilier. Cela a souvent pour conséquence de chasser les populations les plus pauvres dont les artistes eux-mêmes, incapables de payer les nouveaux loyers ;<br />• les espaces d'expression de la culture (musées, galeries, théâtres, patrimoine bâti...) sont les lieux visités par les touristes, devenant les symboles de la ville, reconnus internationalement.<br /><br />Ces observations portent sur ce que l'on peut considérer comme étant la culture institutionnelle, que nous appelons in. Pour notre part, nous proposons que les pratiques culturelles alternatives ou off participent elles-aussi et de manière similaire au développement urbain. Leur présence est révélatrice de la créativité et du dynamisme d'une métropole. Elle est porteuse d'une image positive pour la ville car c'est par la pluralité et la diversité des scènes et des pratiques artistiques que la culture devient un élément de la métropolisation. <br /> <br />Nous parlons de culture in et de culture off par analogie aux grands festivals où se côtoient le in et le off. Le in y est programmé et le off opportuniste et spontané ; le in s'enrichit par l'existence du off où, par une plus grande liberté, peuvent se produire les innovations ; le off a besoin du in pour justifier son existence, trouver une légitimité. Et peu à peu, le off prend le dessus sur le in, attire plus de spectateurs, devient le moteur populaire du festival. Ainsi, dans cette thèse, nous postulons que la culture off joue un rôle dans le développement urbain par complémentarité avec la culture in. <br /> <br />Pour cela, nous concentrons nos analyses autour des lieux culturels off (comme par exemple les squats d'artistes) pour montrer en quoi ils contribuent à l'attractivité d'un espace métropolitain. En effet, les lieux off sont l'inscription physique dans l'espace urbain de pratiques artistiques off. Ici, ils ne sont pas l'objet de l'étude, mais le fil conducteur, l'analyseur permettant une compréhension nouvelle des évolutions urbaines contemporaines.<br />Dans cette optique, il s'agit de construire une méthodologie adaptée et novatrice en reprenant les trois grands marqueurs du développement urbain que nous avons présentés précédemment. Ainsi, trois axes et méthodes de recherche sont mis en œuvre :<br />• La régénération urbaine. Comment les lieux culturels off sont-ils intégrés à des projets urbains ? Comment deviennent-ils des constituants d'un nouveau quartier ? Comment les aménageurs conçoivent-ils cette intégration ? Nous nous intéressons particulièrement aux discours produits par les différents acteurs impliqués pour justifier, expliquer et valoriser la présence de lieux off dans des projets d'aménagements (par exemple, l'intégration des Frigos dans la ZAC Paris-Rive gauche). <br />• La gentrification. Dans quelle mesure des lieux off (comme les squats d'artistes) participent-ils à la revalorisation symbolique d'un quartier ? Pour cela, avons réalisé une analyse de données statistiques sur le marché immobilier parisien et des enquêtes auprès d'agents immobiliers afin de comprendre la perception, par des acteurs centraux du marché immobilier, de la présence d'artistes dans un quartier. <br />• Le tourisme urbain. Les squats d'artistes et d'autres éléments de la culture off sont-ils des lieux touristiques ? Participent-ils à l'image touristique des villes ? Pour mettre en évidence cela, nous étudions la construction de l'image touristique des villes à travers une analyse sémiotique de différents guides touristiques. En effet, le guide touristique constitue en soi un corpus intéressant, quoique négligé, pour analyser l'image construite d'un lieu. Il ne reflète pas la réalité du lieu, mais construit et est construit par l'imaginaire porté par ce lieu. <br />Au travers ces trois volets, cette recherche montre comment et dans quelle mesure un lieu off, peut participer au développement urbain. La coexistence des cultures in et off est essentielle à l'effervescence créative d'une métropole, à la fois révélatrice et symbole du dynamisme métropolitain.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00257227 |
Date | 31 May 2006 |
Creators | Vivant, Elsa |
Publisher | Université Paris VIII Vincennes-Saint Denis |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
Page generated in 0.0032 seconds