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Les compagnies occidentales dans l'économie mondiale : origine institutionnelle des organisations du capitalisme industriel

La généralisation du salariat, une rationalisation accrue des procédés de fabrication et le décollage d’une économie puisant en elle-même les principaux leviers de sa croissance figurent parmi les phénomènes générés par l’industrialisation au 19e siècle. Embrassant des pans toujours plus nombreux de l’activité économique, cette grande transformation qui colora de manière indélébile plusieurs aspects de la vie en société mena au développement d'importantes organisations capitalistes assujetissant un nombre grandissant de ressources matérielles et humaines à leur mode de fonctionnement. Ces organisations connurent une ascension fulgurante au 20e siècle, préparant le chemin à une transformation en profondeur de la société. La pierre d’assise au déploiement de ces organisations capitalistes fut d’abord une institution, la société par actions (compagnie), dont la présente thèse retrace la genèse. L’institutionnalisation des compagnies s’est étendue sur plusieurs siècles. Les coutours de cette institution furent, à travers le temps, façonnés par cette large trame d’échanges culturels et commerciaux liant entre elles plusieurs parties du globe et dans laquelle les compagnies se sont inscrites. À chaque modification significative de l’institution voit-on en effet que l’insertion des compagnies dans cet univers presque mondial joua un rôle clef, qui mérite d'être davantage souligné, ce à quoi vise la présente thèse. Sans que soient pour autant gommés ces jalons essentiels posés par le monde occidental dans cette aventure, la présente thèse fait ainsi une large place à ces points de vue de « l’histoire globale » qui focalisent leur attention sur les relations entre les civilisations sur le temps long. Ces perpectives ajoutent à l’image qui se dégage d’une institution séculaire, s’étant construite en plusieurs étapes, avant de servir de creuset à la fabrication industrielle des marchandises. De cette genèse de l’institution de la compagnie (des cités-États italiennes du Moyen Âge à l’industrialisation), trois moments ont été distingués, structurant en trois parties la thèse qui débute avec l’époque charnière de l’an mil. Partie 1. Après des siècles d’invasions, l’Europe de l’Ouest offre une image morcelée. Ses foyers de peuplement se sont pour la plupart recroquevillés économiquement et politiquement dans des seigneuries. Tandis que tardent à surgir des pouvoirs tutélaires instituant les cadres propices au commerce de longue distance, les quelques marchands qui s’aventurent à travers les territoires se regroupent en caravanes. Ce sont ces pionniers qui, allant à la rencontre de civilisations riches en trésors (matériels et intellectuels), introduisent en Occident des marchandises exotiques, mais aussi les techniques comptables et financières soutenant l’essor commercial subséquent de l’Europe de l’Ouest. L’institution de la compagnie en tire à première vue son origine. Partie 2. La montée des États absolutistes du régime westphalien conduit à l’encastrement des compagnies dans les politiques mercantilistes des monarchies au moment où l’Occident joue un rôle de plus en plus déterminant au sein des réseaux commerciaux de l’économie mondiale. Les compagnies responsables du transit des marchandises se voient alors assujetties aux visées d’intérêt national (politiques économiques, diplomatiques et militaires, notamment) des États absolutistes avec lesquelles l’objectif de rentabilité aura à composer. Partie 3. Au 19e siècle, la Grande-Bretagne, qui fait l’expérience de l’industrialisation, cherche à se délier des charges de la colonisation et adopte des politiques commerciales de facture plus libérale. Pour les économies subalternes, la nouvelle conjoncture commande un repositionnement. L’économie québécoise incarne alors l’archétype de ces transformations. On y cherche alors de nouveaux moteurs économiques tandis que ses liens commerciaux et impériaux avec la Grande-Bretagne se dénouent. Délier les sociétés par actions de leurs obligations en regard des objectifs concrets visant l’intérêt public apparaîssait comme une avenue prometteuse, qui fut d’ailleurs empruntée. Cette nouvelle formule institutionnelle fournit le terreau dans lequel prit forme une configuration sociale inédite, dominée par de grandes organisations et les principes de gestion qui les animent. L’organisation, en tant que forme sociale, devint ainsi le noeud liant entre eux un nombre croissant de choses et d’acteurs. En resituant l’évolution de l’institution de la compagnie dans la trame générale du commerce mondial, en plus de s’intéresser au procès d’engendrement de la société postmoderne, la présente thèse jette aussi un éclairage sur 1) les origines du capitalisme et sur 2) la montée en puissance de l’Occident dans l’économie mondiale. L’institution de la compagnie constitua en effet autant une manifestation de ces changements qu’un des principaux instruments les ayant rendu possible. / The generalization of wage labour, an increased rationalization of manufacturing processes, and the taking-off of an economy that draws from within itself the main propellants of its growth are among the phenomena generated in the 19th century by industrialization. Embracing a growing number of economic activities, this great transformation not only colored indelibly many aspects of life in society, but it also implicated the deployment of important capitalist organizations, which integrated in large numbers material and human resources, subjecting them to their modus operandi. This corporate body, the organization, experienced a meteoric rise in the 20th century, paving the path to a society less structured by the modern state. The building block of the organization was an institution, the company, and it is the genesis of this entity that the present thesis aims to trace. The institutionalization of the organizations of industrial capitalism spanned several centuries. The customs of these institutions were, through time, shaped by the broad framework of cultural and commercial exchanges that linked several parts of the globe and in which the companies were implicated. In each significant shift in the development of the institution, we see that the insertion of companies in this almost global universe played a key role. Without minimizing the importance of the milestones achieved by the Western world in this saga, this thesis attributes a large place to “global history” perspectives, which focus on the relations between civilizations over time. These perspectives add to the image that emerges of a secular institution, built in several stages and then used as a crucible for the industrial manufacture of goods. In this genesis of the institution of the company (from the Italian city-states of the Middle Ages through to industrialization), three key moments were identified, which served to structure this thesis into three parts, beginning with the turning point of the year 1000. Part 1. After centuries of invasions, Western Europe portrays a fragmented image. Its population centers are for the most part economically and politically divided into seigneuries. In the period preceding the emergence of tutelary powers, which established a framework that was conducive to long-distance trade, the few merchants who ventured across the territories formed caravans. It was these pioneers who, while venturing to meet treasure-rich (both material and intellectual) civilizations, introduced not only exotic goods into the West, but also accounting and financial techniques that supported the subsequent commercial development of Western Europe. At first glance, the company’s institution derives its origin from this. Part 2. The rise of the absolutists states of the Westphalian regime led to the intertwining of companies in the mercantilist policies of the monarchies at a time when the West played an increasingly decisive role in the commercial networks of the world economy. This subjected the companies responsible for the transit of goods, as well as their objectives for profitability, to the national interests (economic, diplomatic and military policies, in particular) of the absolutists states. Part 3. In the 19th century, parts of Great Britain were undergoing industrialization, and in seeking to free itself from the burdens of administrating colonies, it adopted more liberal trade policies. For subordinate economies, the new commercial climate forced them to shift their strategies. Quebec’s economy during this period embodied the archetype of this transformation. It was forced to seek new economic engines, as its trade ties with the empire unraveled. The empowerment of corporations, through a disembedding from public policy, appeared to be a promising avenue. This new institutional formula provided the breeding ground for an unprecedented social configuration, dominated by large organizations and the management principles that drive them. The organization, as a social form, would thereafter become the knot that binds together a growing number of entities and actors. By resituating the evolution of the institution of the company in the general framework of world trade, in addition to taking an interest in the generation of postmodern society, this thesis also sheds light on 1) the origins of capitalism and 2) the rise of the West in the world economy. The establishment of the company was as much a manifestation of these changes as one of the main instruments that made them possible.

Identiferoai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/32963
Date18 December 2018
CreatorsDupont, David
ContributorsGagné, Gilles
Source SetsUniversité Laval
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
Typethèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat
Format1 ressource en ligne (xviii, 437 pages), application/pdf
CoverageOccident
Rightshttp://purl.org/coar/access_right/c_abf2

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