L’essai lie la prétention scientifique du discours de savoir à la dimension ludique de l’écritlittéraire. Dans le contexte colonial, où le savoir est un important enjeu de pouvoir, l’essaipermet aux écrivains colonisés de jouer sur les règles de légitimité du discours et de prendre laparole, devenant un des modes d’expression privilégié de la pensée anticoloniale. Les tensionsentre le champ culturel et académique et le champ politique dans les sociétés décoloniséesréactivent sa vocation à construire un savoir en se situant à la marge des discours établis, àsubvertir l’ordre des discours.Cette analyse du positionnement de l’essayiste postcolonial conduit alors à préciser sadémarche d’écriture. Porté sur l’analyse plutôt que sur la synthèse, celui-ci se défie des théoriesglobalisantes pour leur préférer une description d’un lieu précis qu’il ramifie progressivementau reste du monde. Cette démarche est sous-tendue par une attitude de suspicion et de mise enquestion à l’égard de tout processus de représentation. Le discours théorique impose auxessayistes postcoloniaux de naviguer entre plusieurs contextes et plusieurs cultures sur unmode critique. Ils doivent se livrer à un travail de « double critique » (A. Khatibi) culturelle : illeur faut d’une part réfléchir à l’héritage endogène et à l’héritage européen et d’autre part à lafois remettre en question ce double héritage et poser les bases d’un renouveau culturel à partirde lui. Cette « double critique » nécessite un travail de réécriture qui vise à l’élaboration d’unnouveau savoir. Les essayistes empruntent les discours des sciences sociales, de l’histoire, de laphilosophie et de la science politique et ils les transforment : en mêlant ces discours à un travailde création, leurs textes deviennent des textes littéraires, prenant parfois les voies de la fictionet de la poésie. / The essay binds scientific will to formulate a truth to the shakiness and the playfull dimensionof literary writing. This ambivalence makes it particularly interesting to analyse scholars’relationship to political field. In the colonial context, knowledge is a power issue and the essay,with its literary aspects, allows number of colonized people circumvent rules of scientificlegitimacy: it is one of the essential tools of their speaking. It becomes gradually one of thepreferred modes of expression of anticolonial thinking. Tensions between cultural andacademical field on the one hand and political field on the other hand reactivate its vocation tobe located at the margin of established discourses and to subvert the order of knowledge.Social positioning of the postcolonial essayist in the Caribbean societies, Maghreb and sub-Saharan Africa in the late twentieth and early twenty-first centuries determines his writingprocess. Focused on analysis rather than synthesis, he distrusts global theories and prefers todescribe a specific place and make links with the whole world from this base. Doing this, hechallenges all kind of representation. Theoretical discourses make postcolonial essayistsnavigate between multiple contexts and multiple cultures in a critical mode. They have to use acultural “double critique” (A. Khatibi): they must firstly consider the endogenous heritage andEuropean heritage and secondly both challenge this double heritage and lay the foundations fora cultural revival from him. This “double critique” requires a rewriting of the scientific andliterary heritage in order to create a new knowledge. Postcolonial essayists borrow discoursesof social science, history, philosophy and politics and they change them: they mix thesediscourses to creative work and their texts become literary texts, including sometimes fictionand poetry.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2013PA040002 |
Date | 29 March 2013 |
Creators | Alix, Florian |
Contributors | Paris 4, Fonkoua, Romuald |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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