Notre recherche a pour objectif d'expliquer pourquoi la France, qui pourtant est un des pays à l'origine de la Convention européenne des droits de l'Homme, met vingt-cinq ans à ratifier cette Convention, et même trente ans avant d'autoriser le droit de recours individuel. Pour ce faire, nous avons dû prendre en compte de nombreux facteurs.Tout d'abord, l'évolution politique interne à la France. En effet, sous la Quatrième République, la question des colonies puis la question de la liberté de l'enseignement vont bloquer le processus de ratification. Puis, à partir de 1956 et du début de la guerre d'Algérie, la question de la ratification est bloquée. Aux débuts de la Cinquième République, la vision gaulliste de la justice et de l'Europe retardent de nouveau la ratification, malgré des mobilisations de parlementaires et de certains juristes. Finalement, au début des années 1970, la situation se débloque, Pompidou se montre plus européen et s'allie avec les centristes, c'est à la faveur d'un accord politique et après une mobilisation de nombreux acteurs menée par René Cassin, la Convention est ratifiée en 1974, mais avec des réserves et sans le droit de recours individuel. Il faudra attendre l'arrivée de Mitterrand au pouvoir pour que soit autorisé ce droit de recours. Tout au long de cette période, différents acteurs se sont mobilisés en faveur de la ratification de la CEDH.Au-delà des accords politiques, la ratification peut s'expliquer par tout une série de facteurs contextuels qui vont dans son sens et qui sont dans la continuité de l'avant Seconde Guerre mondiale. Tout d'abord, sur le plan interne, le contrôle de constitutionnalité est progressivement accepté par les juristes et les responsables politiques, ce contrôle marque la remise en cause du légicentrisme français, remise en cause nécessaire pour accepter la CEDH. Parallèlement, s'installe progressivement un droit européen, mis en place par la CJCE, l'acceptation de ce droit par les institutions politiques et judiciaires françaises et l'intérêt porté par la CJCE aux droits de l'Homme dans les années 1970, leur permettent de se familiariser avec l'idée qu'un droit externe, protecteur des libertés publiques, peut avoir une influence sur le droit français. La mise en place de la Commission puis de la Cour EDH et le développement de leur jurisprudence, qui est respectueuse des intérêts des Etats, va permettre de faciliter l'acceptation de ces institution. Enfin, la question droits de l'Homme, qui a été quelque peu mise de côté après 1950, revient en force à partir de la fin des années 1960 et devient à cette époque un concept, une idée omniprésente dans les médias et les discours politiques. Tous ces facteurs montrent une évolution de l'air du temps et des idées dominantes. Leur évolution est parallèle à l'acceptation de la CEDH, certes, ce ne sont pas des facteurs directs, mais ils marquent l'implantation dans la société des idées sous-jacentes dans la Convention EDH. / Our research aim to explain why it took twenty-five years to France to ratify the ECHR, even though France was one of the ECHR founding countries. We even had to wait until 1981, to see the individual petitions authorized in France. There are several factors to take into account.First, domestic politics are important. Under the Fourth Republic, colonial issues and then freedom of education are preventing France to ratify the Convention. Then, there are the Algerian war which completely block any possibility of ratification. After 1958, de Gaulle is the Président and his vision of justice and Europe are not compatible with the ECHR, therefore, the ratification is once more postpone, even though jurists and politicians are mobilized. Finally, at the beginning of the 1970s, Pompidou is more open to European ideas and he needs to make an alliance with the centrists. After a long mobilisation, led by René Cassin, the ECHR is ratify in 1974, with reserves and without individual right to petition. We have to wait until 1981, and François Mitterrand to see this right recognized. During this period, we have to emphasize the role of various actors who mobilized in favor of the ratification.In parallel to these political evolutions, the background changed between 1950 and 1970, and led to an easier acceptance of the ideas at the heart of the ECHR. First of all, judicial review is more and more accepted in France by both jurists and politicians. This review questioned the french legicentrism and make the acceptance of a conventional control easier. During the same period, a European Law is created by the European court of justice, which led to a better familiarity (not yet acceptance) with the possibility of having internal law influenced by an external one.The work of the European Commission of Human Rights and the European Court, is also instrumental into the acceptation of the ECHR. Their jurisprudence, in this period, takes into account the reluctance of the Member-States to see an external body judge their law, therefore, the ECHR doesn't seem to be menacing. Finally, we see the rise of Human Rights during this period, starting in the 1960s. Human Rights became in the 1970s a central issue in domestic and foreign affairs, medias and public society took an interest in their defense. It became central in politics. All these factors show an evolution of the mainstream ideas which led to an easier acceptation of the ECHR, even though there are not directly linked.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2016CERG0826 |
Date | 09 December 2016 |
Creators | Bonino, Pauline |
Contributors | Cergy-Pontoise, Bossuat, Gérard |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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