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L'expérience de la souffrance chez les femmes âgées atteintes de cancer incurable

La population vieillissante du Québec, majoritairement féminine, est aussi une population dans laquelle le cancer incurable sévit (Ferrell, 1999; Lavoie et Clément, 2005; Morère, 2002; Schmidt, 1999). Or, le fait de se savoir atteint d'un cancer incurable est une situation qui implique la plupart du temps, sinon toujours, de la souffrance (Connor et al., 2005). Dans un tel contexte, la communication avec l'entourage est souvent ardue et peut engendrer de la souffrance. De plus, ces femmes âgées atteintes de cancer vivent souvent maints changements corporels qui peuvent être très souffrants et qui pourtant restent très peu abordés. Aussi, un survol des écrits portant sur le vieillissement et le cancer met en évidence que l'interprétation du temps (présent, passé, futur) peut également se lier aux souffrances de ces femmes âgées atteintes de cancer incurable. Malgré cela, cette expérience reste très peu étudiée. En effet, les recherches qui portent spécifiquement sur la souffrance, et particulièrement en contexte de vieillissement et de maladie incurable sont, à notre connaissance, presque inexistantes. Nous proposons de contribuer à combler ce vide de la recherche en nous adressant à des femmes âgées atteintes de cancer incurable, afin de tenter de comprendre avec celles-ci comment elles vivent la souffrance. Plus précisément, nous explorerons trois grandes dimensions : la souffrance en lien avec la communication, avec l'éprouvé de leur corps, et en lien avec leur interprétation du temps. Cette recherche s'inscrit dans une approche de psychologie humaniste. C'est une étude qualitative exploratoire dans laquelle 10 femmes âgées de 65 ans et plus, atteintes d'un cancer incurable, ont été rencontrées à une ou deux reprises. 19 entrevues furent ainsi menées. Ces entrevues semi-dirigées ont été retranscrites intégralement et une analyse combinée (thématique et de catégories conceptualisantes) fut ensuite réalisée avec ces données (Paillé et Mucchielli, 2003). L'analyse de la souffrance en lien avec la communication met en lumière une dynamique complexe du silence tantôt souhaité par ces femmes pour éviter une souffrance accrue, tantôt imposé et source de souffrance. Les résultats mettent aussi en évidence le fait que le manque d'écoute et la minimisation de la parole de ces femmes sont éprouvants. Cette analyse explore aussi les conséquences du dévoilement de sa maladie et de ses souffrances. L'analyse de la souffrance liée à l'expérience du corps chez les femmes âgées atteintes de cancer incurable met en relief une autre forme de souffrance vécue par ces femmes. En effet, cette analyse met en évidence que les transformations de l'image de soi sont souffrantes à vivre. Les pertes fonctionnelles et les pertes d'autonomie le sont également. De plus, les incertitudes entourant le corps sont aussi reliées à des souffrances importantes. Enfin, les souvenirs et récits de cancer que ces femmes ont vécus ou entendus se relient aussi aux souffrances de celles-ci. L'analyse de l'interprétation du temps et de la souffrance chez les femmes âgées atteintes d'un cancer incurable dévoile que l'attente et l'annonce du cancer sont des événements du passé plus ou moins récent liés à des souffrances importantes chez ces femmes. Plusieurs de celles-ci vont décider de vivre au jour le jour, de profiter du moment présent et de leurs capacités actuelles, pour ne pas penser au futur. Ce futur est source de souffrance, désespoir et/ou associé à la mort par plusieurs. On y constate également que le rythme du temps vécu est aussi lié aux souffrances de ces femmes. Enfin, à partir des constats de ces analyses et de la définition de Ricœur (1994) de la souffrance, une conceptualisation des résultats prend notamment la forme d'une refonte de la définition de la souffrance à laquelle sont ajoutés les éléments de menace ou d'expérience mortifère et de rupture de lien. Cette étude contribue à redéfinir, mieux questionner et comprendre la souffrance des femmes âgées atteintes de cancer incurable, tant en recherche qu'en clinique. Comme toute étude elle comporte sa part de limites. Différentes mesures furent mises en place afin d'éviter les principaux écueils qui se présentaient. Cette recherche met en évidence le fait que cette souffrance mérite d'être reconnue tant par les chercheurs que par les intervenants et proches de ces femmes. Elle permet de mieux comprendre cette souffrance et de mieux l'écouter, la recevoir et la questionner en clinique comme en recherche. Elle nous rappelle aussi comme il est important d'ouvrir un espace où la souffrance, le vieillissement et la mort sont accueillis, entendus et respectés.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : souffrance, cancer, gérontologie, femmes, mort, corps, temps, communication, psychologie humaniste

Identiferoai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.5657
Date10 1900
CreatorsBourgeois-Guérin, Valérie
Source SetsLibrary and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada
Detected LanguageFrench
TypeThèse acceptée, NonPeerReviewed
Formatapplication/pdf
Relationhttp://www.archipel.uqam.ca/5657/

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