La vitesse d'exhumation (entre 10 et 100°ClMa) de certaines roches métamorphiques permet d'enregistrer une succession d'inversions du champ magnétique terrestre en nombre suffisant pour qu'une tentative de corrélation avec l'échelle magnétostratigraphique ait des chances d'aboutir. Un tel enregistrement est nommé enregistrement thermopaléomagnétique. Les principes du thermopaléomagnétisme reposent sur la loi d'additivité des aimantations thermorémanantes partielles (ATRp) qui n'est valable que si le porteur magnétique de l'aimantation est monodomaine. Les expériences réalisées en laboratoire (ATRp artificielles) sur le matériel étudié montrent clairement la qualité monodomaine du porteur de l'aimantation. La région étudiée est la zone dauphinoise à l'Est des massifs cristallins externes et notamment la région de Bourg d'Oisans. Cette région est caractérisée par la présence de pyrrhotite ayant acquis son aimantation après la déformation principale et durant le refroidissement post-métamorphique. La linéarité des diagrammes de Zijderveld permet de raisonner uniquement en terme d'intensité de l'aimantation et légitimise la construction des courbes de désaimantation thermique, J = f (1). Ces courbes montrent des fluctuations de l'intensité qui se corrèlent parfaitement d'un site à l'autre et sont interprétées comme l'enregistrement de chrones successifs lors du refroidissement post-métamorphique. Pour les thermochrones les plus longs, les comparaisons ARN/ATR permettent de calculer des valeurs de paléointensité du champ magnétique terrestre (CMT). Celles-ci sont particulièrement faibles (environs 10 mT) et correspondent à une période de fréquents renversements du CMT au" Miocène inférieur. L'interprétation des courbes de désaimantation thermiques des échantillons étudiés a permis d'établir une séquence de 21 inversions du champ magnétique terrestre, de la corréler avec l'échelle magnétostratigraphique afin d'obtenir une succession de couples T°/âges. Cette corrélation permet d'obtenir quasiment en continu, et en tout cas avec des précisions sur les âges et sur les températures bien meilleures que les méthodes géochronologiques classiques, l'histoire du refroidissement d'une portion de la zone dauphinoise. La courbe de refroidissement ainsi obtenue s'étend de 24,12 Ma/300°C à 20,13 Ma/180'C et permet d'établir la succession des événements ayant affecté la région de Bourg d'Oisans. . Il est aussi possible d'obtenir une succession, dans le temps, d'images représentant la répartition spatiale des paléotempératures et des taux de refroidissement à des instants connus. Pour la première fois, il est possible de mettre en évidence des hétérogénéités thermiques qui sont mises en relations avec des circulations de fluides. Celles-ci semblent perdurer pendant tout le refroidissement. L'outil thermopaléomagnétisme mis au point dans cette étude permet aussi moyennant un échantillonnage convenable, de calculer des paléogradients thermiques. L' interprétation des résultats de ce travail et des données existantes, bien que cherchant à rester simple, montre que l'histoire tectonique et thermique de cette région est extrêmement complexe. L'épisode d'épaississement contemporain de la déformation principale plicative synschisteuse se situe vers 26,5 Ma. Selon l'hypothèse envisagée pour expliquer l'excès de chaleur, la région de Bourg d'Oisans est enfouie à une profondeur de 8.6 km (hypothèse des fluides) ou à 12,5 km (hypothèse tectonique). Dans les deux cas cela nécessite la présence des zones internes bien plus à l'Ouest qu'elles ne le sont actuellemment. Une dénudation d'origine tectonique est proposée juste avant 24,12 Ma, pour expliquer nos observations. A la suite de cette dénudation, il se produit un refroidissement rapide, lié à la fois à la résorption de l'anomalie thermique précédemment créée et à l'érosion accrue du fait de la mise en place par sous-charriage d'une écaille crustale. Cette influence tectonique est suggérée par la similitude entre les fluctuations du refroidissement et celles de la subsidence du bassin molassique. Par la suite, le refroidissement devient plus faible. Pendant ce temps le secteur de Bourg d'Oisans ne subit aucune déformation significative. L'analyse des données directionnelles montre des écarts notables par rapport à la direction du paléochamp pour l'Europe stable. Ces écarts sont interprétés pour partie comme résultant d'un petit chevauchement " out of sequence" du socle des Grandes - Rousses postérieur au franchissement de l'isotherme 150°C, daté plus récent que 9 - 13 Ma. Les modalités de l'ensemble des déformations affectant la zone dauphinoise interne après 9 - 13 Ma restent toutefois encore mal comprises.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00444669 |
Date | 20 December 1996 |
Creators | Crouzet, Christian |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
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