Qu’est-ce qu’un paysage patrimonial ? C’est un nouveau regard porté par des acteurs sur un paysage qui, selon la définition de Lévy et Lussault (2003) « est censé mériter d’être transmis du passé, pour trouver une valeur dans le présent ». C’est « un ensemble d’attributs, de représentations et de pratiques fixés sur un objet non contemporain […] dont est décrété collectivement l’importance présente, intrinsèque (ce en quoi cet objet est représentatif d’une histoire des objets de société) et extrinsèque (ce en quoi cet objet recèle des valeurs supports d’une mémoire collective), qui exige qu’on le conserve et le transmette ». Afin de définir les propriétés patrimoniales du paysage, ces personnes s’organisent en groupes et tentent de communiquer entre eux. Chacun construit une représentation du paysage autour d’attributs spécifiques qui présentent un intérêt pour le groupe. Toutes ces représentations sont différentes et pourtant elles concernent bien un seul et unique paysage. Lorsqu’il s’agit de réaliser une action qui aura un effet sur cet espace commun, les acteurs se mettent à interagir au sein d’un « réseau collectif ». L’action peut alors faire l’objet de négociations, de tensions, de conflits, d’un accord ou d’un abandon en fonction de la position de chacun. Toutefois, que l’action ait été portée jusqu’à son aboutissement ou bien qu’elle ait été abandonnée, les acteurs ont échangé leurs regards au sujet du paysage pendant toute la phase d’interaction. Donc, au fur et à mesure des actions réalisées sur l’espace, les acteurs construisent un regard commun du paysage que l’on qualifie de « représentation collective ».Contrairement à un objet matériel, le paysage est difficilement quantifiable. L’acquisition pour ce dernier d’une valeur patrimoniale demande donc un processus complexe qualifié de « processus de patrimonialisation ». Ce processus n’a rien d’anodin pour les acteurs présents, il perturbe la représentation collective qui avait été créé au fur et à mesure de leurs échanges. Dans ce désordre social, les acteurs vont lutter pour faire valoir leur représentation du paysage, créant ainsi une nouvelle représentation collective. Dans ce contexte, notre thèse pose la problématique suivante : En se situant à l’échelle d’un territoire qui subit une transformation du regard vers un contexte patrimonial, dans quelle mesure les acteurs agricoles et non-agricoles se coordonnent et construisent une nouvelle représentation collective axée sur le maintien de l’élevage, l’utilisation de l’espace et la gestion du paysage ?Pour répondre à cette problématique, nous avons mobilisé les réseaux d’acteurs agricoles et non agricoles existant sur deux sites dans le Massif central (les Causses et les Cévennes et la Chaîne des Puys – faille de Limagne) qui sont inscrits ou en recherche d’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO. Après une rapide description des deux sites, nous avons expliqué notre positionnement en ce qui concerne l’aspect collectif plutôt qu’individuel dans la construction d’une représentation du paysage et autour de l’organisation et de la gestion de ce dernier. Nous avons ensuite construit une méthodologie qui s’inspire de cet apport théorique. Grâce à elle, nous avons su mener une centaine d’enquêtes qui nous ont permis d’identifier et d’analyser sur les sites les deux réseaux dans lesquels les acteurs collectifs s’organisent pour intégrer ce nouvel enjeu patrimonial dans leur représentation du paysage. Cette organisation en réseau se concrétise autour d’une série d’actions destinées en outre à la gestion du patrimoine, mais aussi au soutien de l’élevage et à la valorisation de la production agricole. Ainsi, nous constatons que le processus de patrimonialisation contribue indirectement, en influençant la représentation collective de l’espace agricole, à l’évolution des pratiques agricoles qui sont elles-mêmes responsables de la construction de l’espace. / What is a landscape heritage? It is a new look by actors on a landscape wichi, according to Levy & Lussault (2003) “is supposed to deserve a transfer from past to find a value in present”. It is “a collection of attributes, representations, practices fixed on a non-contemporary object […] whose present importance is declared collectively, intrinsic (how this objet is representative of history of society’s objects) and extrinsic (how this object contains the values of a collective memory), which requires its conservation and its transmission.In order to define the heritage properties of landscape, people organize themselves into groups and try to communicate with each other’s. Each constructs a representation of the landscape around specific attributes that are of interest to the group. All these representations are different and yet they concern a single landscape. When it comes to carrying out an action that will have an effect on this common space, the groups interact with each other within a “collective network”. The action may be the subject of negotiations, tensions, conflicts, agreement or abandonment depending on the position of each person. However, whether the action was carried out or abandoned, the actors have exchanged their views on the landscape throughout the collective network. Therefore, as actions are progressively carried out on patrimonial landscape, groups of people construct a common view of this landscape: it is the “collective representation of the landscape”.Unlike a material object, the landscape is difficult to quantify. The acquisition for the latter of a heritage value therefore requires a complex process called “patrimonialization process”. For the groups of people present in the landscape, this process is not insignificant. It disrupts the collective representation of the landscape that has been built in the collective network. In the resulting social disorder, the groups will struggle to assert their representation of the landscape in a new collective representation. In this context, our thesis poses the following problem: Considering a territory undergoing a transformation of the look towards a heritage context, to what extent do agricultural and non-agricultural stakeholders build a new collective representation focused on keeping livestock, use of space and landscape management?To address this problem, we have mobilized the networks of agricultural and non-agricultural actors existing at two sites in the Massif Central that are registered or in search of inscription on the UNESCO World Heritage (“Les Causses et les Cévennes” and “La Chaîne des Puys - faille de Limagne”). After a brief description of the two sites, we have explained our positioning as regards the collective rather than the individual aspect in the construction of a representation of the landscape and around the organization and management of the landscape. We have then constructed a methodology that is inspired by this theoretical contribution. Thanks to it, we managed to conduct a hundred interviews which enabled us to identify and analyze on the sites the two networks in which the collective actors are organizing to integrate this new heritage stake in their representation of the landscape. This network organization materializes around a series of actions aimed to the management of the heritage, as well as support for livestock rising and the enhancement of agricultural production. Thus, we note that the process of patrimonialization contributes indirectly, by influencing the collective representation of agricultural space, to the evolution of agricultural practices which are themselves responsible for the construction of space
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017CLFAL008 |
Date | 08 March 2017 |
Creators | Badan, Xavier |
Contributors | Clermont Auvergne, Michelin, Yves, Rieutort, Laurent |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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