L’attention pour la biodiversité se porte aujourd’hui sur les villes : il faut désormais prendre soin des espèces et des écosystèmes jusqu’au cœur des milieux les plus artificiels. Or, accueillir une nature sauvage bouleverse les critères d’ordre et de propreté des espaces urbains, et modifie les cultures professionnelles de leurs concepteurs et gestionnaires. Fin 2011, la Ville de Paris s’est dotée d’un Plan biodiversité. Fondé sur les savoirs de l’écologie scientifique, il doit permettre de renforcer la présence du vivant dans la capitale et affiche la volonté de changer le regard sur le sauvage en ville. Cette politique est confrontée à l’ethnographie d’une vaste friche urbaine, enjeu territorial pour la biodiversité parisienne : la petite ceinture. Construite au XIXe siècle autour de Paris, cette voie ferrée, en grande partie inutilisée, a été colonisée par la flore et la faune. Officiellement interdite au public, elle est pourtant intensément fréquentée par de nombreux habitants. Les rapports au lieu et à la nature qu’il abrite ont été étudiés chez les usagers informels des rails. L’absence de fonction officielle et une surveillance lâche permettent l’existence d’une vie sociale diversifiée, transgressive et inventive. Si la nature n’est pas centrale dans les relations à la friche, elle est une composante de l’identité du lieu. Le développement libre du végétal est valorisé pour sa rareté dans un monde urbain ultra-contrôlé, alors que son intérêt écologique est peu évoqué. En parallèle, la petite ceinture s’institutionnalise au titre de la nature. D’une part, une gestion différenciée est appliquée depuis 2006 par des équipes dont l’action participe d’une mise en ordre de l’espace. D’autre part, la Mairie de Paris aménage certains points du linéaire en jardins associatifs ou publics. L’étude du cas d’une promenade dans le XVe arrondissement révèle une véritable attention portée à la biodiversité. Mais la reconquête du délaissé va aussi de pair avec des modalités nouvelles de maîtrise du vivant et une normalisation du lieu et de sa pratique sociale. Herbes folles et pratiques informelles émergent là où le contrôle se desserre. Si les mauvaises herbes ont été réhabilitées, peut-être est-il possible de changer notre regard sur la fertilité sociale de la friche. / The attention for biodiversity has drawn to cities: it is now necessary to take care of species and ecosystems even in the most artificialized environments. Yet, hosting a wild nature disturbs the order and cleanliness criteria ruling urban spaces, and changes the professional cultures of their designers and managers. By the end of 2011, Paris adopted a Biodiversity Plan. Based on ecological science knowledge, its aim is to reinforce the presence of flora and fauna in the capital and to change city-dwellers’ perceptions on wild nature in cities. This policy is confronted to the ethnography of a vast urban wasteland, which is a territorial issue for Parisian biodiversity: the petite ceinture. Built during the XIXth century around Paris, this railway line, unused on a large portion, has been colonized by fauna and flora. Although public access is not permitted, this area is nevertheless intensely frequented by many inhabitants. The study among informal users focused on their relations to the place and the nature within it. The lack of official function and the loosy surveillance allow a diverse, transgressive and inventive social life. If nature is not central in the relations to the wasteland, it is a component of the place’s identity. The free development of plants is recognized for its rarity in an ultra-controlled urban world, while their ecological interest is not much mentioned. At the same time, the petite ceinture is being institutionalized. On one side, a differentiated management is implemented since 2006 by a staff whose action participates in ordering the space. On the other side, Paris City Hall converts some spots of the linear into community and public gardens. The case study of a promenade in the XVth arrondissement reveals a true attention towards biodiversity. But the recapture of the railway goes together with new modalities of controlling life, and the normalization of the place and its social practice. Wild grass and informal practices emerge where control comes loose. If bad weeds have been rehabilitated, maybe it is possible to change our perspective on the social fertility of the wasteland.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2016MNHN0006 |
Date | 19 September 2016 |
Creators | Scapino, Julie |
Contributors | Paris, Muséum national d'histoire naturelle, Lizet, Bernadette, Bahuchet, Serge |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
Page generated in 0.1418 seconds