Cette thèse de doctorat en études théâtrales propose d’étudier les modèles et pratiques d’écriture du personnage dans les écritures théâtrales québécoises des années 2000, et, à partir de cette analyse à la fois dramaturgique (études de pièces et définition d’une typologie des personnages) et génétique (entrée dans la fabrique de plusieurs auteurs pour comprendre comment ils créent leurs personnages), de définir la ou les figures de l’auteur dramatique dans ce contexte de création. La dramaturgie québécoise présente des survivances du personnage, quand d’autres ne cessent de le remettre en question. Mais loin de perpétuer un réalisme psychologique américain, les auteurs québécois des années 2000 mettent en scène des êtres profondément déterritorialisés dont la profondeur psychologique disparaît au profit d’une profondeur intertextuelle ou métathéâtrale. Ces personnages-créatures invitent à entrer dans la fabrique des auteurs pour interroger le partage des voix qu’ils opèrent afin de détourner un réalisme encore majoritaire dans les dramaturgies d’Amérique du Nord. À partir des pôles d’écriture du personnage que sont la langue, le corps, l’intertexte et la scène, la thèse analyse les pratiques d’écriture de plusieurs auteurs issus de générations et de formations différentes : Normand Chaurette, Daniel Danis, François Godin, Étienne Lepage et Larry Tremblay. Ces auteurs, qui doivent négocier sans cesse avec une altérité, qu’elle soit réelle (le contexte de production québécois invite les auteurs à échanger avec les autres actants du processus théâtral) ou fictive (les auteurs sont profondément habités par des autres qui parlent à travers eux), se trouvent démultipliés dans le processus d’écriture. Il semble alors que, face à cette démultiplication et à la difficulté de plus en plus grande pour l’auteur de faire entendre sa voix, les auteurs québécois choisissent le chemin de l’autopoïétique et exploitent dans leurs dernières créations leur moi d’auteur comme un matériau et comme un hyperpersonnage surplombant la fiction. C’est alors une voix de l’écriture unifiée, toujours aux limites de l’autofiction et de l’autobiographie, qui habite des dramaturgies qui ne seraient plus capables de faire advenir l’autre, un personnage entièrement détaché de la voix de son créateur. / The purpose of this doctoral thesis in drama studies is to investigate the models and practices in character writing in Quebecois drama in the years 2000, and from this investigation, which will have both a theatrical approach – through the study of plays and the elaboration of a typology of characters – and genetic – by entering into the authors’ factory to understand how they create their characters –, to identify the figure(s) of the playwright in this creative context. In Quebecois playwriting, characters still survive, while they are constantly questioned in other writing contexts. However, far from perpetuating realism as it prevails in American character writing, Quebecois authors in the years 2000 create deeply deterritorialized characters whose psychological depth disappears to make room for intertextual and metatheatrical profoundness. These creature-characters invite us into the authors’ factory to examine the sharing of voices they perform so as to circumvent North American drama’s still dominant realism. The four poles of character writing – language, body, intertext and stage – will then allow us to analyze the writing practices of several authors who belong to different generations and followed different trainings: Normand Chaurette, Daniel Danis, François Godin, Etienne Lepage and Larry Tremblay. These authors, who constantly have to deal with an otherness whether it is real – the production contexts in Quebec lead authors to interact with the other actors of drama’s creative process – or fictional – authors are deeply inhabited by others who speak through them –, find themselves demultiplied inside the writing process. It then seems that, when facing this demultiplication and the growing difficulty to make their voice heard, authors in Quebec are chosing the path of autopoiesis and using their “I” as authors in their latest creations as a material and as a supercharacter which dominates fiction. The act of writing then acquires a unified voice, constantly on the fringe of autofiction and autobiography, which inhabits plays that would may no longer be able to bring forth the other, a character which would be entirely separated from its creator’s voice.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2014PA030057 |
Date | 20 June 2014 |
Creators | Bouchet, Pauline |
Contributors | Paris 3, Université du Québec à Montréal (Producteur), Ryngaert, Jean-Pierre, Jubinville, Yves |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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