De nombreuses pathologies psychiatriques, telles que la schizophrénie, les troubles bipolaires ou la dépression majeure, bien que très différentes, ont en commun une dysfonction du système de récompense et de motivation en lien avec une altération de la transmission dopaminergique. Par ailleurs, ces pathologies s’accompagnent de modifications du métabolisme lipidique et en particulier d’une diminution des taux en acide docosahexaenoic (DHA), le principal acide gras polyinsaturé (AGPI) n-3 dans le système nerveux central. Cependant, bien que certaines études cliniques décrivent des effets bénéfiques de supplémentations en AGPI n-3 sur certains symptômes psychiatriques, ces résultats restent controversés, et l’implication de la modification du statut lipidique dans l’étiologie de ces pathologies reste très peu étudiée. Le but de ce travail a été d’établir s’il existe un lien causal entre une déficience en AGPI n-3 et certains endophénotypes neurobiologiques et comportementaux caractéristiques de pathologies psychiatriques. En particulier, nous avons fait l’hypothèse que la déficience en AGPI n-3 pourrait conduire à un dysfonctionnement de la transmission dopaminergique mésolimbique. Dans cette étude, des tâches de conditionnement opérant chez la souris nous ont permis de mettre en évidence un déficit motivationnel à l’âge adulte induit par une déficience développementale en AGPI n-3 qui est partiellement prévenu par une supplémentation en AGPI n-3 à la naissance, mais pas au sevrage. Ce déficit motivationnel s’accompagne d’une altération de la transmission dopaminergique comme le suggère la réduction de la sensibilité au psychostimulant, l’amphétamine. Plus précisément, nous avons pu montrer que la déficience en AGPI n-3 conduit à une dysfonction des propriétés électrophysiologiques des neurones épineux moyens (medium spinyneurons ou MSN) dans le noyau accumbens (NAc), population neuronale centrale pour la modulation de la motivation. En effet la carence en AGPI n-3 induit une réduction de l’excitabilité des MSNs de la voie directe (dMSNs) qui expriment le récepteur dopaminergique de type D1, associée à une augmentation de la transmission inhibitrice reçue par ces neurones. Ces modifications sont restaurées par l’application de l’agoniste des récepteurs dopaminergiques D2 (RD2), le quinpirole. Ces données nous ont amené à faire l’hypothèse que la diminution d’excitabilité des dMSNs sous déficience en AGPI n-3 résulte de l’augmentation de la transmission GABA issue des MSNs de la voie indirecte (iMSNs) exprimant le RD2. En accord avec ces résultats, par utilisation d’un transgène Cre-dépendant permettant l’expression de l’acide gras désaturase FAT1, nous démontrons que la normalisation des taux d’AGPI dans les iMSN sélectivement, est suffisante pour restaurer les propriétés électrophysiologiques des dMSNs. Par ailleurs, l’expression de la FAT1 dans les neurones exprimant le D2R – mais pas ceux exprimant le D1R - est suffisante pour normaliser le déficit motivationnel en situation de carence. Nos résultats montrent donc un lien causal entre des modifications de taux d’AGPI dans une sous-population neuronale spécifique et une altération comportementale. Par ailleurs, notre étude suggère que la diminution des taux d’AGPI décrite dans plusieurs pathologies psychiatriques pourrait directement participer à l’expression de certains symptômes tels que l’avolition ou l’apathie. / Various, though distinct psychiatric disorders, such as Schizophrenia, bipolar disorder or major depression are associated with a dysfunction of the reward system linked to an alteration of dopamine transmission. Furthermore, these pathologies are also accompanied by changes in lipid metabolism and in particular a decrease in the brain content of docosahexaenoic acid (DHA), the main n-3 polyunsaturated fatty acid (PUFA) in the nervous system. However, despite that n-3 PUFA supplementation seems to improve or prevent some psychiatric symptoms, these results are still controversial and the implication of brain lipid composition in the etiology of psychiatric endophenotypes has been overlooked. The aim of this study was to investigate a potential causal link between n-3 PUFA deficiency and common neurobiological and behavioral endophenotypes of psychiatric disorders. In particular, the hypothesis was that n-3 PUFA deficiency could lead to dysfunctions of mesolimbic dopamine transmission and associated behaviors. Using operant conditioning tasks in mice, we showed that developmental n-3 PUFA deficiency leads to a motivational deficit at adulthood, that is partially reversed by n-3 PUFA supplementation starting at birth, but not at weaning. This motivational deficit was associated with an alteration of dopaminergic transmission as revealed by the reduced sensitivity to the psychostimulant amphetamine. More precisely, we showed that n-3 PUFA deficiency leads to alterations in electrophysiological properties of medium spiny neurons (MSNs) in the nucleus accumbens (NAc), main actors in motivational processes. Indeed, MSNs from the direct pathway (dMSNs), that express dopaminergic D1 receptors, displayed a decrease in neuronal excitability in parallel with an increase of inhibitory input onto these neurons. These alterations were reversed by the dopaminergic D2 receptor (D2R) agonist quinpirole. These data led us to hypothesize that the decreased dMSN excitability induced by n-3 PUFA deficiency could result from an increase of the inhibitory input of MSNs from the indirect pathway (iMSNs that expresses D2R), called lateral inhibition. Accordingly, using a transgenic approach that allows the expression of the fatty acid desaturase FAT1 in a credependent manner, we showed that rescuing appropriate PUFA levels in D2R-expressing neurons selectively (including iMSNs), was sufficient to reverse alterations in electrophysiological properties of MSNs induced by n-3 PUFA deficiency. Moreover, the selective expression of FAT1 in D2-expressing neurons – but not in D1-expressing neurons – reversed the motivational deficit observed in n-3 PUFA deficient mice. We demonstrated the existence of a causal link between modifications in PUFA levels in a discrete neuronal population and behavioral alterations. Overall, this study suggests that altered PUFA levels, observed in some psychiatric disorders, could directly participate in the development of symptoms such as avolition or apathy.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2018BORD0415 |
Date | 18 December 2018 |
Creators | Ducrocq, Fabien |
Contributors | Bordeaux, Trifilieff, Pierre |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
Page generated in 0.0028 seconds