La sélection sexuelle façonne la diversité du vivant par deux voies possibles : la sélection intersexuelle et la sélection intrasexuelle. S'il est bien évident que combiner les études portant sur ces deux voies d'action est le meilleur moyen pour comprendre la sélection sexuelle dans son entièreté, l'étude particulière de chacune d'elles reste une étape cruciale pour rendre compte de ses différents modes d’actions. Mon projet de doctorat suit une approche intégratrice pour répondre à ce besoin en ciblant à la fois les caractères phénotypiques sensés être sous sélection intrasexuelle, et les facteurs populationnels sensés modifier l'intensité de cette sélection. Mes recherches gravitent autour de la compétitivité pour l’accouplement des mâles d'une population sauvage d'un grand mammifère polygyne : le mouflon d'Amérique (Ovis canadensis). Cette population, sous forte sélection sexuelle, est idéale pour ce projet puisqu’elle est l’objet d’un suivi individuel détaillé depuis 1988 fournissant des données morphologiques et démographiques. Cette thèse se compose de quatre chapitres de recherche.
Le chapitre 2 se concentre sur le rôle du phénotype dans la compétitivité pour l’accouplement des mâles. De façon indépendante et souvent expérimentale, les études montrent des liens entre le comportement reproducteur des mâles, leur morphologie, leur âge, et leur production de testostérone. Ce chapitre a donc pour objectif d’établir les relations entre ces trois niveaux phénotypiques en ciblant l’établissement du rang social, la longueur des cornes et la masse corporelle, et les concentrations fécales en métabolites de testostérone. Les résultats indiquent que le rang social est plus fortement lié à la production de testostérone qu’à la morphologie. De plus, la relation entre testostérone et rang social varie avec l’âge. Cette étude est un rare exemple d’intégration de plusieurs niveaux phénotypiques en nature dans le cadre de la sélection sexuelle.
Le chapitre 3 explore les déterminants populationnels de la sélection intrasexuelle sur la longueur des cornes et la masse. La sélection est relative à un contexte de compétition donné. Or, les conditions de compétition intrasexuelle varient selon la composition des populations. En ciblant le nombre de compétiteurs, le sexe ratio adulte, et la structure d’âge, ce chapitre montre que la fluctuation de la sélection sexuelle, rarement montrée en nature, est déterminée par le seul effet du nombre de compétiteurs. De plus, cette étude montre que la sélection sexuelle est subie différemment selon l’âge. Cette étude est une des rares à établir un déterminisme écologique de la fluctuation de la sélection en nature.
Le chapitre 4 replace l’étude de la sélection sexuelle dans le cadre plus large de la sélection totale sur les caractères sexuels secondaires. La valeur sélective est la contribution individuelle au bassin génétique des futures générations et est donc la pierre angulaire de l’évolution par sélection. En ciblant la relation entre phénotype et succès d’accouplement, les analyses de sélection sexuelle ne documentent donc que partiellement la relation entre le phénotype et la valeur sélective. Cette étude montre que des effets paternels peuvent accroitre la survie des descendants et intensifier l’effet de la sélection sexuelle sur les caractères.
Le chapitre 5 compare des indices et mesures de sélection sexuelle. Depuis les années 1980, les arguments pour ou contre l’utilisation de mesures approximatives de la sélection sont débattus. L’objectif ce chapitre est de mettre à profit les données du suivi de Ram Mountain pour tester empiriquement des prédictions quant aux relations entre indices et mesures de sélection. Les résultats montrent que la sélection réalisée sur la longueur des cornes ne pourrait pas être correctement approximée par les indices d’asymétrie du succès reproducteur ni l’opportunité pour la sélection.
Mes recherches de doctorat contribuent à raffiner la compréhension des mécanismes écologiques et évolutifs de la sélection intrasexuelle. De plus, l’emphase sur le rôle de la structure de la population dans la dynamique évolutive des caractères sexuellement sélectionnés permet de comprendre les mécanismes par lesquels l’exploitation humaine comme la chasse peut modifier les pressions de sélection affectant les populations sauvages.
Identifer | oai:union.ndltd.org:usherbrooke.ca/oai:savoirs.usherbrooke.ca:11143/106 |
Date | January 2014 |
Creators | Martin, Alexandre |
Contributors | Pelletier, Fanie, Festa-Bianchet, Marco |
Publisher | Université de Sherbrooke |
Source Sets | Université de Sherbrooke |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse |
Rights | © Alexandre Martin, Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 2.5 Canada |
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