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Effets de la stimulation spinale médullaire sur le profil sensoriel de patients atteints de douleur chronique

La douleur neuropathique affecte jusqu’à 10 % de la population dans les pays développés. Lorsque les traitements conventionnels ne parviennent pas à soulager les patients qui souffrent de ce type de douleur, l’une des alternatives reconnues par les lignes directrices internationales est la stimulation spinale médullaire (SSM). La SSM est une technique de neuromodulation réversible et peu invasive qui peut être employée pour le traitement de diverses pathologies, notamment le syndrome douloureux régional complexe (SDRC) et la lombosciatalgie chronique post-chirurgicale (LCPC). La SSM utilise les impulsions électriques afin de générer des potentiels d’action sur les cellules nerveuses. Les impulsions électriques sont provoquées au moyen d’une ou plusieurs électrodes implantées chirurgicalement dans l’espace épidural. Ces électrodes sont connectées à un neurostimulateur implanté sous-cutané. Les mécanismes d’action de la SSM sont encore mal connus et reposent principalement sur la théorie du portillon, selon laquelle, il est possible de bloquer la transmission du message nociceptif au niveau de la corne dorsale de la moelle épinière par une stimulation électrique en surface de la dure-mère. Cette stimulation en mode tonique (ou conventionnel) induit des paresthésies (sensations de picotement, fourmillement) dans le membre affecté qui altèrent la perception de la douleur et soulagent le patient. L’objectif principal de cette thèse était d’identifier les modifications de perception sensorielle entraînées par la stimulation spinale médullaire chez des patients atteints de douleur chronique en utilisant une batterie de tests sensoriels quantitatifs (TSQ). Selon la théorie du portillon, la SSM devrait modifier la perception des signaux nociceptifs. De plus, la présence de paresthésies devrait également contribuer à l’altération des perceptions sensorielles. Une revue de littérature systématique a été effectuée en suivant les lignes directrices Cochrane. La recherche d’articles et de résumés pertinents a été réalisée dans toutes les langues à partir des bases de données Cochrane, CINAHL, Embase, MEDLINE et Web of Knowledge. En tout, 15 articles furent inclus dans les analyses, mais en raison de la grande hétérogénéité entre les procédures utilisées, les individus examinés et les mesures évaluées, nous n’avons pas été en mesure d'identifier de manière probante l’impact de la SSM tonique sur la perception sensorielle de patients souffrant de douleur chronique. Toutefois, les données disponibles suggèrent que la SSM conventionnelle n'interfère pas avec la perception sensorielle. Cette revue nous a permis d’identifier les lacunes des écrits scientifiques et nous a inspiré la conception d’une étude transversale à deux temps de mesure qui fut réalisée chez 48 patients SDRC et LCPC, présentant des douleurs d’origine neuropathique aux jambes, recrutés dans trois établissements. Deux visites furent réalisées (neurostimulateur activé vs désactivé) dans un ordre randomisé. Les TSQ comprenaient 9 tests ayant pour but l’évaluation de seuils de détection (froid, chaleur, toucher, vibration), de seuils douloureux (froid, chaleur, pression), ainsi que l’évaluation de l'allodynie mécanique et de la sommation temporelle. Les TSQ ont été répétés à chacune des visites en suivant un protocole standardisé. Trois sites ont été testés : le membre le plus douloureux couvert par les paresthésies induites par la SSM (cible), le membre contralatéral et le membre ipsilatéral au membre cible. Nos données montrent que la SSM tonique, bien qu’efficace pour soulager la douleur chronique neuropathique, ne semble pas interférer avec la perception de stimuli thermiques et mécaniques, de même qu’avec la perception de la douleur aiguë. Ces résultats suggèrent que la théorie du portillon n'est pas suffisante pour expliquer le mécanisme d'action de la SSM qui modulerait plutôt une voie neuronale différente de celle de la douleur aiguë. En plus des données quantitatives collectées lors de cette étude, 630 observations qualitatives de phénomènes sensoriels évoqués positifs et négatifs ont été recueillies de façon anecdotique (c.-à-d. qu'aucune procédure normalisée n'a été utilisée pour recueillir ces données). Nous avons classé ces observations à l'aide des définitions reconnues par l'International Association for the Study of Pain et de l'Encyclopedia of Pain. Nous avons également donné des exemples de questions qui pourraient servir à la standardisation de collecte de données qualitatives pendant les TSQ. Ces résultats sont présentés au Chapitre 4 sous forme de lettre à l’éditeur, en tant que document compagnon à l’étude TSQ présenté au Chapitre 3. En conclusion, les mécanismes d’action de la SSM tonique ne semblent pas influencer les perceptions sensorielles contrairement à ce que propose la théorie du portillon, et ce malgré la présence de paresthésies. La mise au point d’une approche de recherche mixte, comprenant des volets quantitatif et qualitatif, pourrait faciliter le suivi des anormalités sensorielles causé par la douleur chronique en fonction des différents paramètres de la SSM, tels que l’état du neurostimulateur (activé vs désactivé) et le mode de stimulation (tonique, burst, haute-fréquence, haute-densité).

Identiferoai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/67726
Date04 February 2021
CreatorsBordeleau, Martine
ContributorsPrud'homme, Michel, Cantin, Léo
Source SetsUniversité Laval
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
Typethèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat
Format1 ressource en ligne (xv, 151 pages), application/pdf
Rightshttp://purl.org/coar/access_right/c_abf2

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