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L'altération filmique : pour une expression écocentrique de la nature

Notre thèse s’intéresse à des pratiques expérimentales et contemporaines du cinéma qui explorent la matière de l’image cinématographique (argentique ou numérique) via des altérations visuelles. Les œuvres sélectionnées supposent un travail de captation, d’enregistrement d’espaces naturels, produit en amont de l’expérimentation matérielle. Les textures et les effets visuels représentent le point de départ de nos analyses filmiques ainsi que de nos recherches théoriques, dont l’altération représente le cœur battant. Nous réfléchissons un ensemble d’œuvres matérialistes de nature, exprimant la nature par l’intermédiaire de la matière cinématographique, en leur adressant la question suivante : comment le cinéma se ferait-il l’expression écocentrique de la nature ? En replaçant ces œuvres dans notre contexte environnemental, nous questionnons aussi l’engagement écologique qu’elles suscitent : que peut exprimer le cinéma de notre nature anthropocène ? Comment adresse-t-il ces enjeux naturels, environnementaux ? Réciproquement, nous interrogeons aussi l’influence des espaces naturels filmés dans cette expression : comment leurs caractéristiques esthétiques, leur topographie, leur état actuel, conditionnent-ils cette expressivité cinématographique ? À ces questions, le postulat tenu est le suivant : les altérations visuelles de l’image en mouvement développent une expression plus directe de la nature, une mise en présence. L’expérimentation altérante de certaines caractéristiques du cinéma (mouvement, couleur, durée) accorde cette expression médiale sensorielle à la nature filmée qui propose d’en faire l’expérience, de façon sensible. Elle s’appuie sur la sensorialité et l’esthétique initiales de ces espaces naturels, que les artistes démultiplient à travers les altérations. Cette expression naît donc de la complémentarité entre les potentiels esthétiques des lieux naturels filmés et de ceux du cinéma.
Cette expressivité de la nature se constitue selon nous à travers trois principales actions altérantes, chaque film en présentant au moins l’une d’entre elles : 1- les altérations de l’image décrivent les espaces filmés ; 2- elles composent un milieu à/dans l’image, un milieu à la fois naturel et filmique (s’appuyant sur les caractéristiques de la nature filmée et sur les possibilités du média) ; 3- elles renouvellent l’attention à la nature, en sensibilisant notamment à sa dimension anthropocène. L’altération de l’image témoigne donc de notre expérience vécue de la modification d’environnements en captant leurs transformations et en en figurant la trace visible (l’altération). Présenter, par l’image altérée, l’actualité de cette nature contemporaine soulève ainsi les enjeux complexes et pluriels du contexte qui a fait advenir cet état dégradé de la nature. L’espace de l’image travaillé par l’altération renvoie métaphoriquement à celui que nous occupons dans le monde naturel, et à la façon dont nous l’investissons (à l’altération que nous engendrons dans ces espaces). Une expression écocentrique de la nature en ressort et nous sensibilise, nous engage dans sa condition dégradée, ruinée. / Our thesis focuses on experimental and contemporary cinema practices that explore the materiality of the cinematographic image (analog or digital cinema) via visual alterations. The artworks selected presuppose an effort of capturing and recording natural spaces, produced upstream of material experimentation. Textures and visual effects are the starting point for our filmic analysis and theoretical research, of which alteration is the beating heart. We reflect on a range of materialist artworks of nature, expressing nature through the medium of cinematic material, addressing the following question to them: how can cinema become the ecocentric expression of nature? By placing these artworks in our environmental context, we also question the ecological commitment they engender: what can cinema express about our anthropocenic nature? How does it address these natural, environmental issues? Reciprocally, we also question the influence of the natural spaces filmed in this expression: how do their aesthetic characteristics, their topography, their current state, condition this cinematic expressivity? To these questions, our postulate is the following: visual alterations to the moving image develop a more direct expression of nature, a mise en présence. The altering experimentation of certain characteristics of cinema (movement, color, duration) grants this sensory medial expression to the filmed nature which offers to experience it, in a sensitive way. It draws on the initial sensoriality and aesthetics of these natural spaces, which the artists multiply through alteration. This expression is born of the complementarity between the aesthetics potentials of filmed natural sites and those of cinema.
According to us, this expressiveness of nature is constituted through three main altering actions, with each film presenting at least one of them: 1- the alterations to the image describe the filmed spaces; 2- they compose a setting in/within the image, a setting that is both natural and filmic (drawing on the characteristics of the nature filmed and on the possibilities of the media); 3- they renew our attention to nature, notably by raising awareness of its anthropocenic dimension. The alteration of the image therefore bears witness to our lived experience of changing environments by capturing their transformations and representing their visible trace (alteration). Presenting the actuality of contemporary nature through altered images raises the complex and plural issues of the context that brought about this degraded state of nature. The space of the image worked by alteration metaphorically refers to the space we occupy in the natural world, and to the manner we invest it (to the alteration we generate in these spaces). An ecocentric expression of nature emerges, sensitizing us and engaging us in its degraded, ruined condition.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/32773
Date01 1900
CreatorsDelignou, Cécile
ContributorsHabib, André
Source SetsUniversité de Montréal
Languagefra
Detected LanguageFrench
Typethesis, thèse
Formatapplication/pdf

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