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Violences criminelles et contexte démocratique : la politique des imaginaires de la punition au Brésil

Depuis les années 1980, le processus de retour à la norme démocratique au Brésil s’accompagne d’une augmentation inédite des violences criminelles et policières. La présente thèse procède à l’analyse de cette problématique de la violence à partir d’une étude des dimensions politiques des imaginaires de la punition au Brésil. Un constat empirique motive notre démarche : bien que la société brésilienne n’ait jamais connu de taux d’incarcération aussi élevés que depuis la transition démocratique, l’exigence d’une lutte contre l’ « impunité » des criminels et délinquants occupe désormais une place prépondérante dans les discours médiatiques et politiques. Notre thèse souligne les limites d’une littérature qui aborde cette violence de manière contingente aux « dysfonctionnements institutionnels » des appareils juridiques et sécuritaires d’une « nouvelle » démocratie. La démarche adoptée dans notre étude s’inscrit plutôt dans une seconde littérature qui souligne la nécessité de tenir compte, en Amérique latine, d’une histoire de la violence inscrite dans les hiérarchies et discours qui se trouvent en tension avec le contenu égalitaire des institutions formelles et perdure malgré les changements de régimes politiques. En dialogue avec cette littérature, notre thèse propose la notion d’« imaginaire pénal » comme moyen d’étudier les significations sociales de la punition qui prévalent aujourd’hui au Brésil et donnent sens à la violence. Cette notion émerge d’une lecture critique du champ de la « sociologie de la punition », ainsi que des écrits du philosophe contemporain Cornelius Castoriadis sur la dimension politique des imaginaires sociaux.

À partir d’une démarche généalogique inspirée de Foucault, la thèse démontre dans un premier temps que la formule de la « lutte contre l’impunité » s’enracine dans un imaginaire pénal inégalitaire dont il est possible de retracer l’émergence au moment même où les idéaux d’égalité sont institués par l’avènement de la modernité politique et de la Première République (1889-1930). Dans un second temps, nous démontrons que, depuis le retour à la norme démocratique, cet imaginaire pénal inégalitaire se matérialise à travers l’apparente neutralité d’un « discours sécuritaire » qui cautionne pourtant l’adoption de mesures plus punitives et d’une action policière plus violente à l’encontre de certains secteurs des populations marginalisées et paupérisées. Ce discours sécuritaire est exposé à travers l’analyse actantielle des récits médiatiques et politiques de deux des plus importants événements de violence étatique depuis la fin du régime militaire : le « Massacre de Carandiru » de 1992 et les « Crimes de mai » de 2006 à São Paulo. Finalement, l’une des principales contributions de la thèse est de démontrer l’émergence au sein des quartiers populaires d’un contre-discours qui subvertit le présupposé d’un appui populaire à la violence policièreles ainsi que les principales catégories du discours sécuritaire.

Identiferoai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/34843
Date January 2016
CreatorsDécary-Secours, Benoit
ContributorsDoran, Marie-Christine
PublisherUniversité d'Ottawa / University of Ottawa
Source SetsUniversité d’Ottawa
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeThesis

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