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Les jeux du dissemblable : folie, marge et féminin en littérature haïtienne contemporaineMartelly, Stéphane 02 1900 (has links)
Depuis la deuxième moitié du XXe siècle et le tournant du millénaire, pourquoi se multiplient des figures de la folie et du féminin dans le paysage littéraire haïtien ? En remarquant les grandes tendances qui font coïncider l’expression de la catastrophe, de la défaite du sens et l’apparition de personnages et de figures féminins majeurs dans des œuvres de tous genres, mon interrogation porte sur la folie, la marge et le féminin dans la littérature haïtienne contemporaine en tant qu’expressions concourantes de la dissemblance. Je me penche ainsi, dans des œuvres marquantes, sur le jeu rhétorique des postures de la dissemblance et la manière dont elles pointent depuis le texte vers un au-delà de l’œuvre, soit ce qui en elle indique l’ «espace ménagé» de sa propre faillite ainsi que le travail de la lecture et de la création. Pour cela, il a fallu, à partir des limites (de l’œuvre, de la norme), construire une réflexion capable d’aménager aussi l’espace de sa propre contestation.
Dans le premier chapitre, à partir du récit fondateur « Folie », de Marie Chauvet, je pose le problème de la folie en me penchant sur les configurations inaugurales qui me semblent mettre la scène du littéraire contemporain haïtien. J’en profite pour préciser l’approche rhétorique qui me permettra d’aborder les textes littéraires, tout en réfléchissant sur les enjeux théoriques posés par une lecture de la folie comme absence d’œuvre. En m’appuyant sur Chauvet et sur les travaux de Felman, je définis les modalités d’une lecture impliquée.
Dans le second chapitre, je brosse un portrait complexe du contemporain haïtien, tel qu’il est médié et rendu à travers les « anthologies » essentielles de Davertige et de Frankétienne. Ces deux œuvres sont l’occasion de poursuivre une interrogation sur les limites en remarquant les formes et les enjeux mobilisés dans le littéraire par les élaborations de la marge, de la mémoire traumatique et de la folie. Une telle approche est aussi l’occasion d’une réflexion de fond sur le contemporain haïtien, abordé d’emblée comme panorama et comme problème façonné et façonnant des sujets d’écriture.
Enfin, dans le troisième chapitre, je me penche sur les filiations larvées qui permettent aux configurations précédemment décrites de persister, alors que le féminin, comme dissemblance, négocie sa place du côté de la marge ou de la folie, dans les textes plus récents de Jan Dominique et de Lyonel Trouillot. Les réflexions que je propose sur les destinations, sur l’œuvre impossible ou absente (Foucault) me permettent de distinguer les processus de différenciation spécifiques de la marge et de la folie, mais surtout d’apercevoir, au cœur du texte littéraire, la folie comme l’absence essentielle où se risque et se joue la création.
Le dissemblable devient alors cet objet fuyant d’une lecture impliquée dans laquelle, le regard critique s’adossant à une écriture littéraire chargée d’en interrompre systématiquement le flux, constitue en effet ce « moment insolite de la théorie» (Felman), qui, dévoilant son propre jeu rhétorique, maintient la théorie en échec tout en la faisant parler. / Since the second half of the twentieth century and the turn of the millennium, why have representations of madness and the feminine proliferated in the Haitian literary landscape? Whilst reflecting on the broad tendencies that brought together the expression of catastrophe, the unravelling of meaning and the emergence of important feminine characters and figures in works of all genres, I will question madness, margins and the feminine in contemporary Haitian literature as concurring expressions of dissimilarity. Examining Haitian literary works, I want to propose a reading on the rhetoric postures and performances of dissimilarity and the manner in which they point towards an outsideness of literature: the unspeakable “thing” that signals – from within – the (im)possibility of the text, the (im)possibility of reading and creation. To achieve this purpose, I have chosen to construct a reading on limits (of the text, of the norm) that also considers its own contestation.
Chapter one is built around the novel « Folie » by Marie Chauvet. It addresses the topic and rhetoric of madness while taking note of important aesthetic configurations that I suggest set the stage for contemporary Haitian literature. I also address methodological problems arising when “reading” madness as “absence d’œuvre” (Foucault). Intersecting Chauvet’s writing with the theoretical contributions of Felman, I specify my approach as a compromised or involved reading.
In the second chapter, I paint the portrait of the contemporary Haitian general context using the essential anthologies of Davertige and Frankétienne. These two works allow me to address the notion of “limits” while considering the forms and issues created by the fabrications of margins, traumatic memory and madness. I therefore approach the contemporary Haitian context as a complex panorama and as a problem, both shaped by and shaping literary subjectivities.
Finally, in the third chapter, analysing the more recent texts of Jan Dominique and Lyonel Trouillot, I reflect on hidden genealogies that perpetuate previously identified configurations when the feminine, as dissimilarity, negotiate a place on the side of margins or madness. The reflection I propose on destinations, the absent or impossible oeuvre allows me to differentiate the specificities of margins and madness, and most importantly, to glimpse, while reading the literary text, at the essential absence where creation risks itself.
Thus, dissimilarity becomes the fleeting object of my compromised reading. A critical reading, which compromises itself with creative writing, in a decisive attempt to subvert theory, forcing it to unveil its own rhetorical play, to reveal its possible failure while making it eloquent.
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