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Les dommages exemplaires en droit québécois : instrument de revalorisation de la responsabilité civileRoy, Pauline 10 1900 (has links)
Thèse numérisée par la Direction des bibliothèques de l'Université de Montréal. / Cette thèse est consacrée à l'étude de l'introduction des dommages exemplaires
en droit civil québécois. L'introduction de ce type de dommages a pour effet de
remettre en question un principe traditionnellement perçu comme fondamental en droit
contemporain de la responsabilité civile, soit sa fonction essentiellement réparatrice. Par
notre étude, nous voulons démontrer que la reconnaissance de cette sanction civile
s'inscrit dans le processus d'évolution du droit de la responsabilité civile : elle permet
de revaloriser la fonction morale et sociale qu'il doit remplir pour assurer, en
complémentarité avec le droit pénal, la protection de l'ordre juridique privé et des
valeurs sociales contemporaines qu'il soutend. Nous postulons toutefois que la
légitimité des dommages exemplaires est tributaire de leur capacité de remplir une
fonction essentiellement préventive, à l'exclusion de toute velléité punitive.
Le législateur a choisi d'introduire ce recours sur une base sectorielle, par le biais de lois ayant une portée variable sur le droit de la responsabilité civile et en prévoyant des conditions d'ouverture différentes. Il importe donc de vérifier si ces interventions législatives, à première vue éclatées, s'inscrivent dans la logique de la fonction préventive de la responsabilité civile. Nous postulons que, de façon générale, ces interventions sectorielles satisfont cette exigence. Toutefois, les tribunaux qui disposent d'un important pouvoir discrétionnaire dans l'application de ces mesures, ne sont pas parvenus à établir les paramètres qui permettent de révéler la cohérence législative et d'assurer la fonction préventive de ces dommages.
Ni l'exégèse des textes de lois introduisant ce recours, ni l'analyse traditionnelle de la doctrine et de la jurisprudence qui les interprètent ne peuvent permettre d'atteindre ces objectifs. Ces analyses révèlent qu'une réflexion théorique s'impose. Les lacunes observées, tant dans l'application des conditions d'ouverture de ce recours que dans le processus d'évaluation des dommages exemplaires, ne résultent pas seulement des difficultés inhérentes à l'inteq^rétation des dispositions législatives. Elles témoignent surtout d'une grande réticence à l'égard de la reconnaissance de cette sanction civile. La première partie de notre thèse est consacrée à la justification théorique de ce changement. Nous abordons cette question, d'abord, dans une perspective historique de révolution du droit de la responsabilité civile selon la tradition civiliste. Nous nous intéressons ensuite aux origines et à révolution parallèle que ce recours a connu en Angleterre et dans les provinces de Common Law. La compréhension de ces demarches distinctes jette un éclairage nouveau sur la perception de la justification théorique des dommages exemplaires en droit civil contemporain. Même si la responsabilité civile s'est progressivement affranchie du droit pénal, elle ne s'est pas départie pour autant du rôle normatif qu'elle doit remplir pour assurer l'ordre juridique privé. C'est pour répondre aux nouveaux impératifs d'indemnisation des victimes que la fonction morale de la responsabilité civile fondée sur la faute s'est estompée. En autorisant l'imposition d'une sanction civile aux personnes dont le comportement fautif porte atteinte à l'ordre juridique privé, le législateur contribue à revaloriser la fonction préventive de la responsabilité civile. Quant à l'analyse de révolution des dommages exemplaires en Common Law et des études critiques de cette évolution, elles démontrent qu'en confondant la fonction préventive et la fonction punitive, le droit canadien des provinces de Common Law n'est pas parvenu à dégager de principe général qui en justifie l'attribution. Malgré le fait que le législateur ait récemment affirmé que les dommages exemplaires remplissent une fonction essentiellement préventive, l'analyse de la jurisprudence révèle que le droit québécois se heurte aussi à cet écueil. En effet, à l'exception des lois qui obligent le tribunal à imposer cette sanction civile, l'interprétation des conditions d'ouverture et la détermination des circonstances qui en justifient l'attribution révèlent une certaine incompréhension de la justification de ce recours et une tendance à exercer cette discrétion judiciaire de façon plus ou moins arbitraire. Or, les tribunaux ne peuvent exercer leur pouvoir discrétionnaire de la même manière dans toutes les situations et surtout pas sans motiver leurs décisions, comme ils ont tendance à le faire présentement. C'est seulement dans la mesure où l'objectif poursuivi par la loi est compromis par le comportement illicite et que ce comportement est adopté dans le cadre des activités courantes de l'agent fautif, que les dommages exemplaires peuvent remplir une fonction préventive qu'il est utile et équitable d'imposer une telle sanction. C'est en exerçant ce pouvoir discrétionnaire d'une façon cohérente et explicite que la jurisprudence québécoise contribuera à intégrer adéquatement le recours en dommages exemplaires et à conscientiser les personnes dont le comportement fautif peut être valablement dissuadé.
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