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Une ethnographie sociolinguistique de deux classes multiculturelles à Bruxelles

Declercq, Karolien 15 December 2008 (has links)
Pour certains élèves, l’accès au standard est conditionné par la réconciliation de la norme scolaire et de leurs appartenances identitaires. La prise en compte de ces dernières à l’école est donc essentielle. Or, leur prise en compte présuppose leur connaissance. D’où l’importance de recherches sur les pratiques langagières des jeunes et plus particulièrement sur leur propre façon de les percevoir. Cette ethnographie sociolinguistique, foncièrement qualitative, s’inscrit dans le cadre de l’action de recherche concertée, intitulée La régulation de l’hétérogénéité linguistique en contexte scolaire multiculturel à Bruxelles (UCL, 2004-2009). Elle concerne deux classes d’élèves, hétérogènes d’un point de vue ethnolinguistique, scolarisés en cinquième année dans deux écoles, professionnelle et technique, dites ‘défavorisées’. La première ressortit à la Communauté française de Belgique. La langue d’instruction y est le français et il partage l’univers scolaire avec des langues d’origine immigrée. Dans la deuxième école, au moins trois langues entrent en contact. Par son appartenance à la Communauté flamande, la langue de la scolarisation y est le néerlandais et l’inscription massive de francophones issus de l’immigration dans le système scolaire flamand explique la présence du français et d’autres langues. Les résultats d’une année d’observations sur le terrain dévoilent que la complexité des référents identitaires, a priori associés aux élèves, fait clairement l’objet d’une sous-estimation. Les jeunes ne disposent pas d’une langue, mais d’un répertoire de langues et de variétés auxquelles ils associent des fonctions diverses, dans des contextes d’énonciation concrets. Or, leur maîtrise n’en est que partielle. Ils ne maîtrisent pas l’ensemble de ces façons de parler mais uniquement certaines composantes prototypiques et les significations macrosociales qu’elles véhiculent et qu’ils savent exploiter à des moments critiques. La diversité de leur répertoire ne s’appuie donc que sur une représentation approximative de ces variétés et de leur conditions d’emploi. Leur maniement contrôlé échoue. Les élèves n’atteignent pas le niveau requis en langue standard pour avoir toutes les chances d’ascension sociale et professionnelle. Les normes qu’ils se fixent sont des constructions locales, résultant de l’interaction et de la négociation permanentes entre leurs identités langagières et les normes implicites présupposées de l’école. Elles fonctionnent comme des compromis identitaires. Vu leur portée très locale, elles ne sont validées que dans la bulle protectrice de l’école. Ailleurs, elles font l’objet de sanctions sociales. C’est cette réalité que l’école se doit de prendre en compte comme une ressource afin de trouver des méthodes de travail qui convertissent l’hétérogénéité des élèves en avantage plutôt qu’en handicap. L’école se doit de munir les élèves des outils nécessaires pour fonctionner dans un univers normatif, tout en cultivant la richesse de la langue sous ses diverses manifestations, orales et écrites.

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