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Affiches de guerre, guerre d'affiches : l'évolution des nationalismes canadiens-français et Irlandais entre 1914-1918Dion, Aimée 02 November 2022 (has links)
Ce mémoire explique comment les représentations visuelles contenues dans les affiches extériorisent la mutation des cultures de guerre des sociétés canadienne-française et irlandaise pendant la Première Guerre mondiale. Nous montrons l'impact du conflit mondial sur les nationalismes de ces sociétés. Les affiches incarnent des marqueurs de l'identité nationale de ces sociétés minoritaires appartenant à l'Empire britannique. Les phénomènes sociohistoriques au Canada français et en Irlande sont documentés par les affiches de guerre entre 1914 et 1918. L'analyse comparative de ces affiches matérialise l'évolution nationaliste de ces sociétés sous l'impact des exigences de la guerre. Nous postulons qu'il y a convergence des cultures de guerre canadienne-française et irlandaise jusqu'en 1916. Entre 1914 et 1915, les organes de propagande de ces sociétés instrumentalisent les tendances nationalistes modérées préexistantes pour justifier la mobilisation à la guerre de l'Empire. Les expériences nationalistes de ces sociétés étaient similaires à l'aube du XXe siècle et pendant la première moitié de la guerre. À partir de 1916, ces trajectoires parallèles divergent en raison du contexte de guerre. En réaction à la crise de la conscription, la culture de guerre canadienne-française se nationalise à partir de 1916. En appropriant la guerre comme conflit mené au nom de l'ensemble des Canadiens, ces affiches renforcent le nationalisme autonomiste. La propagande présente le Dominion du Canada comme État belligérant autonome qui devait défendre ses intérêts nationaux par la guerre. À l'inverse en Irlande, la culture de guerre républicaine refuse la mobilisation à la guerre. Les affiches irlandaises contestataires étaient alimentées par les expériences de guerre du Rising, du Home Rule, mais surtout de la conscription qui ravive le mythe d'oppression historique par la Grande-Bretagne. Sous la forme de l'autonomisme au Canada et de l'indépendantisme en Irlande, l'évolution nationaliste et l'émancipation politique de ces sociétés sont imputables au contexte de guerre qui catalyse une distanciation de ces nations avec l'Empire britannique. / This thesis explains how the visual representations materialized by war posters express the mutation of French-Canadian and Irish war cultures during the First World War. We explain the impact of the global war on the nationalist trajectories of these minority societies belonging to the British Empire. As posters embody markers of national identity, the sociohistorical phenomena in French Canada and Ireland are therefore documented by war posters produced between 1914 and 1918. The comparative analysis of these posters materializes the nationalist evolutions of these societies through their reactions to the demands of total war. We postulate that French-Canadian and Irish war cultures converged until 1916. Between 1914 and 1915, the propaganda organizations exploited the pre-existing moderate nationalisms to justify French-Canadian and Irish mobilization towards the Empire's war. These nationalist experiences were similar throughout the early 20th century and during the first half of the war. However, these parallel trajectories diverged in 1916 due to events of the war. In response to the conscription crisis, French-Canadian war culture became nationalized after 1916. These posters strengthened Canadian autonomist nationalism by appropriating the war as a conflict waged in the name of all Canadians. As told by Canadian propagandists, Canada emerged as an autonomous belligerent state that had to defend its national interests through war. Conversely, the Republican war culture refused the Irish's participation in what came to be perceived as England's war. Radical nationalist posters were fueled by the war experiences of the Rising, Home Rule, but above all conscription, which revived the myth of historical oppression by Great Britain. Perceived through the achievement of autonomism in Canada and independence in Ireland, the nationalist evolution and political emancipation of these nations was attributable to the context of war which catalyzed a distancing from the British Empire.
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La construction du patrimoine du Canada entre reconnaissance publique et valorisation touristique : le rôle de la Commission des lieux et monuments historiques et des organismes de tourisme canadiens (1919-1956)Dutour, Juliette 16 April 2018 (has links)
Marquer les lieux inconnus, ceux dont l’accès est difficile, est une pratique humaine courante. C’est un geste qui marque et qui ancre la trace du passage d’un homme seul ou d’une expédition entière, à la fois dans l’espace - les tas de pierres sont visibles souvent de loin - et sur le territoire - ces « monuments » localisent la plupart du temps le point le plus lointain sur une distance parcourue. Construit en 1910 par un explorateur canadien en voyage dans l’Arctique, ce cairn est l’ancêtre de ceux que la Commission des lieux et monuments historiques du Canada érige à travers le pays à partir des années 1920. Cependant, contrairement à eux, ce cairn ne porte pas de plaque et, sans elle, son rôle est d’autant plus simple : il vient signifier le fait que des hommes - au moins trois ici : les deux qui figurent sur la photographie et celui qui la prend - ont réussi à atteindre ce point extrême du Canada. En plus d’être une marque de revendication territoriale, ce monticule de grosses pierres ramassées à proximité du site, autour duquel ces hommes posent fièrement, est une manière pour eux de dire qu’ils ont été « là », qu’ils ont réussi à atteindre leur objectif et, par conséquent, qu’ils ont obtenu le droit de marquer le territoire afin que la mémoire de leur passage y soit inscrite. Sans plaque commémorative, sans noms ni dates gravés dans la pierre, la mémoire de leur passage est vouée à rester anonyme : si d’autres hommes viennent à passer dans la zone, ils sauront que des hommes les ont précédés, mais ils n’apprendront leurs noms et le détail de leurs aventures que s’ils connaissent l’histoire des expéditions qui ont eu lieu dans la région. Dans le processus de reconstitution de l’histoire de la région, le cairn de 1910 n’est donc pas d’une très grande aide, les seules informations mentionnées directement sur la photographie indiquant seulement : « cairn construit au cours de mon dernier voyage au fond de l’anse Adams, où j’ai laissé une marque. Adams Sound, octobre 1910. Voyage de l’Arctique1 ». Les détails de l’expédition au cours de laquelle cette photographie a été prise sont aujourd’hui connus. Le site d’Arctic Bay est situé sur la côte nord de la baie Adams, dans la partie nord de l’île de Baffin, au Nunavut. La région est habitée par des nomades inuits depuis 5000 ans et elle tire son nom d’un baleinier européen, l’Arctic, qui, en 1872, navigue tout près du site2 . Cette photographie est prise lors de la troisième expédition du capitaine Jacques Bernier qui, en 1910, réussit à passer l’hiver sur le site. Le cairn, construit en octobre 1910, célèbre ainsi la réussite de l’installation d’un campement temporaire dans cette région qualifiée de « désert arctique ». Quelques années plus tard, les responsables de la Commission des lieux et monuments historiques du Canada, s’inspirant de cette tradition de marquage des lieux visités par les explorateurs canadiens, reprennent le principe du cairn. Celui-ci représente donc une forme ancienne, traditionnellement liée aux opérations de conquête territoriale et d’affirmation politique réalisées par les premiers Canadiens. La reprise de cette forme est une manière, pour la Commission, de revenir à une tradition typiquement canadienne : de cette manière, pour célébrer l’histoire du pays, elle fait toujours, de manière implicite, référence à l’œuvre des premiers Canadiens, et elle revient sans cesse aux origines du pays. Les membres de la Commission ajoutent au cairn un média supplémentaire, à la fois vecteur de communication et de transmission de l’histoire : les plaques. C’est le début de la valorisation publique de l’histoire par le gouvernement fédéral, et la mise en place d’un programme de commémoration historique fortement lié au territoire. Ces plaques et leurs mémoriaux ont un très fort impact sur le territoire : en venant se superposer aux sites historiques qu’ils désignent, ils créent un double discours dans l’espace. En effet, en acquérant petit à petit une autonomie non seulement de forme - en tant que monuments reliés aux sites mais physiquement distincts d’eux - mais aussi de fond - ils deviennent, au fil du temps, des monuments à part entière, et se détachent des sites dont ils racontent l’histoire. Le patrimoine canadien est d’abord composé de plaques commémoratives ; c’est de cette manière que l’histoire se matérialise dans un premier temps dans l’espace canadien. En insérant des plaques sur le territoire, les autorités fédérales ont longtemps le sentiment de recréer des lieux disparus, par le simple fait de décrire le site et d’en interpréter l’histoire. Durant plus de trente ans, elles semblent ainsi préférer « recréer » des personnages, des événements passés et des lieux disparus - des bâtiments ruinés ou en très mauvais état - par l’entremise de ces plaques, plutôt que de s’occuper des sites bâtis encore intacts. La commémoration passe avant la conservation : l’insertion dans l’espace des plaques commémoratives ainsi que la composition de leurs textes occupent entièrement la Commission des lieux et monuments historiques pendant cette période. Cependant, outre leur rôle assumé de matérialisation de l’héritage, plusieurs interrogations subsistent quant à leurs fonctions. À quoi servent leurs textes qui ont pour ambition de résumer en quelques phrases des événements de l’histoire du pays ? Leur rôle est-il de raconter et de diffuser l’histoire à la population canadienne et aux touristes étrangers, ou d’investir et de donner un sens à l’espace ? Et celles-ci ont-elles le pouvoir d’assurer la protection d’un site en maintenant les pilleurs et les visiteurs indésirables à distance ?
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