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Le concept de technologie à l'échelle des molécules-machines. Philosophie des techniques à l'usage des citoyens du nanomonde / The concept of technology at the scale of molecular machines. A philosophy of technology for the citizens of the nanoworld

Loeve, Sacha 21 September 2009 (has links)
Que peut bien signifier « technologie » dans un champ de recherche aussi polymorphe que les nanotechnologies ? Cette question est rarement soulevée, tantôt noyée dans l’étude prospective des « impacts » futurs des nanotechnologies, tantôt évacuée au nom de la distinction entre « nanosciences » et « nanotechnologies », la première désignant la recherche en amont, la seconde, des applications purement utilitaires. La question se pose au vu des recherches dans le domaine des machines moléculaires artificielles : les pratiques mises en œuvre dans un petit nombre de laboratoires permettent de repenser la technologie pour lui associer des significations cognitives et culturelles qui font alternative aux discours majoritaires des nanotechnologies. La question sera abordée en mobilisant un concept de technologie hérité de Gilbert Simondon, qui caractérise les objets techniques par les processus d’individuation de leurs schèmes fonctionnels. D’un point de vue épistémologique, le concept de « technologie » dans « nanotechnologies » désigne une gamme de pratiques de design pas nécessairement utilitaires et, indissociablement, une activité cognitive non prioritairement théorique. La « technologie » à l’échelle nano produit des connaissances traversant les champs disciplinaires de la chimie, de la biologie et de la physique, mais elles ne sont pas directement au service de la résolution de problèmes théoriques posés dans le cadre d’un paradigme scientifique donné. Les nano-objets ne sont ni de purs faits naturels, ni de purs artéfacts, mais des machines épistémiques inséparables des dispositifs mis en œuvre pour les individualiser. D’un point de vue culturel, la technologie niche au cœur de l’activité scientifique mais ne se réduit ni à la science ni à ses significations sociales. La thèse s’articule autour de trois registres d’analyse distincts. Premièrement, une revue des discours d’accompagnement s’attache à décrire les stratégies rhétoriques et iconographiques de définition et de promotion des nanotechnologies, ainsi que le rôle qu’y jouent spécifiquement les molécules-machines.Deuxièmement, des analyses des pratiques instrumentales montrent qu’il existe différentes trajectoires présidant à l’émergence des molécules-machines : en chimie de synthèse, en biophysique et en microscopie en champ proche. Toutefois, celles-ci tendent à se recouper et à et se stabiliser dans un régime de production et de diffusion d’images qui ne sont plus des « représentations de la nature » mais des « images-objets » ; nous dégageons les implications épistémologiques et ontologiques de ce régime des images inédit. Troisièmement, nous nous appuyons sur une série d’entretiens menés lors d’enquêtes en laboratoire pour décrire en détail les pratiques dédiées à la réalisation, l’étude, la mise en image, la simulation et la manipulation de ces molécules-machines. Le but est de dégager les problèmes conceptuels que posent leurs démarches de design et les valeurs épistémiques qui transparaissent dans les relations entretenues par les chercheurs à ces objets. / What can be the meaning of technology in the multifacet reearch area of nanotechnology? The question has not often been raised, either because of the prevailing concern with the impacts of future applications or because of the prevalence of the conventional distinction between upstream basic research (nanoscience) and practical or utilitarian applications (nanotechnology). The question is raised by the observation of laboratory practices in the domain of artificial molecular machines: they suggest that the term technology can be given precise cognitive and cultural meanings which deeply differ from the meanings conveyed by most discourses about nanotechnology. The question will be addressed with the help of the concept of technology forged by Gilbert Simondon, who characterized technological objects by a functional scheme and a process of individuation. From an epistemological standpoint, the concept of technology in nanotechnology refers to a spectrum of practices of design which are not necessarily utilitarian and to a cognitive activity which is not primarily theoretical. Technology at the nano scale generates knowledge at the cross-road of disciplines such as chemistry, biology and physics which is not directly issued from a puzzle solving activity in scientific paradigms. Nano-objects are neither pure natural facts nor human artefacts; they are epistemic machines which cannot be separated from the devices used for individualizing them. From a cultural standpoint, technology lies at the heart of scientific activity but cannot be reduced either to science or to societal meanings. The dissertation develops three different levels of analysis. 1) A review of the discourses accompanying nanotechnology programs points the rhetorical and iconic strategies used for defining and promoting nanotechnology, and more specifically the role of molecular machines and their images. 2) A fine-structure analysis of instrumental practices in nanoresearch identifies the various trajectories which lead to the emergence of molecular machines (in synthetic chemistry, in biophysics, and near-field probe microscopy). It shows how the various routes tend to converge and stabilize towards a regime where images are no longer produced and circulated as representations of nature and rather as image-objects. 3) On the basis of a series of interviews conducted in research laboratories, we provide a detailed description of practices dedicated to making, imaging, simulating and manipulating molecular machines. The aim is to identify the concepts and epistemic values underlying the interaction between nanoscientists and their molecular machines.
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Le Nanomonde des chercheurs. Analyse sociologique des pratiques et des discours sur l’instrumentation en nanotechnologies.

Richard, Sébastien 09 1900 (has links)
À l’avant-garde de l’innovation scientifique actuelle, la recherche en nanotechnologies s’inscrit dans une promesse de conquête d’une nouvelle dimension : le Nanomonde. Défini par un critère de dimensionnalité incluant l’ensemble des objets entre 1 et 100 nanomètres et par l’application des lois de la physique quantique à l’analyse des phénomènes, ce nouveau territoire de la connaissance sert de vitrine sociale aux promesses de transformation radicale de notre compréhension de la réalité, à travers notamment la production d’objets « nanos » aux propriétés révolutionnaires, comme les nanotubes de carbone par exemple. Mais quelle est exactement la nature de cette dimension ? Comment est-elle définie, et qui, une fois les discours et les pratiques analysés, la contrôle et l’étudie ? À travers un terrain de recherche dans deux laboratoires de nanotechnologies et une série d’entretiens avec des chercheurs, j’ai analysé l’importance de l’instrumentation technique comme élément de structuration du Nanomonde, à la fois dans la pratique et dans les discours. À cet égard, le concept de pensée technique permet de rendre compte de la nature des aprioris à l’oeuvre dans le travail de recherche en nanotechnologies. En parcourant les différents travaux effectués en sciences humaines et sciences sociales sur les nanotechnologies, la place de l’instrumentation, si elle est évoquée comme un élément d’accessibilité pour rejoindre le Nanomonde, n’est que rarement considérée dans une perspective problématique. À travers l’analyse du discours réflexif des acteurs de la recherche sur leurs pratiques, il apparaît que l’instrumentation, bien plus que d’être un simple élément matériel du laboratoire, structure les relations inter-personnelles. Elle créée en effet un réseau d’interdépendance cognitive dans lequel chaque chercheur se situe en fonction de son expertise instrumentale, structurant les relations au sein des groupes de recherche. Ce partage cognitif, d’une façon d’établir des relations sociales, apparaît également comme un élément de détermination de la nature même des recherches et de la dimension particulière qu’est le Nanomonde. L’instrumentation est donc naturalisée comme une composante allant de soi de la « vie de laboratoire ». Pourtant, l’analyse des tentatives de contrôle du contexte de recherche et une discussion autour de l’efficacité du système technique déployé via l’instrumentation en nanotechnologies, souligne l’aspect auto-référentiel que prend le travail d’exploration du Nanomonde. Cet aspect de fermeture sur le système technique de l’instrumentation est mis en parallèle avec la façon dont les discours sur les nanotechnologies – à la fois internes et externes à la sphère scientifique – présentent les objets du Nanomonde et les recherches sur ces mêmes objets à travers leur aspect performatif qui ressortira particulièrement. En insistant sur les performances des produits de la recherche, les chercheurs et les promoteurs des nanotechnologies font du Nanomonde un espace de connaissance marchande, répondant à la logique propre au marché des idées néolibérales. Cependant, bien loin de correspondre à un enrichissement des expertises, ce modèle de marchandisation entraîne un appauvrissement de celles-ci, et une difficulté pour former les futurs chercheurs « nanos » de demain, chacun essayant de répondre à l’impératif technique de la performativité dans son discours et dans ses choix de recherches. L’analyse menée ici insiste donc sur l’idée que c’est selon un mode de pensée technique que le Nanomonde est exploré, conquis, et, finalement, exploité. / In the vanguard of the current scientific innovation, the research in nanotechnologies joins in a promise of conquest of a new dimension: the Nanoworld. Defined by a dimensionality criterion including all the objects between 1 and 100 nanometers and by the application of the laws of the quantum physics in the analysis of phenomenon, this new territory of knowledge is used as a social showcase for the promises of radical processing of our understanding of the reality, through in particular the production of "nano" objects displaying revolutionary properties, such as carbon nanotubes. But what exactly is the nature of this dimension? How is it defined, and who, once the speeches and practices have been analyzed, eventually controls it? Through a grounded research in two nanotechnologies laboratories and a series of interviews with researchers, I have analyzed the importance of technical instrumentation as a structuring element of the Nanoworld, both in practice and speeches. Furthermore, the concept of technical thought allows to report the nature of aprioris within the research work in nanotechnologies. By going through the various works made by humanities on nanotechnologies, the square of the instrumentation, if evocated as an element of accessibility to join the Nanoworld, is only rarely considered in a problematic perspective. Through the analysis of the reflexive speech of the research practitionners, it seems that the instrumentation, much more than being a simple material element of the laboratory, structures the interpersonal relations. It creates a network of cognitive interdependence where every researcher is situated according to his instrumental expertise. It structures the relations within the researchers’ group. This cognitive sharing is a way to establish social relationships, while being an element of determination of the nature of the researches on the Nanoworld. The instrumentation is thus naturalized as a granted component of "laboratory life". Yet, the analysis of the attempts of control of the research context and a discussion around the efficiency of the technical system of the instrumentation in nanotechnologies, the auto-reference aspect which takes the work of exploration of the Nanoworld becomes highlighted. This aspect of closure on the technical system of the instrumentation is parallel with the way the speeches on the nanotechnologies - both internal and external to the scientific sphere - present the objects of the Nanoworld and the researchs on these objects through their performative aspect. By insisting on the performances of the products of their research, scientists and developers of the nanotechnologies turn the Nanoworld into a dimension of merchandised knowledge, in the same logic as neoliberal market ideas. However, far from corresponding to an enrichment of the expertises, this model of merchandisation entails their impoverishment. Furthermore, a difficulty to train the "nanos" researchers of the future arised in the past few years. This double standard is obvious as a consequence of the technical imperative of the speech performativity and the choice of individual researchs. Thus, the analysis I conducted here insists on the idea that it is according to the technical way of thinking that the Nanoworld is investigated, conquered, and, finally, exploited. / Réalisé en cotutelle avec l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
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Le Nanomonde des chercheurs. Analyse sociologique des pratiques et des discours sur l’instrumentation en nanotechnologies

Richard, Sébastien 09 1900 (has links)
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