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Les réjouissances populaires en Amérique française et la construction d’identités sociales (1770-1870)Dumont, Mikael 08 1900 (has links)
Cette thèse porte sur les rôles sociaux des réjouissances populaires dans les communautés rurales francophones de l’Amérique du Nord entre les années 1770 et 1870. Elle aborde le sujet de la fête en dirigeant plus précisément son regard sur la festivité. L’objectif principal est de mettre en lumière comment les festivités, que nous appelons réjouissances populaires, influencent le fonctionnement des sociétés francophones nord-américaines. Quels rôles les réjouissances populaires jouent-elles dans la vie sociale des habitants de ces sociétés? Quels impacts ont-elles sur les identités individuelles et collectives? Conservent-elles les mêmes caractéristiques d’une société à l’autre ou s’adaptent-elles à des environnements et à des contextes différents? Comment se développent-elles et évoluent-elles au fil du temps? Quels sont les éléments qui influencent leur évolution? Afin de répondre à ces questions, l’accent est mis sur l’étude de certaines réjouissances populaires au sein de quatre populations rurales d’origine française, c’est-à-dire les habitants de la vallée du Saint-Laurent, de la région de Détroit, du Pays des Illinois et de la Louisiane (plus précisément les habitants d’origine acadienne).
En se fondant sur des monographies publiées, des manuscrits personnels, de la correspondance ecclésiastique, de la littérature de fiction et des travaux de folkloristes, chacun des cinq chapitres représente une étude de cas qui permet de montrer comment les réjouissances populaires sont influencées par le contexte dans lequel les habitants vivent et comment la sociabilité festive intervient dans la construction de différentes identités sociales, c’est-à-dire des identités de race, de genre et de classe. Dans le premier chapitre, le regard porté sur les noces des Canadiens et des Louisianais d’origine acadienne à la fin du XVIIIe siècle et au milieu du XIXe siècle fait ressortir que la nourriture, la boisson, la musique et la danse sont très présentes, mais surtout que ces festivités sont le théâtre de nombreux rites de passage s’adressant au nouveau couple, et souvent plus particulièrement à l’épouse, qui permettent à la communauté de contrôler la reconnaissance et l’officialisation de leur union sociale et sexuelle. Dans le deuxième et le troisième chapitre, l’analyse de la guignolée, de l’Épiphanie et surtout du carnaval au Canada, à Détroit ainsi que dans les villages du Pays des Illinois permet de montrer que cette période festive est influencée par le climat hivernal des colonies nordiques et qu’elle demeure un moment fort de la vie sociale des habitants. Elle est, entre autres, synonyme, dans les trois régions, de rencontres, de soupers et de bals au cours desquels les habitants déterminent ceux qui ont le droit de se fréquenter, c’est-à-dire des jeunes issus du même rang social, et ceux qui font partie intégrante de leur communauté et ceux qui en sont exclus, c’est-à-dire des habitants plus démunis (vallée du Saint-Laurent) ou des Noirs et des Autochtones (Pays des Illinois). Dans le quatrième chapitre, l’étude de l’évolution de la culture dominicale des Louisianais d’origine acadienne met en lumière comment, malgré le succès, au fil du temps, de l’Église catholique dans ses tentatives d’imposer la sanctification de cette journée, les bals de maison perdurent, en étant transférés au samedi, et participent à la construction de l’identité raciale de cette population. Dans le dernier chapitre, l’examen de l’évolution des réjouissances de la plantation du mai expose l’efficacité des rapports de réciprocité pour solidifier et renforcer la hiérarchie sociale dans les campagnes canadiennes, c’est-à-dire entre les habitants et un membre de l’élite locale (seigneur ou capitaine de milice).
Cette thèse contribue à enrichir l’historiographie de la fête en Amérique française qui aborde très peu le sujet des réjouissances populaires rurales sous l’angle de la sociabilité festive. Elle montre que ces réjouissances sont intimement liées aux aspects contextuels de chacune des quatre régions étudiées, c’est-à-dire la démographie, la présence d’autres groupes ethniques, le climat, la géographie, les rapports genrés, l’économie, la situation politique et la hiérarchie sociale. Les habitants francophones des milieux ruraux adaptent leurs réjouissances populaires aux particularités de leur société, mais elles préservent tout de même, parfois jusqu’aux années 1870, leurs fonctions régulatrices de reproduction des hiérarchies sociales, économiques, genrées et raciales. En d’autres mots, elles sont un outil permettant à ces francophones, non seulement d’affirmer leur identité d’origine française, mais aussi d’identifier clairement les personnes qui peuvent ou qui ne peuvent pas se réclamer de cette identité et les inégalités qui sont produites à l’intérieur de ce processus. / This thesis focuses on the social roles of popular celebrations in rural French-speaking communities of North America between 1770 and 1870. It approaches the subject of festivals by looking more precisely at the festivity. The main objective is to highlight how the festivities, which we call popular celebrations, influence the functioning of North American francophone societies. What roles do popular celebrations play in the social life of the inhabitants of these societies? What impacts do they have on individual and collective identities? Do they retain the same characteristics from one society to another or do they adapt to different environments and contexts? How do they develop and evolve over time? What are the elements that influence their evolution? In order to answer these questions, the focus is on studying certain popular celebrations among four rural populations of French origin, namely the inhabitants of the St. Lawrence Valley, the Detroit region, the Illinois Country and Louisiana (more specifically, the inhabitants of Acadian origin).
Based on published monographs, personal manuscripts, church correspondence, fictional literature and the work of folklorists, each of the five chapters represents a case study that shows how popular celebrations are influenced by the context in which people live and how festive sociability is involved in the construction of different social identities, such as those relating to race, gender and class. In the first chapter, a look at the weddings of Canadians and Louisianans of Acadian origin in the late 18th and mid-19th centuries reveals that food, drink, music and dance are very much in evidence, but above all that these festivities are the scene of many rites of passage for the new couple, and often more particularly for the wife, allowing the community to control the recognition and formalization of their social and sexual union. In the second and third chapters, the analysis of the guignolée, Epiphany and especially the carnival in Canada, Detroit and the villages of the Illinois Country shows that this festive period is influenced by the winter climate of the northern colonies and that it remains a key moment in the social life of the inhabitants. Among other things, it is synonymous in all three regions with meetings, dinners and balls during which residents determine who has the right to court with whom, that is, young people of the same social rank, and those who are an integral part of their community and those who are excluded from it, that is, poorer residents (St. Lawrence Valley) or Blacks and Indigenous people (Illinois Country). In the fourth chapter, the study of the evolution of the Sunday culture of Louisianans of Acadian origin highlights how, despite the success, over time, of the Catholic Church in its attempts to impose the sanctification of this day, house balls persist, being transferred to Saturdays, and contribute to the construction of this population’s racial identity. In the last chapter, an examination of the evolution of the May Day celebrations shows the effectiveness of reciprocal relationships in reinforcing and strengthening the social hierarchy in rural Canada, that is, between country people and a member of the local elite (seigneur or militia captain).
This thesis enriches the existing historiography of festival in French America, which hardly addresses the subject of rural popular celebrations from the perspective of festive sociability. It shows that these celebrations are closely linked to the contextual aspects of each of the four regions studied, i.e. the demography, the presence of other ethnic groups, the climate, the geography, the gender relations, the economy, the political situation and the social hierarchy. Francophone inhabitants of rural areas adapt their popular celebrations to the particularities of their society, but those celebrations still preserve, sometimes until the 1870s, their regulatory functions of reproducing social, economic, gender and racial hierarchies. In other words, they are a tool that allows these Francophones not only to affirm their identity of French origin, but also to clearly identify the people who can or cannot claim this identity and the inequalities that are produced within this process.
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Réjouissances monarchiques et joie publique à Paris au XVIIIe siècle : approbation et interrogation du pouvoir politique par l'émotion (1715-1789) / Rejoicings and popular joyfulness : asserting and questioning political power through feelings (1715-1789)Valade, Pauline 03 December 2016 (has links)
Dans la société d’Ancien Régime, les réjouissances monarchiques et les manifestations de joie publique avaient une fonction essentielle pour le pouvoir politique. Leur organisation, ainsi que leur déroulement, démontraient une attention soutenue aux manières d’émerveiller, d’amuser et de susciter des démonstrations de joie parmi la population parisienne. Privée de toute parole politique, celle-ci était néanmoins convoquée pour acclamer et approuver le pouvoir royal et le gouvernement. Toutefois, les réjouissances étaient avant tout un espace de dialogue entre les élites et la population de la capitale parce que cette dernière se réservait le droit de témoigner ou non sa joie, dans le but de critiquer ou d’interroger les vertus du pouvoir politique. Par l’étude des décisions, des modalités de l’organisation et de l’encadrement des réjouissances, il s’agit de comprendre dans quelle mesure le pouvoir monarchique avait besoin des réjouissances pour manifester sa puissance et ses vertus dans un espace public normalisé et contrôlé. Il apparaît alors que se réjouir était un devoir des sujets. L’analyse des moyens mis en œuvre pour réjouir la population permet de rendre compte des perceptions élitaires de la population, strictement réduite à ses capacités sensorielles. L’étude des feux d’artifice, des jets d’argent ou des gestes de charité du pouvoir royal révèle néanmoins un intérêt certain pour s’assurer des acclamations bien calculées. La dernière partie s’interroge sur les manières dont la population répondait aux sollicitations du pouvoir. L’analyse des expériences de la joie publique, des princes aux plus humbles Parisiens, permet de comprendre que l’obéissance n’excluait jamais une appropriation personnelle des événements. Les manifestations officielles de la joie étaient autant des objets de négociations que de détournement, à des fins contestataires ou plus transgressives, surtout dans le dernier tiers du XVIIIe siècle. Ainsi, la culture de l’approbation, inculquée tout au long du siècle, servit paradoxalement une culture de la contestation puisque le devoir de se réjouir était devenu un droit à se réjouir. / In the society of Ancient Regime, the monarchical festivities and public manifestations of joy had an essential function for political power. Their organization and their progress, demonstrated a sustained attention to ways to amaze, amuse and provoke demonstrations of joy among the Parisian population. Deprived of any political speech, this one was convened to applaud and approve the royal power and government. However, the celebrations were primarily a space for dialogue between the elites and the population of the capital because it reserved the right to show or not his joy, in order to criticize or question the virtues of political power. By studying the decisions, rules for the organization and supervision of the festivities, this is to understand how the monarchy needed the festivities to show his power and virtues in a public space under political and police control. It appears that rejoicing was a duty of the subjects. Analysis of the means used to delight the population can reveal the elite perceptions of the population, strictly reduced sensory abilities. The study of fireworks, throwing money or charitable gestures of royal power nevertheless throws new light on interests to ensure well-calculated cheers. The final part examines the ways in which people responded to the demands of power. The analysis of the experiences of the public joy, helps understand that obedience never excluded a personal appropriation of events, for princes to the humblest Parisians. As official events of joy were subjects of negotiations as they were diversion for protester or transgressive purposes, especially in the last third of the eighteenth century. Thus, the culture of assertion, instilled throughout the century, paradoxically served a culture of protest since the duty to cheer became a right to rejoice.
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