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Comprendre la situation d’interaction entre des personnes vivant avec de l’aphasie et les interlocuteurs non-familiers de leur communauté

Anglade, Carole 08 1900 (has links)
Contexte L’aphasie, conséquence d’une lésion neurologique, est une difficulté à parler, comprendre, lire ou écrire. La diminution de qualité de vie des personnes vivant avec une aphasie (PVA) ne serait pas associée à la sévérité de l’aphasie, mais à leur participation - c’est à dire la façon dont une personne fonctionne dans la société. Les PVA réalisent moins d’activités sociales, et s’en montrent insatisfaites. Elles éprouvent de la difficulté à communiquer dans leurs échanges du quotidien, y compris avec des personnes non familières de la communauté comme les commis, serveurs, etc. Quand ces interactions sont jugées trop difficiles, les PVA peuvent en venir à éviter de communiquer avec d’autres interlocuteurs que leurs proches et s’enfermer dans un environnement de communication protégé mais limité. Ceci ne leur permet plus de s'engager dans la société autant qu’elles le souhaiteraient. En s’isolant ainsi, leur qualité de vie est menacée. Il est donc à la fois nécessaire et important de favoriser les interactions des PVA en dehors du domicile, ce qui est encore peu courant dans les interventions orthophoniques proposées en réadaptation. Pour cela, il faut pouvoir comprendre les situations dans lesquelles les PVA peuvent s'engager dans le cadre de leurs activités quotidiennes. Or peu d’écrits ont étudié en détail les situations d'interaction entre des PVA et les interlocuteurs non familiers de leur communauté. Objectif L’objectif de ce projet doctoral est de comprendre la situation d’interaction entre des PVA et des interlocuteurs non familiers de leur communauté. Méthodologie Trois études furent réalisées. - Nous avons effectué une première étude à visée exploratoire avec l'objectif de décrire, grâce à l'analyse de conversation, la structure de ces interactions de service récoltées auprès de 6 PVA (étude 1).  - À partir de la première étude et toujours grâce à l'analyse de conversation, nous avons réalisé une nouvelle étude, visant à décrire comment ces 6 PVA faisaient comprendre leurs requêtes lors des interactions de service malgré leur aphasie (étude 2). - Enfin, dans une troisième étude nous avons cherché à comprendre - avec une étude de cas - comment une personne dont l'aphasie était sévère vivait la situation d’interaction de service au quotidien (étude 3). Résultats Dans l'étude 1, nous avons décrit les situations d’interaction de service de la vie quotidienne (ISQ) pour les PVA, et en avons notamment relevé la structure en quatre étapes sur le plan de la communication. Les interlocuteurs doivent s’entendre sur : 1) leur disponibilité à réaliser l’interaction, 2) l’objet de l’achat, 3) son prix, 4) le fait que l’interaction commerciale est terminée. Cette étude a également révélé que : - Les étapes 1 et 4, au cours desquelles la PVA doit faire comprendre à l’interlocuteur qu’elle est prête à commencer / clore l’interaction, ne représentent pas de défi spécifique pour les PVA. - Les étapes 2 et 3 peuvent pour leur part représenter des défis sur le plan de la communication. L'étape 2 visant à faire comprendre à l’interlocuteur l’objet de l’achat ou de l’intérêt de la PVA, l’interaction sera facilitée si la PVA peut se servir elle-même ou pointer sur des supports visuels. L'étape 3 sera facilitée si le montant est visible au moment où la PVA prend connaissance du prix qu'elle doit payer. Cette première étude a ainsi permis de mieux circonscrire les sources de défis sur le plan de la communication pour les PVA lors d’interactions à la caisse. Dans la deuxième étude, nous nous sommes spécifiquement penchées sur l'étape 2 des interactions de service afin d'analyser comment les PVA font comprendre l’objet de leur intérêt à leurs interlocuteurs. Nous avons examiné comment la PVA exprimait sa requête, et comment l’interlocuteur y réagissait. Cette étude mit en lumière la façon dont les personnes vivant avec une aphasie même sévère pouvaient faire comprendre l’objet de leur requête lors des interactions de service en appuyant leur communication non verbale dans le contexte et l’environnement physique de l’interaction. Dans notre étude 3, nous avons montré que la participation aux interactions de service de la vie quotidienne (ISQ) semblait liée chez le participant de cette étude de cas à la confiance qu’il avait dans sa capacité à réaliser l’ISQ malgré son trouble du langage. Ce participant a démontré un éventail de savoir-être et savoir-faire lissant l’interaction là où l’aphasie aurait pu l’écorcher, lui permettant d'obtenir le bien ou le service qu'il désirait, tout en donnant l'image d'un bon client, et ce malgré son aphasie. Conclusions Les interactions de service représenteraient une situation de communication dans laquelle les PVA pourraient participer de façon autonome et efficace. Leur structure, contexte et environnement physique pourraient permettre d'appuyer la communication non-verbale des PVA, et la relation de service orienterait les interlocuteurs vers une collaboration dans l'échange. Il est possible pour les PVA - mêmes celles dont l'aphasie est sévère - d'avoir confiance dans leur communication dans les situations d’interactions de service avec des personnes non familières, et de participer dans leur communauté de façon plus satisfaisante. / Background Aphasia is a difficulty in speaking, understanding, reading or writing as a result of neurological damage. The quality of life of people living with aphasia (PLWA) is not related to the severity of aphasia, but to their participation - that is, how well a person functions in society. PLWA perform fewer social activities and are less satisfied with them. They find it difficult to communicate in their daily interactions, including with people unfamiliar within their community such as clerks, waiters, etc. They have difficulty communicating in their daily interactions. If these interactions are felt to be too difficult, PLWA may avoid communicating with people other than their relatives, and remain in a protected but limited communication environment. This does not allow them to engage in society as much as they would like. By isolating themselves this way, their quality of life is threatened. It is therefore important to encourage PLWA’s interactions outside their home, which is still uncommon in speech-language pathology interventions offered in rehabilitation. This requires an understanding of the situations in which PLWA may engage in their daily activities. However, there is little literature that has examined in detail the situations in which PLWA interact with unfamiliar people in their community. Objective The objective of this Ph.D. project is to understand the situation of interaction between PLWA and unfamiliar people within their community. Methodology Three studies were carried out. The first is an exploratory study whose objective is to describe through conversation analysis the structure of service encounters collected from 6 PLWA (study 1). Based on Study 1 and still using conversation analysis, we conducted a new study to describe how these 6 PLWA made their requests understood during service interactions despite their aphasia (study 2). Finally, in a third study we sought to understand with a case study how a person with severe aphasia experienced this communication situation in everyday life (study 3). Results In Study 1, we described the Daily Service Encounter (DSE) situations for PLWA, including the four-step communication structure. Interlocutors must agree on: 1) their availability to perform the interaction, 2) the purpose of the purchase, 3) the price, 4) that the business interaction is complete. This study also found that: -Steps 1 and 4, where the PLWA must make the interlocutor understand that they are ready to begin/end the interaction, do not present specific challenges for PLWA. -Steps 2 and 3 however may present communication challenges. Since Step 2 aims to make the clerk understand the purpose of the purchase, the interaction will be facilitated if PLWA can help themselves or point to visual aids. Step 3 will be facilitated if the price is visible when PLWA are ready to pay. This initial study thus made it possible to better identify the sources of communication challenges for PLWA at the checkout. In the second study, we specifically looked at Step 2 of the service interactions in order to analyze how PLWA make the clerks understand the purpose of their interest. We looked at how the PLWA expressed their request, and how the clerks responded to it. This study highlighted how PLWA – even severe aphasia - could make the subject of their request understood during service encounters by supporting their non-verbal communication in the context and physical environment of the interaction. In our third study, we found that participation in DSE appeared to be related - in this case study - to the confidence of the participant in his ability to perform the DSE despite his language impairment. This participant demonstrated a range of interpersonal skills and abilities that smoothed interaction where aphasia might have nicked it, enabling him to obtain the good or service he wanted, while still presenting the image of a good customer, despite his aphasia. Conclusion Service encounters provide communication situations in which PLWA could participate effectively. Their structure, context, and physical environment would support the non-verbal communication of PLWA, and the service relationship would direct the interlocutors towards collaborative exchange. It is possible for PLWA - even those with severe aphasia - to be confident in their communication with unfamiliar people in service encounters, and to participate in their community in a more satisfying manner.

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