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Évolution du sens des termes de couleur et de leur traitement poétique : l'élégie romaine et ses modèles grecsPelletier-Michaud, Lydia 23 April 2018 (has links)
Tableau d’honneur de la Faculté des études supérieures et postdoctorales, 2015-2016 / Les termes de couleur, anciens ou modernes, ne peuvent être réduits à la dénomination de catégories servant à diviser le spectre des visibles : cet ensemble lexical unique mérite d’être considéré comme un phénomène linguistique et littéraire à part entière. Pourtant, trop souvent encore, les études portant sur le vocabulaire de la couleur tendent à subordonner le système langagier au phénomène physique, conséquence indirecte de la recherche d’objectivité qu’une vision positiviste attribue aux sciences de la nature. Les termes de couleur sont alors examinés selon des critères qui ne correspondent pas à leur véritable essence – une attitude qui, dans le cas des langues anciennes, mène à des constats d’imprécision injustifiés. Dans les faits, l’emploi des termes de couleur transcende largement la dimension visuelle : leur nature se révèle essentiellement subjective, et ce à plus forte raison dans les textes littéraires, dont se compose l’essentiel du matériel dont nous disposons pour étudier les cas du grec et du latin. Plutôt que de mettre l’accent sur les différences entre conceptions anciennes et modernes, cette étude aborde la couleur en tant que phénomène culturel dans une optique de continuité ; elle vise à montrer que l’analyse littéraire de textes poétiques anciens peut nourrir une réflexion sur la nature des couleurs et sur les processus qui mènent à leur conceptualisation. Après avoir posé les bases d’une réflexion sur la nature de la couleur (Chapitre I), cette thèse étudie le traitement poétique des termes de couleur et, de façon plus générale, l’utilisation des procédés littéraires faisant appel au chromatisme, chez les élégiaques latins (Ovide, Properce, Tibulle et le Corpus Tibullianum) et Catulle, à partir de leurs principaux modèles grecs d’époque alexandrine (Théocrite, Callimaque) et archaïque (poésie lyrique et épopée homérique). L’étude se focalise autour de quatre grands thèmes qui correspondent à des images littéraires développées par les poètes élégiaques – le « petit livre coloré » (Chapitre II), le « portrait en rouge et blanc » (Chapitre III), l’« amant pâle » (Chapitre IV) et la « mer céruléenne » (Chapitre V). Le corpus principal, approché dans l’ordre chronologique inverse, est envisagé sous l’angle de la réécriture. En effet, l’imitation émulative se trouve au cœur du processus créatif des poètes latins, qui élaborent leur identité d’auteurs en réinventant les vers de leurs prédécesseurs ; ce procédé amène les poètes à reprendre et à enrichir des images littéraires colorées, donnant naissance à des topoi et à des associations d’idées qui, au fil des siècles, tendent à se cristalliser sous la forme de termes de couleur abstraits. / Color terms, in modern and ancient languages alike, cannot be reduced to sections of the visible spectrum: this complex and rather unique lexical ensemble deserves our full attention as a linguistic and literary phenomenon. Yet color vocabulary is still too often regarded as an imperfect means to describe visual perceptions, a system that fails to achieve the precision of optical science. This idea, a consequence of the quest for objectivity which natural sciences are hoped to provide, does not reflect the true nature of color terms and induces an important bias in their study: as a result, many classical philologists have come to judge Greek and Latin color vocabularies as underdeveloped and their use by ancient authors as clumsy. The purpose of color terms is not limited to description in terms of chromatic acuteness: in fact, this vocabulary proves to be subjective by nature. This is even truer about its literary use, and literature constitutes the main material available to study color terms in Greek and Latin. Instead of looking for differences between ancient and modern conceptions, this study focuses on continuity and on color as a cultural phenomenon; its aim is to show that the analysis of ancient poetry can contribute to a more general reflection on the nature of colors and to our understanding of how they become concepts. Beginning with a chapter devoted to the nature of color (Chapter I), this dissertation studies the poetic treatment of color terms and, more generally, the use of literary devices pertaining to chromatism in Roman Elegists (Ovid, Propertius, Tibullus and the Corpus Tibullianum) and Catullus, as well as in their Greek models from the Hellenistic (Theocritus, Callimachus) and Archaic (lyric poetry and Homeric epics) periods. The study focuses on four poetic figures – the “little, colorful book” (Chapter II), the “red and white portrait” (Chapter III), the “pale lover” (Chapter IV) and the “cerulean sea” (Chapter V). Each of these chapters surveys the meaning of Latin vocabulary and expressions through the Greek verses they refer to. The corpus is approached in reverse chronological order, with more specific attention paid to intertextuality and rewriting: imitatio plays in fact a crucial role in the creative process of Latin poets, who construct their identity as authors as they interpret and transform pre-existing text. The colorful imageries that are thus being developed over centuries give birth to topoi and strong associations between emotions and realities that tend to crystallize in the form of abstract color terms.
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