L'art de l'Ancien Empire, ayant mis en place le canon dit « classique » du corps égyptien, est souvent décrit comme uniforme, fondé sur la répétition de la même image parfaite sur les murs des tombes. Pourtant, certains personnages se distinguent par leurs caractères physiques inhabituels, allant du détail corporel atypique à une infirmité évidente. Ainsi, des aveugles, boiteux, chauves, malades, bossus, nains ou encore obèses se dissimulent parmi leurs congénères dans les registres des programmes décoratifs. Une étude minutieuse des parois révèle une profusion de ces figures qui se distinguent par l'emplacement, la fonction, le rôle social, les attributs ou la nature de l'altération. Si certains groupes ont été largement étudiés ces dernières années comme les nains, d'autres demeurent moins connus voire à peine signalés dans les publications. Pourtant, ces images parfois crues et disgracieuses révèlent bien la volonté des artisans-artistes de cette époque de souligner un contexte spécifique et d'ajouter du sens à la scène. En rassemblant tous ces personnages en hors norme, en les comparant et en analysant leur iconographie, il est possible de tendre vers une vision plus proche de la réalité égyptienne, et notamment de la façon dont était perçue cette catégorie de population. D'autre part, la présence du handicap dans l'art égyptien pose une question essentielle : pourquoi avoir recréé sur les murs des tombeaux un univers fonctionnel non pas peuplé de sujets parfaits, mais parsemé d'êtres imparfaits ?Dans un champ d'investigation chronologiquement délimité (du Prédynastique au milieu du Moyen Empire), nous avons choisi d'analyser ces figures et leur apport à notre connaissance de la société égyptienne, et plus généralement à l'histoire et à la représentation du handicap dans l'art. Afin de mieux comprendre la perception du corps altéré chez les anciens Égyptiens, seront étudiés les mots qui les désignent, les causes médicales possibles, le développement et les innovations iconographiques qui ont pu se répandre dans toutes les nécropoles du pays. Le rôle de ses figures, les sens qu'elles recouvrent, ainsi que leur rapport avec les constatations médicales sur les restes humains nous en apprendront davantage sur la société égyptienne au temps des pyramides. Certaines figures, comme le bouvier émacié ou le notable replet, sont devenues les symboles d'une classe sociale particulière et ont connu une longévité dans l'art et la littérature. La reprise de certains motifs d'une sépulture à une autre, parfois distantes de centaines de kilomètres, révèlent également une stratégie fondée sur la référence et la citation.Ainsi, loin d'être un monde uniforme et régulier, les décors des tombeaux se révèlent finalement bien plus complexes et étoffés qu'une simple évocation de l'idéal égyptien. / The art of the Old Kingdom, having set up the so-called "classical" canon of the Egyptian body, is often described as monotonous, with the repetition of the same perfect image on the walls of the tombs. But some characters are distinguished by their unusual physical characteristics, ranging from atypical body detail to obvious disability. Thus, blind or lame people, bald men, sick characters, hunchbacks, dwarves or fat people hid among their congeners in the registers of decorative programs. A study of the walls reveals a profusion of these figures, which are distinguished by the location, function, social role, attributes or nature of their alteration. While some groups have been widely studied in recent years as dwarves, others remain less known or barely reported in publications. However, these images sometimes raw reveal the will of the artists to emphasize a specific context and add some meaning to the scene. By bringing all these characters together, comparing them and analyzing their iconography, it is possible to reach a closer vision of the Egyptian reality, and in particular the perception of disabled people. On the other hand, the presence of disability in Egyptian art poses an important question: why did they choose to recreate on the walls of the tombs a functional universe not with perfect subjects, but strewn with imperfect beings?From Predynastic to the Middle Kingdom, we chose to analyze these figures and their contribution to our knowledge of Egyptian society, and more generally to the history and representation of disability in art. In order to better understand the perception of the altered body among the ancient Egyptians, we will study the words that designated them, the possible medical causes, the development and the iconographic innovations that may have spread to all the necropolises in the country. The role of these figures, their meanings and their relationships to the medical findings on human remains will tell us more about Egyptian society. Some characters, such as the emaciated herdsman or the fat nobleman, have become symbols of a particular social class and had a longevity in art and literature. The reuse of images from one tomb to another, sometimes hundreds of kilometers apart, also reveals a strategy based on reference and quotation.Thus, far from being a uniform and regular world, the decorations of the tombs reveal to be far more complex and elaborated than a simple evocation of the Egyptian ideal.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2018MON30058 |
Date | 05 December 2018 |
Creators | Lhoyer, Bénédicte |
Contributors | Montpellier 3, Mathieu, Bernard |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | English |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
Page generated in 0.0025 seconds