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La jeunesse comme espace de tri : l'évolution des modes de vie des jeunes au Canada de 1981 à 1998

Mémoire numérisé par la Direction des bibliothèques de l'Université de Montréal. / Notre étude porte sur l'évolution des modes de vie des jeunes au Canada entre le début des années 80 et la fin des années 90 et prolonge une recherche déjà réalisée par Dominique Meunier, Paul Bernard et Johanne Boisjoly en 1995. Cette dernière portait sur l'évolution des modes de vie des jeunes Canadiens durant les années 80. En prolongeant l'analyse jusqu'à la fin des années 90, nous avons cherché à savoir comment s'articulent, depuis les 20 dernières années, les liens que les jeunes entretiennent avec les études, avec le travail rémunéré et avec les différents modes de cohabitation, afin de cerner les principaux modes de vie qui caractérisent leur entrée dans l'âge adulte. Nous avons aussi cherché à connaître les principales différences entre l'évolution des modes de vie des femmes et des hommes.
En plus de chercher à re-vérifier, pour une période plus récente, les hypothèses de Meunier, Bernard et Boisjoly, soit celle d'un retardement dans l'atteinte des seuils d'entrée dans la vie adulte, celle d'une désynchronisation de ces seuils et celle d'une atténuation des différences entre les parcours masculins et féminins, nous avons élaboré une autre hypothèse, qui rend bien compte de la nouvelle configuration structurelle de la jeunesse. Nous avons en effet mis de l'avant le fait que depuis les 20 dernières années, le contexte de précarité qui domine l'ensemble des processus d'intégration sociale et professionnelle a contribué à faire passer la jeunesse d'un état de passage à celui d'espace. De plus, nous avons voulu insister sur le caractère « sélectif » de l'espace jeunesse, où différences et inégalités agissent pour trier les jeunes et les acheminer vers l'âge adulte.
En somme, l'essentiel de notre principale hypothèse de recherche consistait à dire que la jeunesse est véritablement scindée à la fin des années 90; elle est le lieu d'une polarisation, où certains sont avantagés et d'autres pas. Non seulement les jeunes n'appartiennent pas aux même milieux sociaux, mais ils ne naissent pas non plus dans un même contexte socio-économique et historique. Des facteurs de classe, d'origine sociale et de contexte créent nécessairement des inégalités au sein de la jeunesse, inégalités qui se manifestent dans la capacité des jeunes à sortir de la dépendance caractéristique de l'adolescence. Nous avons aussi émis l'hypothèse de la poursuite de l'atténuation des différences entre les hommes et les femmes, se traduisant essentiellement par une plus grande place faite aux jeunes femmes dans le marché du travail.
Afin de vérifier la validité de nos hypothèses, nous avons utilisé les données de l 'Enquête sur les finances des consommateurs, que Statistique Canada mène annuellement auprès d'environ 80 000 personnes. Cette enquête nous a procuré des informations sur les trois grandes dimensions à partir desquelles l'entrée dans la vie adulte est cernée: les rapports de cohabitation, les rapports aux études et les rapports au travail rémunéré.
Les résultats de nos analyses indiquent que la jeunesse comme espace précaire est l'objet d'une double polarisation à la fin des années 90. Chez les jeunes « plus vieux », âgés de 25 à 34 ans, bien que la majorité soit établie à la fois au plan professionnel et au plan résidentiel, une proportion croissante présente toujours certaines caractéristiques de la dépendance. De plus en plus de ces « vieux » jeunes manifestent de la difficulté à s'extirper complètement de la jeunesse. Cette difficulté se traduit par une insertion précaire et fragile dans le marché du travail, par une cohabitation prolongée avec la famille d'origine ou encore par l'obligation de partager les frais domestiques quotidiens avec d'autres personnes -la colocation-, des personnes avec qui ils n'entretiennent pas de liens conjugaux. Chez les jeunes « plus jeunes », âgés de 15 à 24 ans, la tendance principale est à la scolarisation accentuée. Ces « jeunes » jeunes mettent de plus en plus le cap sur les études, non seulement comme priorité mais comme activité exclusive. Ils adoptent une stratégie qui, certes, les maintient plus longtemps dans un état de dépendance face à leurs parents, mais qui tend à réduire les effets négatifs de l'adoption de statuts dits « hybrides ».
Alors qu'une proportion croissante de « vieux » jeunes semblent souffrir des stratégies adoptées antérieurement, les «jeunes» jeunes ont majoritairement adopté une stratégie différente pour tenter de mettre les chances de leur côté. Les résultats de nos analyses nous indiquent aussi que bien des femmes de plus de 25 ans connaissent une trajectoire nouvelle : ayant, au cours de la décennie 1980-1990, massivement accru leur présence à l'école, elles prennent, à la fin des années 90, de plus en plus leur place sur le marché du travail, réduisant considérablement l'écart qui les sépare des hommes, mais elles tendent aussi, dans une proportion croissante, à ne plus vivre en couple.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/33671
Date08 1900
CreatorsDoray, Amélie
ContributorsBernard, Paul, Boisjoly, Johanne
Source SetsUniversité de Montréal
Languagefra
Detected LanguageFrench
Typethesis, thèse
Formatapplication/pdf

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