Le travail s'articule autour de trois grandes questions. 1 - Comment e st née l a géomo rpholo gie paraglaciair e ? La première partie relève d'une approche épistémologique de la géomorphologie paraglaciaire. Le premier chapitre reprend les contributions scientifiques fondatrices du concept de paraglaciaire des années 1970, et les replace dans une perspective sémantique en analysant les travaux conduits depuis le 19e siècle sur les milieux englacés et leurs marges. Church et Ryder (1972) définissaient le terme de paraglaciaire comme " non-glacial processes conditioned by glaciation ". En 2002, Ballantyne a proposé une définition plus large du concept : " earth surface processes, sediments, landforms, landsystems and landscapes that are directly conditioned by former glaciation and deglaciation ". Le deuxième chapitre analyse donc les apports de trente années de recherche en géomorphologie paraglaciaire, reprend le concept de géosystème paraglaciaire et analyse les sous-systèmes (gravitaire, fluvial, lacustre, éolien, littoral, marin et socio-spatial) face aux séquences paraglaciaires. 2 - Qu'est -ce qu'une crise paraglaciaire ? La deuxième partie se propose de délimiter les contours de la géomorphologie paraglaciaire dans le cadre d'une approche spatio-temporelle. Le troisième chapitre étudie les changements climatiques susceptibles d'être à l'origine des crises temporelles paraglaciaires. Le quatrième chapitre définit les crises paraglaciaires et met l'accent sur les temporalités de ces moments clés dans l'histoire des environnements englacés. Sur le plan temporel, le paraglaciaire désigne avant tout une séquence morphologique, une crise d'érosion, qui suit la séquence glaciaire précédente. Ces crises s'illustrent par des temporalités variées, des accélérations des transferts sédimentaires surtout dans les matériaux meubles et une extension des emprises spatiales des phénomènes associées à la disparition des glaciers puisque le ruissellement redistribue les sédiments des zones proglaciaires jusqu'à la mer. Les versants sont soumis à des stress physiques générant des décohésions des parois. Les dépôts de versants sont affectés par des ravinements majeurs. Les systèmes fluviaux enregistrent des aggradations ou des dissections en fonction de la variabilité des apports, de l'énergie des processus, de la variabilité des niveaux de base locaux, régionaux ou globaux. Ils connaissent de profondes métamorphoses qu'illustrent les adaptations des variables morphologiques. Les littoraux meubles paraglaciaires bénéficient d'un apport tel en sédiments qu'ils progradent sur les marges des secteurs en phase de déglaciation. Des crises volcaniques sont également associées à ces crises climatiques et un volcanisme paraglaciaire s'observe dans des régions comme l'Islande. Les apports majeurs à la compréhension de ces crises paraglaciaires viennent des progrès technologiques pour évaluer les bilans sédimentaires et pour les dater. Une crise paraglaciaire est définie par des indicateurs comme les taux d'ablation, taux d'incision, taux de production primaire de débris, taux de transferts sédimentaires, taux de sédimentation. Ces indicateurs montrent qu'ils dépassent pendant un laps de temps t, d'un facteur n, les résultats enregistrés pendant la séquence t-1 et t +1. Cet écart est variable d'un indicateur à l'autre et d'un système à l'autre. La durée de la séquence paraglaciaire est donc d'une grande variabilité, mais doit être limitée à cette rupture temporelle dans l'évolution d'un environnement au cours duquel il est perturbé. 3 - Quels sont les apports de la géomorphologie paraglaciaire à la compréhension de l'évolution des milieux froids ? La troisième partie interroge des modelés des milieux froids pour appréhender la part du paraglaciaire ; du glaciaire et du périglaciaire dans leur évolution. Le cinquième chapitre détermine les formes paraglaciaires au sens strict. Les deux processus paraglaciaires par excellence sont d'une part la décohésion postglaciaire qui affecte les parois rocheuses et d'autre part, le ruissellement alimenté par la fonte de la glace des glaciers et celle de la glace morte qui remobilise les sédiments meubles. Ainsi, des formes d'ablation et d'accumulation associées à ces dynamiques sont elles représentatives de cette dynamique paraglaciaire (grands glissements, écroulements, éboulements massifs). En revanche, le ruissellement très actif au cours de la séquence paraglaciaire est à l'origine de la construction de formes de ravinement, d'incision et d'accumulation (cônes de déjection...). Les signatures sédimentologiques sont alors différentes et les vitesses de sédimentation sont plus élevées que lors des autres séquences morphogéniques. Toutes les zones de stockage (bas de versant, lacs, plaines alluviales, fjords...) offrent des espaces propices à l'évaluation de ces temporalités et des bilans sédimentaires associés. Le sixième chapitre reprend les grandes formes du " panthéon " glaciaire (cirques, vallées en auge, fjords, moraines, drumlins, eskers, kames) et périglaciaire (glaciers rocheux, tabliers et cônes d'éboulis) pour évaluer la part des séquences paraglaciaires dans la genèse et l'évolution de ces morphologies. Le terme de parapériglaciaire est défini. Le paraglaciaire est un concept clé pour comprendre l'évolution des milieux ayant été englacés et il recouvre une réalité très large sur le plan spatial puisqu'il peut s'appliquer à tous les espaces à la surface de la terre ayant été englacées au cours des séquences froides du Pléistocène et leurs périphéries, et qui ne le sont plus aujourd'hui, soit environ 40 % de la surface terrestre, auxquelles s'ajoutent les espaces de sédimentation offshore. Par ailleurs, il reste aujourd'hui environ 10 % d'espaces englacés, dont une fraction est susceptible de connaître une séquence de déglaciation dans le contexte actuel de réchauffement climatique. Né dans les années 1970 au Canada, le concept de paraglaciaire apporte incontestablement une clé de lecture pour la compréhension de l'évolution des paysages applicable à toutes les zones ayant connu directement ou indirectement des phases de glaciation-déglaciation. À l'heure d'une réflexion sur l'impact des changements climatiques sur les environnements, le concept de paraglaciaire ouvre des perspectives et renouvelle les approches géomorphologiques classiques en mettant l'accent sur les stocks sédimentaires, les flux, les bilans, les rythmes et les crises.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00613729 |
Date | 08 October 2010 |
Creators | Mercier, Denis |
Publisher | Université Blaise Pascal - Clermont-Ferrand II |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | habilitation ࠤiriger des recherches |
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