L'œuvre d'Hervé Guibert est marquée par l'enfance. Partout, l'enfance est convoquée : celle toujours perdue, celle qui survit et insiste, celle qu'il désire rejoindre (voir, prendre, toucher, érotiser, incorporer), celle qu'il faudrait dominer, écraser, détruire, celle qui happe, soumet, éblouit. Dans cette constellation du désir, l'œuvre trace des chemins qu'il nous faut reconstruire. Plus qu'un ensemble de représentations, l'inscription de l'enfance dans l'œuvre de Guibert nous invite à dégager une véritable figure textuelle, laquelle éclaire trois scènes : celle de la jouissance, celle du deuil et celle de la filiation. Le repérage de ces trois scènes et l'analyse de leur mise en récit occupe le cœur de notre travail. Comment s'élabore à même le matériau textuel une quête de jouissance jamais résolue; comment s'inscrit dans le texte un travail de deuil dont l'objet de la perte est le sujet lui-même; comment se construit une filiation alternative, mais surtout, comment s'écrit l'enfance, qui fait tenir entre elles toutes ces scènes? D'abord, nous intéresse l'enjeu narratif. Nous accordons une attention particulière au rôle de la mort dans l'œuvre de Guibert, intrinsèquement liée à l'acte d'écriture. Comment Guibert perçoit-il et subit-il la perspective de sa mort imminente? Quelle trace cherche-t-il à laisser? Ces questions nous mèneront à interroger le statut de l'Autre dans son œuvre. Pour ce faire, nous convoquons plus d'une dizaine de textes de Guibert. Aucun des ouvrages de l'auteur ne se dérobe à la figure de l'enfance, celle-ci étant absolument omniprésente. Cela dit, trois textes ressortent du lot, chacun exploitant largement cette figure : Vous m'avez fait former des fantômes, Voyage avec deux enfants et Le mausolée des amants. L'auteur - avant le sida et avec le sida - anticipe sa fin et fait de sa mort imminente un enjeu textuel. Se trame dans son œuvre un fantasme d'auto-engendrement à comprendre comme le point culminant de la figure de l'enfance : l'écriture, pour Guibert, est enfantement d'une œuvre et enfantement de soi. L'inceste et le cannibalisme, en tant que le sujet les conçoit comme des moyens de jouir du même (de son double, de son enfant) et d'ainsi imposer une filiation circulaire rejoignent la notion d'auto-engendrement. De là, l'analyse de la pulsion orale permet de mesurer la portée de ces mises en scène où se croisent des figures d'ogres et de monstres mythiques.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Hervé Guibert, Enfance, Figure textuelle, Fantasme, Auto-engendrement, Deuil
Identifer | oai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.5989 |
Date | 08 1900 |
Creators | Godin-Ouimet, Louis-Daniel |
Source Sets | Library and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada |
Detected Language | French |
Type | Mémoire accepté, NonPeerReviewed |
Format | application/pdf |
Relation | http://www.archipel.uqam.ca/5989/ |
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